Au mois de juin prochain, des millions d'électeurs européens se rendront aux urnes pour élire le nouveau Parlement européen, cinq ans après les dernières élections tenues en mai 2019. Elles revêtent une importance particulière du fait que ce sont les premières qui ont lieu après le déclenchement de la guerre russo-ukrainienne, remettant en question les enjeux de la guerre au niveau de la sécurité européenne, ainsi que la montée de l'extrême droite dans plusieurs pays européens.
La tradition démocratique est solidement ancrée en Europe (le premier Parlement élu directement remonte à 1979) quant à la régularité des élections et au bon fonctionnement des institutions. Cela n’éradique néanmoins pas les défis majeurs auxquels est confronté le projet européen dans son ensemble en termes d'identité et de pérennité, notamment après les avancées significatives réalisées par les groupes de droite dans plusieurs pays européens. Cela aura des répercussions importantes sur l'idée de l'unité et sur les politiques adoptées concernant des questions clé.
Les sondages suggèrent que la droite populiste est en passe de réaliser des percées importantes dans neuf pays européens au moins, dont l'Autriche, la France, les Pays-Bas, la Hongrie, l'Italie et la Pologne. Selon ces prévisions, les groupes extrémistes pourraient également arriver en deuxième ou troisième position en Allemagne et en Espagne.
Il est vrai que la capacité de ces blocs à influencer les discussions et les résultats du Parlement européen dépendra largement de leur capacité à former des alliances transfrontalières leur permettant de faire pression pour l'adoption de législations qu'ils considèrent comme importantes. Cependant, la simple expansion de leur présence au Parlement européen représente, en soi, un changement majeur dans la politique européenne aussi bien interne qu’externe.
Parmi les principaux sujets qui seront au cœur des débats politiques et parlementaires figurent ceux liés à la question de l'immigration. Les partis de droite la considèrent, en effet, comme une réorganisation des identités nationales dans différents pays, ainsi que de l'identité européenne commune. Partant, ils la perçoivent comme une menace sur le mode de vie européen en raison de l'importation de coutumes et de traditions qu'ils jugent «étrangères» à la structure sociale européenne.
Ces derniers proposent souvent des mesures dures comme le repli sur soi et le rejet de nouveaux immigrants voire même l'expulsion d'immigrants déjà installés, faisant fi des incidences sur leur vie ainsi que sur la composition des sociétés où ils se sont intégrés et y ont apporté des contributions significatives dans la vie économique, culturelle et sociale, ou sur l'Union européenne dans son ensemble.
Parmi les propositions les plus dangereuses avancées par ces partis, notons celles liées au changement climatique. La plupart d'entre eux s’opposent à la poursuite des accords internationaux sur le climat visant à réduire les émissions de carbone à zéro d'ici 2050, considérant que cela a un impact sur leurs industries nationales et sur les opportunités d'emploi. Ils laissent croire que la transition vers une économie verte est une perte de temps.
Les objections portent également sur nombre d’autres questions, telle la demande de réexamen de l'ouverture des frontières et des politiques douanières entre les pays européens. Sans oublier la politique de défense où ils réclament une réduction des budgets sans se soucier de ce qui est connu en Europe comme «la menace russe» concernant la sécurité et la stabilité à la lumière des développements de la guerre en Ukraine, qui a éclaté il y a deux ans et qui continue de faire rage sans perspective de solution politique à court ni à long terme.
Les élections parlementaires européennes seront donc cruciales, car le Parlement européen est le seul organe démocratiquement élu de l'Union européenne, ce qui n’est pas le cas de la Commission européenne, du Conseil européen et des autres institutions et organisations européennes.
Il est indéniable que les résultats dans les grands pays détermineront l’orientation générale, avec l'Allemagne représentée par 96 députés (le plus grand nombre en termes de proportion), la France par 81, l'Italie par 76, jusqu'aux pays les moins représentés tels que Chypre, le Luxembourg et Malte (6 députés chacun).
Il n’est pas aisé de gérer un continent peuplé de millions d'habitants, pas plus qu’il ne sera facile de régir les résultats des élections si l'extrême droite populiste venait à l'emporter, car les répercussions ne se limiteront pas à l'Europe mais toucheront le monde tout entier.
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