Il fut un temps, notamment dans les années 70 et 80, où Chypre proposait un «havre de paix» aux Libanais fuyant les affres de la guerre. Il suffisait d’arriver à Chypre, Larnaca en l’occurrence, pour obtenir un visa et, de ce fait, jouir des «petits bonheurs» de l’île.
La guerre israélienne gagnant de plus en plus d’envergure sur le territoire libanais ressuscite les peurs d’antan et incite les Libanais à plier bagage et quitter le pays. Certains choisissent, encore une fois, Chypre comme destination. Déjà, bien avant l'escalade des tensions, les Libanais avait une autre raison de fuir: l’effondrement économique du pays. Des centaines ont tenté de faire la traversée maritime entre Tripoli, au nord du Liban, et Chypre. Leur sort était scellé d'avance: mourir noyés en mer ou être renvoyés d’office par les autorités chypriotes.
Les nantis recevront-ils un meilleur accueil?
Alternatives et restrictions
Depuis 2019, les crises au Liban compliquent l'entrée en Europe, même avec un visa touristique valide. Dans ce contexte de restrictions accrues, peut-on envisager des alternatives, comme les trajets en yacht, et quelles sont les restrictions spécifiques pour les titulaires de visa touristique en cas de conflit?
Avec la montée des tensions au Liban, les voyageurs étrangers se bousculent à l'aéroport pour obtenir un billet. En raison des nombreuses annulations et reports, une option existe: les yachts touristiques privés en partance de la Marina de Dbayé, à destination d'Ayia Napa, à Chypre.
Le capitaine Élias Khawand, propriétaire de yachts habituellement utilisés pour des croisières vers Chypre, a récemment commencé à accueillir des voyageurs pressés de quitter le Liban. Cependant, cette option reste inaccessible pour de nombreux Libanais. Selon M. Khawand, «malgré les relations historiques entre le Liban et l'île voisine, depuis le début de la guerre civile jusqu'à aujourd'hui, un visa reste indispensable pour entrer à Chypre. Les personnes sans visa seront immédiatement renvoyées à leur arrivée sur l'île par les agents de sécurité aux frontières».
Chypre a historiquement été un refuge pour les Libanais pendant les périodes de conflit. Ils se rendaient sur l'île par bateau ou avion pour échapper aux tensions et y rester jusqu'à la fin de la guerre, avec pour seule exigence un passeport valable. De plus, certains profitaient de leur séjour pour solliciter un visa d'immigration auprès des ambassades présentes à Chypre, afin de poursuivre leur voyage vers d'autres destinations. Mais la différence réside maintenant dans les conditions d'entrée.
«Avant que Chypre ne devienne membre de l'UE, les Libanais pouvaient obtenir un visa à l'arrivée, précise M. Khawand. Aujourd'hui, les contrôles aux frontières exigent un visa préalable délivré par l'ambassade chypriote ou un visa Schengen pour pouvoir entrer.» Dans ce contexte, M. Khawand décrit l'expérience de personnes ayant tenté de séjourner quelques jours à Chypre sans visa. Il précise que «les individus arrivant sur les côtes chypriotes sans visa, résidence ou permis ne peuvent pas passer les contrôles de sécurité des navires. Ils sont immédiatement renvoyés dans leur pays d'origine ou doivent rester à bord du bateau sous la surveillance des gardes-frontières jusqu'au départ du bateau le lendemain.»
Renforcement des contrôles à l'entrée en Europe
Les aéroports européens sont devenus de plus en plus stricts quant à l'entrée des Libanais dans un pays de l'Union européenne (UE), en raison des flux migratoires et des séjours prolongés. Bien que les agents de frontière aient toujours exigé un billet de retour, une confirmation d'hébergement et une assurance, ces exigences sont désormais appliquées avec une plus grande rigueur, même lorsque le passeport et le visa sont en règle.
Mesures de contrôle identiques par voie maritime ou aérienne
Actuellement, avec la situation stable de l'aéroport de Beyrouth, l'entrée par voie maritime est équivalente à celle par voie aérienne et ne nécessite pas de documents ou justificatifs supplémentaires.
Selon une source de l'ambassade de Chypre au Liban interrogée par Ici Beyrouth, «les mesures de sécurité appliquées aux frontières, à l'arrivée des voyageurs aux aéroports internationaux de Paphos et de Larnaca, sont également appliquées par les autorités maritimes». Cela inclut les contrôles et vérifications des passeports, ainsi que les inspections des bagages pour les arrivées par bateau, affirme-t-on de même source.
Malgré les conflits actuels, toute personne munie d'un visa délivré par l'ambassade a le droit d'entrer à Chypre, que ce soit par la mer ou par avion, selon l’ambassade chypriote. «Il est toutefois crucial de respecter les conditions du visa, notamment la durée du séjour, et d'éviter tout dépassement sans procédure légale appropriée, ajoute-t-on de même source. En période de conflit, il est essentiel de se conformer aux directives des autorités migratoires européennes et chypriotes.
Défis d’accès à Chypre
Ces problèmes ne touchent pas seulement ceux qui cherchent à fuir la guerre. Même les personnes possédant des biens à Chypre rencontrent des difficultés avec leur passeport libanais pour ouvrir des comptes bancaires, obtenir une résidence permanente ou transférer de l’argent entre les deux pays. Andreas, un agent immobilier à Chypre, explique: «Autrefois, acheter une maison à Chypre était plus facile. Cela reste possible, mais les procédures et les justificatifs de fonds sont devenus plus compliqués pour les ressortissants de pays tiers. C’est également vrai pour l’ouverture de comptes bancaires, surtout après l’effondrement des banques au Liban.»
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