Le centre-ville de Beyrouth assiégé: pourquoi les barrières en béton sont-elles toujours là?

Se promener dans le centre-ville désert de Beyrouth est une expérience surréaliste. Cette ville, autrefois pleine de vie, est désormais assiégée de toutes parts et ressemble à une prison.
Pourtant, le centre-ville de Beyrouth renaît. De nouvelles boutiques, cafés et hôtels émergent, bravant toutes les difficultés, surtout que le risque d’une guerre imminente entre le Hezbollah et Israël est en hausse. Certains estiment que là réside l’essence même du Liban: cette résilience est perçue comme une caractéristique profondément libanaise.
Depuis 2006, le centre-ville de Beyrouth a été le théâtre de plusieurs événements significatifs: les sit-in prolongés du Hezbollah et de ses alliés en 2006, les manifestations antigouvernementales de 2019, la crise économique la plus grave depuis le dix-neuvième siècle, la pandémie de Covid-19 et l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth en 2020.
Lors des manifestations de 2019, d’énormes barrières en béton ont été érigées autour du Parlement et de la place de l’Étoile, bloquant tous les accès. Cependant, cinq ans plus tard, pourquoi ces barrières sont-elles toujours là?
D’après des sources au sein des Forces de sécurité intérieure (FSI), contactées par Ici Beyrouth, la question relève de l’autorité législative. La décision de retirer les barrières doit être prise par la personne qui a initialement ordonné leur mise en place. Les sources ont ajouté: «Nous n’avons aucune information indiquant que ces barrières seront retirées.»
Interrogées par Ici Beyrouth, des sources parlementaires ont précisé que la question ne relevait pas de leur compétence directe, mais plutôt de celle de la Sécurité de l’État. Elles ont affirmé ne pas être informées d’une intention immédiate de lever les barrières, soulignant qu’il s’agissait d’une question politique.
Une source sécuritaire a ajouté à Ici Beyrouth que les barrières relevaient de la responsabilité des FSI et ne devraient pas demeurer en place de manière permanente. «Elles peuvent être installées temporairement, si nécessaire, pour des raisons de sécurité majeures», a précisé la source.
Celle-ci a également expliqué que ces barrières avaient été mises en place pour assurer la sécurité et maintenir l’ordre public. Cette opération a été conduite par les FSI, avec l’approbation des autorités locales telles que le gouverneur ou le ministre de l’Intérieur.
En réponse à une question sur l’éventuelle levée des barrières, la source sécuritaire a indiqué que si les propriétaires des magasins soumettent une demande, celle-ci sera prise en considération et les barrières seront certainement levées.
Les anciens locataires
«C’est comme s’ils voulaient que le cœur de Beyrouth s’arrête de battre», a déclaré un ancien locataire du centre-ville de Beyrouth à Ici Beyrouth. Il a décrit les bâtiments assiégés comme «délabrés» et «tristes à voir».
«Même si nous voulons louer des bureaux, nous en sommes incapables. Demander à nos clients de faire des détours impossibles pour leurs réunions est un véritable tracas, été comme hiver», a-t-il ajouté.

Il a qualifié d’«absurdes» les mesures prises par le gouvernement, affirmant que les bâtiments, les magasins, les restaurants et les bureaux sont abandonnés. Il a remis en question la nécessité des barrières pour une prétendue «sécurité du Parlement».
«Pourquoi ne déplacerait-on pas le Parlement ou ses séances ailleurs et ne rouvrirait-on pas toutes les routes?», a-t-il conclu.
Est-ce un mystère?
Pour sa part, Le député Waddah Sadek, a déclaré à Ici Beyrouth que la zone autour du Parlement était fermée en raison des événements en cours dans les environs.«Malgré l’élection d’un nouveau Parlement et l’absence actuelle de troubles sur le terrain, je doute que ce soit la véritable raison de ces barrières», a-t-il souligné.
Après son élection, M. Sadek a soulevé cette question. En réponse, Chef du parlement, Nabih Berry, lui a partiellement donné raison en ordonnant la destruction d’une partie du mur communément appelé «le mur de la honte». Malgré cela, M. Sadek a souligné que la zone demeure fermée, empêchant ainsi la libre circulation des personnes.
«Il semble qu’il y ait une volonté délibérée d’étouffer la vie dans la capitale. Nous avons proposé de nombreuses solutions avec les commerçants et les hommes d’affaires de Beyrouth», a-t-il déclaré, avant d’ajouter: «Ces individus ne veulent pas que notre pays prospère; c’est leur objectif.»
M. Sadek a souligné que le centre-ville était autrefois très dynamique, mais depuis son assiègement, de nombreuses personnes ont perdu leur gagne-pain et leur emploi. «Chaque fois qu’ils promettent de libérer cet espace, ils font marche arrière. Nous faisons pression, mais il semble qu’ils ne veuillent pas prendre en considération les aspirations des gens. C’est un mystère que nous n’arrivons pas à résoudre», a-t-il conclu.
Les plus grands magasins sont de retour
Depuis 2006, la zone centrale de la ville est devenue une zone déserte en raison de l’instabilité politique prolongée et des mesures de sécurité. Les manifestations durant cette période ont coûté environ 70 millions de dollars par jour à l’économie libanaise, pour un total de 560 millions de dollars. Les entreprises à Beyrouth ont été gravement affectées, ce qui a entraîné la fermeture de nombreuses d’entre elles. Le secteur du tourisme a également souffert. Cependant, 144 marques feront leur retour aux Souks de Beyrouth d’ici novembre 2024.

La boutique «Mouftah el-Chark» ouvre une succursale aux Souks de Beyrouth (un important centre commercial dans le centre de Beyrouth, près du Parlement).
Interrogée sur ce qui les a encouragés à ouvrir malgré toutes les crises et les restrictions en cours dans la capitale, la directrice Zeina Nassif a déclaré à Ici Beyrouth qu’une des plus grandes entreprises de vente au détail ouvrait ses portes, ce qui les a incités à faire de même. «À l’approche du Nouvel An, les Souks de Beyrouth retrouveront leur dynamisme d’antan», a-t-elle ajouté avec joie.
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