Réhabilitation du réseau routier libanais: un projet (trop) ambitieux?

La réhabilitation des routes au Liban fait l’objet d’un ambitieux programme initié par le ministère des Travaux publics, notamment depuis le mois de juin 2023. Un tronçon de plusieurs centaines de kilomètres est actuellement en phase de restauration, avec plus d’une centaine de projets qui couvrent toute la superficie du territoire. «Aucune région n’a été épargnée par ce processus de restauration des infrastructures routières», a-t-on indiqué à Ici Beyrouth (IB) de source ministérielle. «Les travaux vont bon train», poursuit-on de même source, avant d’ajouter que «toutes les démarches ont été entreprises dans la plus grande légalité et la plus grande transparence».
Une assertion qu’a pu partiellement confirmer à IB le directeur des adjudications, Jean Ellieh, puisque «les dossiers d’appel d’offres relatifs à ce sujet n’ont pas encore été examinés dans leur totalité et que les autorités de régulation concernées n’ont pas encore émis d’avis juridique à cet égard». Il n’en demeure pas moins que la «direction des adjudications est régulièrement tenue au courant de ces projets clairement élaborés», a précisé M. Ellieh.
Réseau routier et financement
Divisé en plusieurs catégories, le réseau routier comprend les routes internationales, les routes principales, les routes secondaires, les routes locales et les routes intérieures. Ce sont les quatre premières catégories (à l’exception donc des routes intérieures, qui sont du ressort des municipalités) qui font l’objet du programme du ministère des Travaux publics. Ces projets incluent non seulement la réparation des routes endommagées, mais également la modernisation des ponts, la mise à niveau des réseaux de drainage pour prévenir les inondations et l’amélioration de la signalisation routière pour renforcer la sécurité des usagers.

Dans un contexte de crise économique profonde, le ministère des Travaux publics a trouvé le moyen de financer son projet d’envergure. Se base-t-il uniquement sur la somme de 61 millions de dollars qui lui ont été alloués en vertu du budget 2024? Difficile de se prononcer sur ce sujet, lorsque l’on sait que le montant nécessaire pour l’entretien et l’assurance de la sécurité publique ainsi que les besoins du ministère s’élèvent à 248 millions de dollars, selon des chiffres avancés par le président de la commission parlementaire des Finances et du Budget, Ibrahim Kanaan. Difficile aussi si on prend en considération le fait que le ministre sortant des Travaux publics, Ali Hamiyé, lui-même se plaignait de ces sommes jugées «insuffisantes» sur son compte X, au lendemain de l’adoption par le Parlement du budget 2024. Il y explique, en janvier 2024, que selon une «étude élaborée en 2019, la réhabilitation de la route de Dahr el-Baïdar coûterait, à elle seule, 20 millions de dollars et que les quelque 60 millions de dollars accordés par le gouvernement pour l’entretien des routes ne représentent pas 20% des besoins en la matière».
Selon certaines sources proches du dossier, des moyens alternatifs permettent donc de financer ces projets. Plusieurs initiatives auraient été menées, dans ce sens, pour attirer des fonds internationaux, notamment de la part d’organisations (comme la Banque mondiale) et d’agences de développement. Le gouvernement aurait également cherché à nouer des partenariats avec le secteur privé pour permettre une mise en œuvre rapide des projets. On rappelle à cet égard qu’en 2017, et selon un rapport publié sur son site, la Banque mondiale a débloqué 200 millions de dollars dans le but de «moderniser le réseau routier libanais», estimant que celui-ci était «dangereux pour la sécurité publique et freinait le développement urbain et rural ainsi que la croissance économique équitable». Ces fonds devaient servir à restaurer environ 500 km de routes dans le cadre de la première phase d’un plan gouvernemental plus vaste visant à réhabiliter le réseau routier du pays. Interrogée au sujet des chiffres et du financement, la source au sein du ministère a refusé de se prononcer sur cette question.
Le succès de cette initiative dépend de la mobilisation des ressources nécessaires et du maintien de la stabilité politique et sécuritaire. Or, les classements mondiaux comme celui établi en janvier 2024 par Global Positioning Specialists (GPS) continuent de placer le Liban en tête de liste des «pays les plus dangereux pour les automobilistes».
 
Commentaires
  • Aucun commentaire