©Crédit photo : Thomas Samson/POOLAFP SAMSONPOOLAFP
Michel Blanc, figure emblématique du cinéma français et membre de la légendaire troupe du Splendid, s’est éteint à l’âge de 72 ans. Acteur polymorphe et réalisateur talentueux, il laisse derrière lui une carrière prolifique et des rôles inoubliables.
Michel Blanc, acteur et réalisateur prolifique, nous a quittés à l’âge de 72 ans. Celui qui avait rencontré la troupe du Splendid sur les bancs du lycée Pasteur de Neuilly-sur-Seine dans les années 70, avant de devenir l’un des piliers du café-théâtre de la bande, a succombé à un malaise cardiaque survenu le 3 octobre, a annoncé son attaché de presse vendredi.
Dès ses débuts, Michel Blanc se spécialise dans les rôles de losers attachants et un peu collants. On le retrouve ainsi dans des comédies populaires comme Viens chez moi, j’habite chez une copine (1981) ou Ma femme s’appelle reviens (1981). Mais c’est avec le personnage de Jean-Claude Dusse, dragueur maladroit et désespéré des Bronzés (1978) et Les Bronzés font du ski (1979), qu’il accède à une notoriété sans précédent. Ces deux films réalisés par Patrice Leconte, adaptations des succès de café-théâtre du Splendid, deviennent très vite cultes. Les répliques de Dusse, inspiré des antihéros de Woody Allen selon Blanc, resteront à jamais gravées dans la mémoire collective, de «Oublie que tu n’as aucune chance, vas-y, fonce!» à «Éventuellement, si vous étiez au bout du rouleau, on pourrait envisager de conclure?»
Mais l’acteur, malgré un retour de la joyeuse bande trente ans plus tard dans Les Bronzés 3 qui réunit plus de 10 millions de spectateurs, admet lui-même qu’il n’a pas fait «de mieux». C’est que depuis le milieu des années 80, lassé par l’image de loser sympathique, Michel Blanc a pris son envol en révélant l’étendue de son talent.
En 1984, il passe pour la première fois derrière la caméra avec Marche à l’ombre, comédie décalée et corrosive sur deux copains SDF rêvant de gloire musicale, qu’il voit comme un pied-de-nez aux comédies bourgeoises de l’époque. Énorme succès populaire avec 6 millions d’entrées, le film devient culte mais marque paradoxalement pour Blanc «la fin d’un cycle». Il faudra attendre dix ans et Grosse Fatigue (1994), comédie absurde et noire sur le monde du cinéma pour laquelle il décroche le prix du scénario à Cannes, pour le revoir réaliser. Suivront Mauvaise Passe (1999), Embrassez qui vous voudrez (2002) et Voyez comme on danse (2018).
C’est avec Tenue de soirée de Bertrand Blier en 1986 que Michel Blanc opère un véritable tournant en surprenant son public. Dans ce drame, il incarne un homme quittant sa femme pour vivre une passion avec le personnage de Gérard Depardieu, jusqu’à sombrer dans la prostitution travestie. Un rôle à contre-emploi total qui lui vaut le prix d’interprétation à Cannes. Trois ans plus tard, il confirme son talent dramatique dans Monsieur Hire de Patrice Leconte, adaptation d’un roman de Simenon où il incarne avec brio un voyeur taciturne injustement accusé de meurtre.
Au fil des décennies, Michel Blanc trace son sillon singulier, alternant seconds rôles truculents chez Luc Besson (Les Fugitifs), Bertrand Blier (Merci la vie), Peter Greenaway (Prospero’s Books), Robert Altman ( Prêt-à-porter) ou dans des comédies populaires, et compositions poignantes chez André Téchiné ( J’embrasse pas, Les Témoins) et dans des drames sociaux (Je vous trouve très beau, L’Exercice de l’État). Ce dernier rôle de vieux briscard de la politique, pour lequel il décroche en 2012 le César du meilleur acteur dans un second rôle après quatre nominations, achève de le consacrer comme un immense acteur à la palette infinie.
Devant comme derrière la caméra, naviguant avec une maestria folle de la comédie au drame en passant par l’absurde, le burlesque et le romantisme, Michel Blanc laisse derrière lui l’héritage d’un artiste complet et audacieux ayant marqué des générations de son talent protéiforme. Inoubliable Dusse, tendre Monsieur Hire, poignant Bernard dans l’ombre du pouvoir, Michel Blanc a accompli ce que peu d’acteurs parviennent à faire: transcender tous les registres pour toucher, film après film, l’universel.
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