Réouverture de la salle Montaigne à l’Institut français
Dans le cadre du mois de la Francophonie et de la thématique de l’environnement et du «vivant», l’Institut français a organisé, le 19 mars, la réouverture de la salle Montaigne et ses cimaises en grande pompe. La soirée a débuté par le vernissage de l’exposition Un monde sans fin, en association avec les étudiant.e.s de l’Alba, inspirée de la célèbre bande dessinée de Jean-Marc Jancovici et du dessinateur Christophe Blain. Elle s’est terminée par la diffusion du film Le Règne animal, multiprimé aux Césars.
 
Dans son mot de bienvenue, la directrice de l’Institut français du Liban, Sabine Sciortino, a exprimé sa joie de retrouver le public francophone dans la galerie et l’espace rénové de la salle Montaigne, après huit mois de fermeture. Elle a évoqué les manifestations culturelles programmées à l’Institut français de Beyrouth le 20 mars, à l'occasion de la Journée internationale de la Francophonie. Sabine Sciortino a souligné l’importance de la thématique de l’environnement, la réflexion avec les étudiants de l’Alba sur les matériaux, la scénographie et les enjeux climatiques appliqués au Liban, «non seulement pour faire des constatations, mais pour trouver des solutions». Dans cette même perspective, l’auditoire a été convié à assister au film évènement de Thomas Cailley, Le Règne animal, couronné par cinq César parmi les douze nominations qu’il a reçues.



Synopsis du film Le Règne animal
Les humains sont les victimes d’une bizarre pandémie qui provoque une transformation dans le corps humain qui se mue en corps animal. En France, une famille est frappée par le terrible fléau. Lana, la mère d’un jeune adolescent, Émile (campé par l’acteur Paul Kircher) en est atteinte, et se transforme en hideuse figure animale. Elle est placée dans un centre spécialisé et son séjour est vécu comme une horrible séquestration. Son époux, le père d’Émile (l’acteur Romain Duris), quitte Paris pour le sud afin de la récupérer et l’aider à retrouver sa liberté. En route, pris dans un embouteillage, il discute avec son fils du concept de la désobéissance, ce qui crée un parallélisme saisissant avec la scène finale. Non loin d’eux, un camion qui transporte les mutant.e.s transformées en «créatures», sort de l’autoroute et les créatures hybrides d’apparence monstrueuse rejoignent la forêt, dans un fracas assourdissant. Par amour pour elle et par respect des valeurs de la liberté et de l’empathie, le père d’Émile décide de retrouver sa seconde moitié en compagnie de son fils, quels que soient les périls. Cependant, le fils est blessé et découvre le début de sa propre mutation anthropomorphique. L’aventure ne fait que commencer.

L'une des meilleures révélations masculines Paul Kircher.
Métaphores et oxymores, transmission et transition
Le film se situe à la frontière de deux genres: le fantastique et le merveilleux. Malgré les multiples scènes déstabilisantes, voire effrayantes qui perturbent le récit intimiste du père et du fils, le film n’en demeure pas moins une métaphore merveilleuse du monde, de la vie, du devenir humain, condamnés aux mutations. La transformation des humains en «bestioles», comme on le répète dans le film, en réalité en bêtes monstrueuses, suggère les transformations naturelles ou accidentelles qui secouent et ébranlent l’être humain dans sa relation avec son corps. On songe aux invalides, aux personnes en marge, transfigurées et amochées par un accident, ou par une maladie acquise ou génétique. Cela nous fait penser également au déclin du corps, à la vieillesse ou à une puberté difficile et mal vécue.
Bâti sur les métaphores de la mutation et de la différence, Le Règne animal repose curieusement sur des structures antithétiques: la transmission de père en fils et le rejet des normes imposées; la beauté de la nature et la laideur de la dictature humaine; le respect de la faune et la flore, et le recours aux techniques sophistiquées pour le faire; la transmission et la transition vers un état complètement en rupture avec l’état initial. Nous trouvons une apologie de la désobéissance et un hymne à l’amour et à l’amitié. Par amour, le père et l’adolescent vont désobéir aux codes établis qu’ils jugent injustes pour trouver la mère, ce qui les entraînera dans des investigations dangereuses en pleine forêt sauvage. Émile va se lier d’amitié avec l’homme-oiseau géant, dénommé Fix, malgré les apparitions de ce dernier qui glacent le sang. La scène où Fix réussit sa transition, grâce à Émile qui l’encourage régulièrement, à savoir quand il arrive littéralement et littérairement à voler de ses propres ailes, est totalement éblouissante.
De son côté, Fix va essayer de sauver son ami Émile en s’abattant sur l’un de ses détracteurs, mais il paiera le prix de son humanité, de sa propre vie, de son propre sang. Ce qui fait basculer le film du fantastique au merveilleux, c’est le revirement de la situation, quand le père découvre que son fils est atteint du malin virus qui le transformera en homme-loup, alors qu’Émile avait tout fait pour dissimuler sa progressive mutation. Grandiose est la scène où le père, les larmes aux yeux, et le fils enfin libéré de son angoisse, affrontent ensemble la suite, dans une forme d’apothéose.
Enfin, il est important de souligner les magnifiques prothèses des mutant.e.s, les métamorphoses grâce au maquillage, les articulations mécaniques et les différents trucages réalisés avec minutie, qui apparentent le film aux grandes productions hollywoodiennes.
Commentaires
  • Aucun commentaire