Le festival Écrans du Réel rend hommage à Etel Adnan avec la projection du documentaire Ismyrna, réalisé par Joana Hadjithomas et Khalil Joreige, lundi 11 avril à 20h30 au Beirut Art Center. La poétesse, essayiste et artiste visuelle libano-américaine récemment décédée y raconte l'histoire réelle et imaginée de sa famille aux côtés de Joana Hadjithomas, également originaire de Smyrne, de même que beaucoup de Libanais.
Dans votre film Ismyrna, vous abordez aux côtés d'Etel Adnan le thème de l'identité. Qu'avez-vous en commun?
Pendant des années, Etel et moi avons partagé une ville où nous n’étions jamais allées : Izmir, en Turquie, ancienne Smyrne. Après la chute de l’Empire ottoman, ma famille paternelle grecque en a été chassée par l'armée turque. La mère d’Etel, également Grecque native de Smyrne, a épousé un officier syrien de l’armée ottomane exilé au Liban après la chute de l’empire. Mais ils ont continué de vivre en partie dans cette ville à laquelle ils avaient été arrachés. Et à nous la raconter, sans fin. Ces histoires se sont transmises et nous ont nourris. Elles nous ont aussi profondément rapprochées toutes les deux. On a vécu comme ça dans une Smyrne imaginaire, confrontées à la transmission de l’histoire, à notre attachement aux objets, aux lieux, aux imaginaires privés d’images.
En quoi votre histoire personnelle et familiale est-elle représentative d'une identité collective ?
Dans le film, on évoque à travers les histoires de nos parents et grands-parents, l’Empire ottoman, dont on parle peu, mais aussi une certaine idée de la mobilité et du cosmopolitanisme : Ismyrna fait partie d’un projet artistique plus vaste intitulé I stared at Beauty so much, inspiré d’un vers de Constantin Cavafy, un des plus grands poètes grecs né à Alexandrie. Smyrne, Beyrouth, Alexandrie, c’était ce genre de ville où l’identité culturelle se posait différemment, où les communautés coexitaient. Et cette coexistence était précieuse. Nos expériences personnelles, le récit de l’ existence de nos parents, forment le prisme à travers lequel sont évoqués les changements intervenus après la fin de l'Empire ottoman, le déplacement des frontières, les concepts d’identité, d’appartenance et d’exil.
Pourquoi cette question de l'identité est importante?
Plus que d’identité, nous parlons de toutes les histoires liées à cette ville et qui nous ont profondément constituées et transformées. Comment s' en libérer tout en leur permettant de se transmettre? Parce qu’il n’y a pas de photos, d’images, ni de récits écrits. Juste la tradition orale. Le film raconte comment on pose nos valises, et choisit de vivre hors de la nostalgie, dans un "éternel présent", comme le dit si bien Etel. Elle dit de très belles choses dans le film sur la façon dont nous avons absorbé la tristesse de nos parents, de l’exil vécu par nos familles. Mais aussi comment nos imaginaires sont comme la pellicule d’un film photographique sur laquelle les souvenirs s’impriment. Ce film garde l’empreinte de ce qu’on nous a dit, comme une impression magnétique qui crée des formes poétiques imprimées à tout jamais en nous. C’est tout cela qui fait de nous ce que nous sommes. Je préfère parler d’imaginaire, plutôt que d'identité parce que justement, l’identité demande une constance, alors que nous évoluons sans cesse et transformons les récits, sans savoir où ils commencent vraiment, ni où ils finiront. C’est sans doute cela, se réapproprier son histoire personnelle. L’histoire collective a besoin d’être écrite à plusieurs, il faut s’entendre là-dessus, mais nous ne prétendons raconter que nos histoires personnelles, tenues parfois secrètes et que nous partageons ici.
Dans votre film Ismyrna, vous abordez aux côtés d'Etel Adnan le thème de l'identité. Qu'avez-vous en commun?
Pendant des années, Etel et moi avons partagé une ville où nous n’étions jamais allées : Izmir, en Turquie, ancienne Smyrne. Après la chute de l’Empire ottoman, ma famille paternelle grecque en a été chassée par l'armée turque. La mère d’Etel, également Grecque native de Smyrne, a épousé un officier syrien de l’armée ottomane exilé au Liban après la chute de l’empire. Mais ils ont continué de vivre en partie dans cette ville à laquelle ils avaient été arrachés. Et à nous la raconter, sans fin. Ces histoires se sont transmises et nous ont nourris. Elles nous ont aussi profondément rapprochées toutes les deux. On a vécu comme ça dans une Smyrne imaginaire, confrontées à la transmission de l’histoire, à notre attachement aux objets, aux lieux, aux imaginaires privés d’images.
En quoi votre histoire personnelle et familiale est-elle représentative d'une identité collective ?
Dans le film, on évoque à travers les histoires de nos parents et grands-parents, l’Empire ottoman, dont on parle peu, mais aussi une certaine idée de la mobilité et du cosmopolitanisme : Ismyrna fait partie d’un projet artistique plus vaste intitulé I stared at Beauty so much, inspiré d’un vers de Constantin Cavafy, un des plus grands poètes grecs né à Alexandrie. Smyrne, Beyrouth, Alexandrie, c’était ce genre de ville où l’identité culturelle se posait différemment, où les communautés coexitaient. Et cette coexistence était précieuse. Nos expériences personnelles, le récit de l’ existence de nos parents, forment le prisme à travers lequel sont évoqués les changements intervenus après la fin de l'Empire ottoman, le déplacement des frontières, les concepts d’identité, d’appartenance et d’exil.
Pourquoi cette question de l'identité est importante?
Plus que d’identité, nous parlons de toutes les histoires liées à cette ville et qui nous ont profondément constituées et transformées. Comment s' en libérer tout en leur permettant de se transmettre? Parce qu’il n’y a pas de photos, d’images, ni de récits écrits. Juste la tradition orale. Le film raconte comment on pose nos valises, et choisit de vivre hors de la nostalgie, dans un "éternel présent", comme le dit si bien Etel. Elle dit de très belles choses dans le film sur la façon dont nous avons absorbé la tristesse de nos parents, de l’exil vécu par nos familles. Mais aussi comment nos imaginaires sont comme la pellicule d’un film photographique sur laquelle les souvenirs s’impriment. Ce film garde l’empreinte de ce qu’on nous a dit, comme une impression magnétique qui crée des formes poétiques imprimées à tout jamais en nous. C’est tout cela qui fait de nous ce que nous sommes. Je préfère parler d’imaginaire, plutôt que d'identité parce que justement, l’identité demande une constance, alors que nous évoluons sans cesse et transformons les récits, sans savoir où ils commencent vraiment, ni où ils finiront. C’est sans doute cela, se réapproprier son histoire personnelle. L’histoire collective a besoin d’être écrite à plusieurs, il faut s’entendre là-dessus, mais nous ne prétendons raconter que nos histoires personnelles, tenues parfois secrètes et que nous partageons ici.
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