Riad Kahwaji: L’attaque iranienne révèle la sophistication des défenses aériennes d’Israël

À la suite de l’attaque sans précédent menée par l’Iran contre Israël, Ici Beyrouth a posé trois questions à Riad Kahwaji, analyste en sécurité et défense au Moyen-Orient basé à Dubaï et directeur de l’Institut d’analyse militaire du Moyen-Orient et du Golfe (Inegma). En effet, Téhéran a lancé des drones et des missiles contre l’État hébreu dans la nuit de samedi à dimanche en représailles à la frappe mortelle contre son consulat à Damas le 1ᵉʳ avril.
Vu l’impact relativement faible de cette attaque contre Israël, peut-on considérer que les drones lancés par l’Iran font partie de ses armements les plus puissants?
Il s’agit des mêmes drones utilisés par les Russes contre l’Ukraine, à savoir le «Shahed 136» et le nouveau «Shahed 149» qui a une plus grande autonomie de mouvement. Ces deux types de drones peuvent toutefois être porteurs de la même charge explosive. L’Iran a eu recours à ses drones les plus puissants. Cependant, leur efficacité a été atténuée face aux capacités d’un adversaire tel qu’Israël, qui dispose des systèmes de défense aérienne les plus sophistiqués à plusieurs niveaux, ainsi que d’une puissante force aérienne. Israël a réussi à intercepter tous ces drones, avec l’appui des États-Unis.
Ces drones ont un impact plus significatif en Ukraine parce que ce pays ne dispose pas d’une importante force aérienne, encore moins d’une alliance avec les États-Unis pour assurer sa défense. Nombre de ces drones ont été abattus avant même d’atteindre l’espace aérien israélien. Ils sont tombés comme des mouches. Les seules armes qui auraient atteint Israël sont les quelques missiles balistiques tombés dans une zone non peuplée autour d’une base aérienne dans le Néguev. Israël a décidé de ne pas gaspiller ses missiles coûteux pour les intercepter, laissant plutôt ces projectiles s’écraser dans des zones non habitées.

Le long trajet parcouru par ces drones a-t-il eu une incidence sur leur impact et leur efficacité?
La distance joue un rôle crucial parce qu’elle accorde à la partie ciblée du temps afin de se préparer, de déployer ses mesures défensives renforcées et d’abattre ces drones. Il est évident que les capacités d’Israël pour contrer les menaces aériennes dépassent largement celles de l’Ukraine. C’est principalement grâce au système de défense aérienne sophistiqué d’Israël, ainsi qu’au soutien militaire des États-Unis, que l’impact des drones a été atténué, comme nous l’avons constaté la nuit dernière.
Pensez-vous qu’en cas de riposte potentielle d’Israël, l’Iran recourra à des armes plus puissantes pour contre-attaquer? La défense israélo-américaine dissuadera-t-elle l’Iran à l’avenir?
En cas de riposte israélienne, l’Iran opterait probablement pour une riposte similaire, utilisant les mêmes armes, drones et missiles, balistiques et de croisière. Cela semble être sa meilleure option. Cependant, l’Iran pourrait opter pour une stratégie d’usure, étant donné son vaste arsenal d’armes. La question qui se pose est donc de savoir si les États-Unis et Israël pourraient faire face à de telles attaques de manière quotidienne. Nous devrions nous attendre à de violentes représailles de la part des États-Unis et d’Israël en cas d’escalade ou si une guerre est déclenchée.
En ce qui concerne la dissuasion, de nombreux généraux iraniens sont conscients des capacités israélo-américaines. C'est d’ailleurs ce qui les a toujours dissuadés de mener des confrontations directes avec l’État hébreu. Ceux qui ont sous-estimé ces capacités ont réalisé hier que les armes iraniennes, aussi puissantes soient-elles, ne sont pas efficaces contre les défenses américano-israéliennes. Cela suffira-t-il à les dissuader? C’est difficile à dire. Ils n’ont d’autre choix que de riposter, en cas de réponse israélienne. Cependant, il est certain que beaucoup d’entre eux réévalueront leur approche vis-à-vis d’Israël, notamment après avoir constaté la capacité israélienne à faire face à leurs attaques.
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