«Zyara» ou portraits d’âmes: battement au cœur de Beyrouth

 
Dans le cadre de la 4e édition du festival Anbar wa Godot pour la culture et les arts, la projection d’épisodes de Zyara, le web-documentaire, a eu lieu le 25 juillet 2024 à Beit el-Fan, la maison d’Adham Dimashki à Beyrouth. Le festival se poursuit jusqu’au 19 septembre 2024.
Muriel Aboulrouss, réalisatrice et directrice de photographie, et Denise Jabbour, également productrice créative à l’association Home of Cine-Jam, joignent leurs efforts, amour et talent pour créer Zyara, la web-série documentaire. En dressant de courts portraits de personnes différentes, selon les saisons, elles misent sur l’essence de l’humain et l’essentiel du souvenir. La 8e saison de Zyara met en lumière des artistes et capte leurs témoignages poignants sur Beyrouth, la ville qui les habite au fil du temps: Georgette Gebara, Roger Assaf, Hanane Hajj Ali, Randa Asmar, Rifaat Tarabay, Randa Kaadi, Fayek Hmaïssi, Ziad el-Ahmadié, Takla Chamoun, Mireille Maalouf, Harout Fazlian, Omaima el-Khalil et Nicolas Daniel, tous des noms connus dans le monde des arts scéniques.
La séance de projection a eu lieu dans le salon de Beit el-Fan, la maison d’Adham Dimashki, accueillant à portes grandes ouvertes les amoureux du cinéma et de l’art.

Ce qui interpelle le spectateur dans ces portraits d’artistes va plus loin que leur personne. On les regarde, les reconnaissant au fur et à mesure des gros plans de la caméra de Muriel Aboulrouss et de la lumière accompagnant leurs témoignages, mais aussi parfois au son de leur voix ou au bruit poignant que font leurs souvenirs. La mémoire collective des personnes de leur génération reconnaît Beyrouth, ville des années 60 et 70 aux théâtres bondés, puis le silence des rues désertes et désertées. La cause? La guerre, reine de toute une génération... De cette mémoire criante, ces instants captés dans le temps reviennent sur grand écran, s’imposant dans l’insouciance ou le manque de connaissance des plus jeunes, comme des éclats de verre ou un morceau de fer chaud.
Au-delà de l’identité de ces artistes mêmes, on fait la connaissance des êtres humains qu’ils sont. Leurs témoignages crèvent les projecteurs et la lumière du jour. Ils partagent leur expérience de personnes blessées à jamais par une guerre meurtrière, ravageuse. Dans leurs souvenirs, au fond des coulisses, on effleure les années de gloire d’une ville mère, puis le revers de la médaille: la destruction, la violence, la mort.
Et pourtant, ces histoires ne se clôturent pas avec le dernier clap. Elles racontent des saignements sans fin mais aussi une envie de vivre farouchement, obstinément, à bras ouverts. Faire théâtre de la violence, chanter la perte, danser la souffrance et, malgré tout, rester. S’accrocher à un pays, le Liban. Se laisser bercer par l’énergie d’une ville, Beyrouth. Zyara se révèle encore une fois un message puissant d’amour et d’humanité, mais aussi de résilience, ce mot qui peut prêter à confusion mais qui redonne la force et le courage de rester et de (se) rebâtir une vie, parce que nul autre port n’équivaut à la mère patrie.
Questions à Muriel Aboulrouss et Denise Jabbour
Comment et pourquoi avez-vous choisi Beyrouth comme thème?
Le thème de Beyrouth a été inspiré par le fonds Beryt et notre amour pour cette ville. Le fonds a été créé pour soutenir l’art et la culture à Beyrouth, et nous avons choisi d’honorer ce thème en valorisant et en honorant Beyrouth à travers les yeux de douze grands artistes.

Saviez-vous que vous alliez traiter des sous-thèmes de la guerre et de l’exil?
Oui, bien sûr. Nous voulons honorer nos blessures avec l’espoir que cela apportera ou inspirera une guérison collective.
Comment avez-vous sélectionné les artistes pour cette saison?
Nous avons dressé une liste de nombreux beaux artistes et les douze artistes qui ont accepté notre demande de leur rendre visite sont ceux que nous avons présentés.
Qu’est-ce qui, selon vous, fait de Zyara un voyage en perpétuel mouvement?
Zyara existe probablement à cause du chaos, en réponse à la mort et à la violence, à la perte et au chagrin. C’est notre façon d’aimer le monde.
Qu’apporte chacune de vous au projet?
Denise Jabbour est l’initiatrice du projet en raison de son besoin de se connecter avec les autres et d’écouter leurs histoires. Elle est l’intervieweuse et les oreilles qui écoutent avec le cœur, avec amour et compassion. Elle est aussi la productrice et la cocréatrice du contenu de Zyara. Muriel est l’artiste visuelle qui a intuitivement créé le langage de Zyara. Elle est celle qui filme et réalise ces portraits macro hypnotiques.
Qu’est-ce que vous chérissez particulièrement dans ce voyage en mouvement?
Nous chérissons la confiance que les gens nous accordent et l’opportunité que Zyara nous a donnée de rencontrer des héros inspirants, de grandir en nous-mêmes, de trouver un but où l’art et la vie se rejoignent magnifiquement. Zyara nous a emmenées dans un voyage que nous n’avions jamais planifié, ce qui en fait une expérience très spirituelle pour nous deux.
 
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