Nucléaire iranien: face à l’impasse, l’AIEA réclame des garanties
©(Photo de ATTA KENARE / AFP)
Le chef de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), de retour d’Iran, a appelé la République islamique à fournir «des résultats concrets au plus vite», dénonçant une coopération réduite au minimum malgré les avancées de son programme nucléaire.

«La situation actuelle n’est absolument pas satisfaisante. Nous sommes quasiment dans une impasse (...) et cela doit changer», a déclaré Rafael Grossi, s’exprimant devant des journalistes à l’aéroport de Vienne. Il revenait d’une visite de deux jours en Iran où il a pu avoir des discussions «importantes» avec les autorités iraniennes, qui se sont dites «prêtes à mettre en œuvre des mesures tangibles» après plus d’un an de dégradation des relations.

Un peu plus tôt, le directeur général de l’instance onusienne avait insisté sur la nécessité de «régler les différends» sur le dossier nucléaire à un moment où le Moyen-Orient vit «des temps difficiles», notamment avec la guerre entre Israël et le mouvement palestinien Hamas, soutenu par Téhéran, dans la bande de Gaza.

«Parfois, le contexte politique met des obstacles à une coopération à part entière», avait-il souligné à l’occasion d’une conférence sur le nucléaire à Ispahan, dans le centre de l’Iran.
«Pas de baguette magique»

Depuis sa précédente visite en mars 2023, les relations se sont détériorées entre Téhéran et l’AIEA, dont le siège est à Vienne et qui est chargée de vérifier le caractère pacifique du programme nucléaire iranien.

Les inspections des sites iraniens ont été fortement réduites, des caméras de surveillance ont été débranchées et l’accréditation d’un groupe d’experts a été retirée.

M. Grossi avait regretté en février que l’Iran ait restreint «d’une manière sans précédent» sa coopération et dénoncé une «prise en otage».

«On doit aller de l’avant», a-t-il insisté mardi, espérant des progrès d’ici à la prochaine réunion du Conseil des gouverneurs de l’AIEA, prévue pour juin dans la capitale autrichienne.

Il n’a pas voulu donner de détails sur le contenu des discussions, portant sur «un ensemble très, très complexe de questions» qu’on ne peut régler «d’un coup de baguette magique».


Les tensions au Moyen-Orient renforcent les craintes de la communauté internationale, l’Iran disposant de suffisamment de matière pour se doter de plusieurs bombes atomiques, selon des experts.

Il enrichit en outre l’uranium au niveau de 60%, un seuil proche des 90% nécessaires pour fabriquer une arme nucléaire et bien au-delà du plafond autorisé de 3,67% - équivalant à ce qui est utilisé pour la production d’électricité.
«Actions hostiles»

L’Iran, qui nie avoir de telles intentions, s’est progressivement affranchi des engagements pris dans le cadre de l’accord international de 2015 encadrant ses activités nucléaires en échange d’une levée des sanctions internationales. Ce pacte, connu sous l’acronyme de JCPOA, avait volé en éclats après le retrait unilatéral des États-Unis décidé en 2018 par le président Donald Trump.

«Nous avons le droit légal de réduire nos engagements lorsque les autres parties ne respectent pas leurs obligations», s’est défendu le chef de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (OIEA), Mohammad Eslami. Il a toutefois affiché la volonté de son pays de renforcer sa collaboration avec l’AIEA dans le cadre du TNP (Traité de non-prolifération des armes nucléaires de l’ONU), qui est «au premier plan des politiques» de Téhéran.

Il a par ailleurs dénoncé «les actions hostiles contre le programme nucléaire de la République islamique», mettant en cause Israël, l’ennemi juré de l’Iran.

En réponse, M. Grossi a affirmé que les relations entre l’AIEA et Téhéran n’étaient pas influencées par «des parties extérieures». Le chef de l’agence atomique avait dit son inquiétude après une attaque le 19 avril dans le centre de l’Iran attribuée à Israël en représailles à des tirs iraniens contre Israël le week-end précédent.

Les sites nucléaires de l’Iran connus sont en particulier situés dans le centre de son territoire, à Ispahan, Natanz ou Fordo, ainsi que dans la ville portuaire de Bouchehr, où est implantée son unique centrale nucléaire. Un parc que les Iraniens souhaitent développer pour faire face à la hausse de la demande en électricité.

Anne Beade, avec Ramin Khanizadeh à Ispahan, avec AFP
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