©Le président hongrois Viktor Orban après la victoire de son parti aux élections législatives, le 6 avril 2022. (AFP)
Après un rare moment d'unanimité, les Européens ont repris leurs vieilles habitudes de division et semblent incapables de présenter un front uni face à la Russie. Alors que l'Allemagne s'oppose à toute interruption d'achat d'hydrocarbures russes, le président Viktor Orban est taxé de "pro-russe". De son côté, Emmanuel Macron a été attaqué par le Premier ministre polonais pour ses contacts réguliers avec Vladimir Poutine, ce qui a créé un froid entre Paris et Varsovie. La guerre se prolonge, les sanctions ne portent pas leurs fruits, et les pays européens restent divisés quant à la posture à adopter.
L'Allemagne taxée d'égoïsme, Emmanuel Macron accusé de négocier avec un "criminel" et le prorusse Viktor Orban réélu en Hongrie : après une rare unité au début de l'offensive russe en Ukraine, les Européens renouent avec les vieux démons de la division alors que le conflit s'installe dans la durée.
"Jusqu'à maintenant, l'Europe a donné une démonstration d'unité extraordinaire. À présent, on entre dans une période de décisions difficiles", résume le député européen de centre-gauche et ancien Premier ministre italien Enrico Letta.
L'enjeu est à la fois simple et crucial : faut-il cesser d'acheter du gaz et du pétrole à la Russie, qui financent directement son effort de guerre en Ukraine, mais dont nombre de pays européens restent dépendants, de l'Allemagne à la Slovaquie?
Depuis le début de l'offensive russe le 24 février, à chaque nouvelle escalade, atrocité, les Européens empilent les sanctions contre l'élite et l'économie russes, faisant le pari que le prix à payer sera bientôt trop élevé pour Vladimir Poutine pour qu'il continue la guerre. Les pays de l'UE ont déjà gelé au moins 29,5 milliards d'euros d'avoirs russes et biélorusses (des soldats russes opèrent en Ukraine depuis le Bélarus voisin). Ils ont approuvé jeudi un embargo sur le charbon russe et la fermeture des ports européens aux navires russes.
"Les sanctions prises sont très lourdes, mais elles ont besoin de temps pour donner des résultats", concède Enrico Letta, interrogé par l'AFP.
Dans les semaines qui ont précédé la guerre, États-Unis, Royaume-Uni et Union européenne se sont soigneusement concertés sur une série de lourdes sanctions, en espérant qu'elles dissuaderaient Vladimir Poutine d'intervenir.
"Ce travail-là a permis de réagir rapidement après le 24 février. Mais il a atteint ses limites. La question de la finalité des sanctions se pose", relève Martin Quencez, directeur adjoint de l'institut américain German Marshall Fund à Paris.
Le débat se cristallise désormais sur "l'enjeu énergétique et la temporalité des sanctions", dit-il à l'AFP, alors que l'embargo sur le charbon russe n'entrera en vigueur que début août, 120 jours après la publication du nouveau paquet de sanctions au journal officiel de l'UE.
La Pologne et les pays baltes poussent pour des mesures plus sévères et rapides sur le gaz et le pétrole. Les pays les plus dépendants, Allemagne en tête, demandent du temps pour trouver des alternatives aux hydrocarbures russes, suscitant impatience et incompréhension. "Berlin détient la clé pour accroître la pression sur Poutine. Mais (le chancelier Olaf) Scholz reste sourd, semble croire qu'il peut y échapper. Sa réputation en souffre énormément", estime le politologue allemand Ulrich Speck sur Twitter.
La Hongrie du souverainiste Viktor Orban a aussi ajouté sa petite musique aux dissensions ambiantes en se disant prête à payer le gaz russe en roubles, à rebours des autres pays de l'UE. Vladimir Poutine menace de couper l'approvisionnement des pays qui ne passeraient pas au paiement en roubles, en riposte au gel de 300 milliards de dollars de réserves russes en devises. "Avec la victoire dimanche d'Orban, il y aura toujours un "Monsieur non" à l'intérieur de l'UE. La Hongrie est un petit pays, mais sa capacité de nuisance est importante sur les sujets sur lesquels il faut un vote à l'unanimité", souligne Enrico Letta.
Autre pomme de discorde européenne, la Pologne reproche au président français Emmanuel Macron d'avoir continué à dialoguer avec le maître du Kremlin après le début de la guerre. "Personne n'a négocié avec Hitler", a lancé le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki, s'attirant une réponse cinglante de l'intéressé qui l'a accusé d'être "un antisémite d'extrême droite", conduisant à son tour à une convocation de l'ambassadeur de France à Varsovie.
