Vol de Vega: l'Europe part retrouver son autonomie spatiale
©(ARCHIVES) Cette photographie montre le décollage de la fusée Ariane 6 de l'Agence spatiale européenne (ESA) depuis son pas de tir, au Centre spatial guyanais de Kourou, en Guyane française, le 9 juillet 2024. (Photo Jody Amiet / AFP)
Deux mois après le vol inaugural de la fusée Ariane 6, l'Europe devra confirmer son retour à la souveraineté spatiale avec le lancement le 3 septembre de la petite fusée Vega qui enverra dans l'espace un satellite du programme européen Copernicus.

Décollage prévu depuis le port spatial de Kourou, en Guyane française, le 3 septembre à 22h50, heure locale (01h50 GMT le 4 septembre): ce sera la dernière mission du lanceur italien Vega de la firme Avio, en service depuis 2012, avant le passage de relais à Vega C, une version améliorée et plus puissante, clouée au sol depuis 2022 après un accident.

Ce vol "est la deuxième partie de la restauration de l'autonomie spatiale et l'autonomie stratégique européenne", commente pour l'AFP Philippe Baptiste, président du Centre national d'études spatiales (CNES).

Cette mission, appelée VV24, placera son passager, le satellite Sentinel-2C du programme de l'Union européenne Copernicus, en orbite héliosynchrone à environ 780 km d’altitude. Sa mise en orbite interviendra 57 minutes après le décollage.

Faisant partie du programme spatial d’observation de la Terre, le domaine où l'Europe excelle, le satellite Sentinel-2C soutiendra un large éventail d’applications opérationnelles, dont l’agriculture, la surveillance de la qualité de l’eau, la gestion des catastrophes naturelles comme les feux de forêt, les séismes ou les inondations ainsi que la détection des émissions de méthane.

La mission va honorer "l’engagement d’Arianespace de garantir à l’Europe un accès indépendant à l’espace", souligne dans un communiqué le groupe français Arianespace qui gère le lancement.

Depuis le dernier vol d'Ariane 5 en juillet 2023, les Européens ne pouvaient plus mettre en orbite par eux-mêmes un satellite.

Pression sur Vega C


Le succès début juillet du premier vol d'Ariane 6, dont la mise au point a eu quatre ans de retard, a donné des ailes aux Européens, marquant la fin de l'année "noire" au cours de laquelle le Vieux Continent a été privé d'accès à l'espace.

La reprise des vols de leurs lanceurs est d'autant plus stratégique pour les Européens qu'ils ont du mal à exister face au géant américain SpaceX qui lance ses fusées réutilisables Falcon 9 environ deux fois par semaine.


Un optimisme prudent est de mise concernant Vega C, dont le premier vol commercial en décembre 2022 s'est soldé par un échec, causant la perte de deux satellites d'Airbus, alors que l'Europe était déjà privée de Soyouz après l'invasion russe de l'Ukraine et en attendant Ariane 6.

"Je suis confiant. On sera prêt à partir de fin novembre à lancer Vega C", a déclaré à l'AFP Toni Tolker-Nielsen, directeur du transport spatial de l'Agence spatiale européenne (ESA) en ajoutant que le design du moteur, à l'origine de plusieurs anomalies, avait été "complètement revu" et les derniers tests concluants.

"Il y a beaucoup de pression sur Vega C, mais il n'y a aucune raison que cela ne se passe pas bien", a-t-il assuré.

Selon lui, l'ESA prépare désormais un deuxième vol d'Ariane 6 en décembre ainsi que six lancements d'Ariane 6 et quatre de Vega C en 2025.

"On est sorti d'une crise technique et politique de lanceur", estime Pierre Lionnet, directeur de recherche à Eurospace, qui rassemble les industriels européens de l’espace, interrogé par l'AFP.

"En revanche, la grosse interrogation, c'est de savoir qui va acheter suffisamment de lancements pour que l'opérateur et les industriels puissent fournir les services à un tarif acceptable pour les clients et qui permettrait à l'ensemble de la chaîne industrielle de faire des profits", ajoute-t-il.

De toutes les puissances mondiales, l'Europe est "le plus petit client pour les besoins de lancement" et doit trouver sa place sur un marché "qui s'est radicalement modifié", conclut-il.

Pour Toni Tolker-Nielsen de l'ESA, il faudra au moins "une dizaine d'années" à l'Europe pour devenir compétitive dans ce domaine face aux États-Unis.

Olga Nedbaeva, avec AFP
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