Sur les traces de la mystérieuse civilisation des Tartessos
©Crédit photo: Cristina Quicler/AFP

Les archéologues espagnols dévoilent peu à peu les secrets de la civilisation tartessienne, la plus ancienne d’Europe occidentale, disparue il y a plus de 2400 ans.
Les Tartessos, une civilisation énigmatique qui a prospéré entre le IXe et le Ve siècle avant JC dans le sud-ouest de la péninsule ibérique, suscitent depuis longtemps la curiosité des historiens et archéologues. Mentionnée par des auteurs antiques tels qu’Hérodote et Pline l’Ancien, cette civilisation a fait l’objet de nombreuses théories, parfois farfelues, en raison de descriptions contradictoires la présentant tour à tour comme une ville, un royaume, un fleuve ou une étendue d’eau. Certains sont même allés jusqu’à la lier à la légendaire Atlantide.
Cependant, grâce au travail acharné d’une poignée d’archéologues, les pièces du puzzle commencent à s’assembler, révélant peu à peu les secrets de cette fascinante civilisation. Les fouilles menées depuis plusieurs années sur différents sites, notamment à Casas del Turuñuelo, La Mata et Cancho Roano, ont permis de mettre au jour des vestiges exceptionnels témoignant de la richesse et de l’ingéniosité des Tartessos.
Parmi les découvertes les plus marquantes figurent cinq sculptures de visages, dont deux ornés de somptueuses boucles d’oreilles, mises au jour l’an dernier à Casas del Turuñuelo. Ces figures humaines, les premières jamais trouvées en lien avec le monde tartessien, ont suscité un vif intérêt parmi les historiens. Leur état de conservation remarquable a permis aux chercheurs d’étudier en détail cet ancien sanctuaire, offrant ainsi un aperçu unique de la culture et des croyances de cette civilisation.
Les fouilles ont également révélé que les Tartessos maîtrisaient des techniques de construction élaborées. Leurs édifices, bâtis en pierre et en torchis, témoignent d’un savoir-faire architectural avancé pour l’époque. La prospérité de cette civilisation s’explique en grande partie par les ressources en métaux de la région, très prisées des Grecs et des Phéniciens avec lesquels ils commerçaient.


Le site de Cancho Roano, découvert par hasard en 1978, illustre parfaitement la richesse et la complexité de la culture tartessienne. Cet ensemble monumental de 500 mètres carrés, édifié au VIe siècle av. J.-C., abrite trois temples en pierre construits successivement sur les ruines du précédent, tous orientés vers le soleil levant. Ce sanctuaire avait une double fonction, à la fois religieuse et commerciale, comme en témoignent les nombreux objets précieux découverts entre ses murs : figurines en bronze, bijoux en or, plaques de marbre et pièces de céramique, parfois importées de Grèce.
L’une des particularités des sites tartessiens est leur état de conservation exceptionnel, dû à une pratique étrange: l’enfouissement volontaire des sanctuaires. Aux alentours de 400 avant J.-C., date à laquelle on situe la fin de cette civilisation, les Tartessos ont incendié leurs lieux de culte, sacrifié des animaux, puis recouvert l’ensemble d’une épaisse couche de terre. Un rite mystérieux qui a permis de sceller ces vestiges, les préservant ainsi des ravages du temps.
Malgré les avancées considérables réalisées ces dernières années, de nombreuses zones d’ombre subsistent quant à la disparition soudaine des Tartessos. Plusieurs hypothèses ont été avancées, comme de fortes sécheresses ou des inondations récurrentes qui auraient rendu les terres incultivables, poussant les habitants à l’exode. Cependant, en l’absence de sources écrites déchiffrables – les Tartessos possédaient une écriture basée sur l’alphabet phénicien, que personne n’a encore réussi à décrypter –, les historiens doivent se contenter de simples suppositions.
Le travail minutieux des archéologues a permis de lever le voile sur de nombreux aspects de la civilisation tartessienne, démontant au passage les mythes et théories farfelues qui l’entouraient. Toutefois, comme le souligne Sebastián Celestino, directeur des fouilles de Casas del Turuñuelo, «les connaissances progressent, mais il nous reste beaucoup à apprendre». Nul doute que les recherches à venir permettront de percer davantage les secrets de cette fascinante civilisation, la plus ancienne d’Europe occidentale, qui n’a pas fini de nous surprendre.
Avec AFP
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