Sur les quelque 2 millions de Syriens présents sur le territoire libanais, seuls 300.000 le sont de manière légale, d’après des chiffres avancés par le chef des Forces libanaises (FL), Samir Geagea. Les autres, soit 1.700.000 individus, ne détiennent aucun document officiel les autorisant à s'installer au Liban. «Aucun pays au monde n’a la capacité d’accueillir un aussi grand nombre de déplacés», a martelé le chef des FL, soulignant que le pourcentage maximal de réfugiés dans tout pays ne dépasse pas les 2% de la population.
Lors d’une conférence de presse qui s'est tenue vendredi, au siège des FL, à Meerab, M. Geagea a mis en garde contre «le danger existentiel» que représente, pour le Liban, cette présence massive de migrants et de déplacés syriens. Il s’est ainsi penché sur trois principaux points: un état des lieux de la crise syrienne, le statut juridique des Syriens au Liban, ainsi que le partage des responsabilités sur le plan national.
«Cela fait 13 ans, depuis le début de la guerre en Syrie, en 2011, que l’on souffre de cette crise», a-t-il affirmé, avant d’avertir que le «problème risque de persister 13 années supplémentaires, si nous n’entreprenons rien à cet égard». Il a expliqué, dans ce contexte, que «le taux de natalité au niveau de la population syrienne étant le double de celui des Libanais, le nombre de Syriens au Liban pourrait atteindre les 4 millions d’ici à 2030». À cela s’ajoute le «droit acquis sur le sol» que pourraient avoir, au bout de quelques années, «tous les enfants syriens nés au Liban et qui y ont grandi», et qui contribueraient éventuellement à «l’augmentation des cas de délinquance, à l’affaiblissement économique du pays et à la dilution de la population libanaise».
Statut juridique
M. Geagea a qualifié d’ «absolument illégale» la présence de la majorité des migrants et déplacés syriens au Liban. Il s’est basé, pour cela, sur trois principaux éléments.
Primo, le pays n’est pas un pays d’asile au regard du droit international, n’étant pas signataire de la convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés. «Il s’agit uniquement d’un pays de passage pour les demandeurs d’asile», a-t-il rappelé.
Secundo, le memorandum d’entente du 30 octobre 2003, signé entre l’État libanais et le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), exige que «tout demandeur d’asile soit relocalisé dans un État tiers autre que le Liban dans un délai de six mois, renouvelable exceptionnellement une seule fois» (soit un an au total). Le Liban aura donc «renouvelé 13 fois ce délai, depuis 2011», comme l’a signalé M. Geagea, s’indignant de l'incapacité de l’État à exercer sa souveraineté sur son propre territoire.
Tertio, selon la loi du 11 juillet 1962, la présence illégale d’un étranger est considéré, conformément au Code pénal libanais, comme un crime passible d’emprisonnement et tout étranger qui y réside de manière illégale est soumis à la décision qui doit être prise par la Sûreté générale. Normalement, c'est une peine de prison suivie d'un rapatriement ou un rapatriement direct. Cette décision est purement administrative, aucunement politique et ne nécessite indubitablement pas de décision judiciaire, selon ses explications.
Partage des responsabilités
Le chef des Forces libanaises a imputé la responsabilité de la persistance de cette crise de migrants syriens tant au Premier ministre sortant, Najib Mikati, qu’au ministre sortant de l’Intérieur, Bassam Maoulaoui, ou encore aux forces de l’ordre compétentes.
MM. Mikati et Maoulaoui se doivent, d’après M. Geagea, de veiller à ce que les lois (susmentionnées) en vigueur soient prises en compte et exécutées par les forces de sécurité. De leur côté, l’armée libanaise et les FSI sont tenues de livrer toute personne résidant de manière illégale au Liban à la Sûreté générale qui, elle, se trouve dans l’obligation de procéder à l’expulsion immédiate de tels individus.
Sur un plan plus restreint, et toujours selon M. Geagea, la responsabilité incombe aux «municipalités et aux autorités locales qui sont tenues de veiller à ce que les mesures du ministre sortant de l’Intérieur visant les Syriens soient mises en application». Parmi ces recommandations, l’on retient l’obligation pour les Mohafazat (gouvernorats) du pays de mener une enquête nationale visant à recenser et à enregistrer les déplacés syriens, et à interdire la location de biens immobiliers ou l’octroi de documents officiels aux Syriens non enregistrés.
Le ministère de l'Intérieur avait déjà demandé aux municipalités de procéder à ces mesures, sans en assurer cependant le suivi.
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