Pour Martin Quencez, ces propos ont avant tout des "objectifs de politique intérieure". In fine, "il y a une pression énorme sur les Européens, notamment Varsovie, Berlin et Paris, pour qu'ils continuent à travailler de concert sur le sujet ukrainien", dit-il.
Avec AFP
L'Allemagne taxée d'égoïsme, Emmanuel Macron accusé de négocier avec un "criminel" et le prorusse Viktor Orban réélu en Hongrie : après une rare unité au début de l'offensive russe en Ukraine, les Européens renouent avec les vieux démons de la division alors que le conflit s'installe dans la durée.
"Jusqu'à maintenant, l'Europe a donné une démonstration d'unité extraordinaire. À présent, on entre dans une période de décisions difficiles", résume le député européen de centre-gauche et ancien Premier ministre italien Enrico Letta.
L'enjeu est à la fois simple et crucial : faut-il cesser d'acheter du gaz et du pétrole à la Russie, qui financent directement son effort de guerre en Ukraine, mais dont nombre de pays européens restent dépendants, de l'Allemagne à la Slovaquie?
Depuis le début de l'offensive russe le 24 février, à chaque nouvelle escalade, atrocité, les Européens empilent les sanctions contre l'élite et l'économie russes, faisant le pari que le prix à payer sera bientôt trop élevé pour Vladimir Poutine pour qu'il continue la guerre. Les pays de l'UE ont déjà gelé au moins 29,5 milliards d'euros d'avoirs russes et biélorusses (des soldats russes opèrent en Ukraine depuis le Bélarus voisin). Ils ont approuvé jeudi un embargo sur le charbon russe et la fermeture des ports européens aux navires russes.
"Les sanctions prises sont très lourdes, mais elles ont besoin de temps pour donner des résultats", concède Enrico Letta, interrogé par l'AFP.
La clé à Berlin ?
Dans les semaines qui ont précédé la guerre, États-Unis, Royaume-Uni et Union européenne se sont soigneusement concertés sur une série de lourdes sanctions, en espérant qu'elles dissuaderaient Vladimir Poutine d'intervenir.
"Ce travail-là a permis de réagir rapidement après le 24 février. Mais il a atteint ses limites. La question de la finalité des sanctions se pose", relève Martin Quencez, directeur adjoint de l'institut américain German Marshall Fund à Paris.
Le débat se cristallise désormais sur "l'enjeu énergétique et la temporalité des sanctions", dit-il à l'AFP, alors que l'embargo sur le charbon russe n'entrera en vigueur que début août, 120 jours après la publication du nouveau paquet de sanctions au journal officiel de l'UE.
La Pologne et les pays baltes poussent pour des mesures plus sévères et rapides sur le gaz et le pétrole. Les pays les plus dépendants, Allemagne en tête, demandent du temps pour trouver des alternatives aux hydrocarbures russes, suscitant impatience et incompréhension. "Berlin détient la clé pour accroître la pression sur Poutine. Mais (le chancelier Olaf) Scholz reste sourd, semble croire qu'il peut y échapper. Sa réputation en souffre énormément", estime le politologue allemand Ulrich Speck sur Twitter.
"Monsieur +non+"
La Hongrie du souverainiste Viktor Orban a aussi ajouté sa petite musique aux dissensions ambiantes en se disant prête à payer le gaz russe en roubles, à rebours des autres pays de l'UE. Vladimir Poutine menace de couper l'approvisionnement des pays qui ne passeraient pas au paiement en roubles, en riposte au gel de 300 milliards de dollars de réserves russes en devises. "Avec la victoire dimanche d'Orban, il y aura toujours un "Monsieur non" à l'intérieur de l'UE. La Hongrie est un petit pays, mais sa capacité de nuisance est importante sur les sujets sur lesquels il faut un vote à l'unanimité", souligne Enrico Letta.
Autre pomme de discorde européenne, la Pologne reproche au président français Emmanuel Macron d'avoir continué à dialoguer avec le maître du Kremlin après le début de la guerre. "Personne n'a négocié avec Hitler", a lancé le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki, s'attirant une réponse cinglante de l'intéressé qui l'a accusé d'être "un antisémite d'extrême droite", conduisant à son tour à une convocation de l'ambassadeur de France à Varsovie.
Pour Martin Quencez, ces propos ont avant tout des "objectifs de politique intérieure". In fine, "il y a une pression énorme sur les Européens, notamment Varsovie, Berlin et Paris, pour qu'ils continuent à travailler de concert sur le sujet ukrainien", dit-il.
Avec AFP
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