Le schisme est confirmé entre les Forces libanaises et l’opposition chiite au Hezbollah.
La circonscription du Sud III, formée des trois cazas de Nabatiyé, Marjayoun-Hasbaya et Bint Jbeil, est le terrain qui compte le plus de votes chiites au Liban, suivi par Tyr et Baalbeck, et donc le terrain où le Hezbollah et ses alliés assoient le plus confortablement leur hégémonie. Cela fait depuis 1992 que la liste n’a pas subi une percée, si bien que les législatives sont souvent assimilées à un referendum autour du Hezbollah plus qu’à des élections.
Mais cette hégémonie semble cette année le plus à risque d’être défiée, en comparaison avec d’autres fiefs du parti pro-iranien, après que l’opposition a réussi à se fédérer et à former une liste unifiée.
Réunion de plusieurs gauches
Après plusieurs semaines d’incertitude, la liste complète de l’opposition a fini par être annoncée le 1er avril, suscitant un certain espoir d'opérer une brêche, avant qu’une liste distincte ne soit aussi annoncée le lundi 4 avril. Celle-ci a déclenché les critiques d’opposants chiites la percevant comme nuisible parce que susceptible de scinder l’opposition au Hezbollah. Cette seconde liste a en tout cas vu l’un de ses cinq candidats se retirer, en l’occurrence Riad Issa, candidat au siège sunnite, ce qui l’a nettement affaiblie. Pour rappel, onze sièges sont à pourvoir dont huit réservés à la communauté chiite (trois à Nabatiyé, trois à Bint Jbeil et deux à Marjayoun-Hasbaya). Les trois sièges restants sont répartis respectivement entre sunnites, grec-orthodoxes et druzes, pour Marjayoun-Hasbaya. Le vote préférentiel est restreint à chaque caza en vertu de la loi électorale.
La liste de l’opposition unifiée baptisée «Ensemble vers le changement» a pour point fort d’avoir réuni différentes tendances de gauche, aux positions variables à l’égard du Hezbollah.
Elle compte des indépendants ou ex-partisans issus de la mouvance de gauche qui se sont ralliés à la révolution à travers des groupes clairement opposés au parti chiite. «C’est le noyau dur de la liste», rapporte un indépendant qui a participé à sa formation. Pour pouvoir unifier l’opposition, un dialogue a été mené avec des indépendants comme Élias Jradé, médecin (candidat au siège grec-orthodoxe) et l’avocat Firas Hamdane (candidat au siège druze).
Ce dialogue a aussi inclu d’autres groupes de gauche aux positions moins tranchées à l’égard du Hezbollah, comme le Parti communiste, représenté par Khalil Dib sur la liste et le mouvement Citoyens et citoyennes dans un État, conduit par Charbel Nahas, avec comme candidat Nizar Rammal, les deux groupes agissant cette année en duopole.
Inconsistance FL entre Sud II et Sud III
Cette ouverture n’a pas été tolérée par les Forces Libanaises, mettant en doute l’engagement réel du Parti communiste contre le Hezbollah. Le fait que le PC se soit opposé à une alliance officielle avec les FL dans d’autres circonscriptions n’a pas facilité les choses.
Les FL ont donc décidé de se dissocier de la liste. Mais leur choix laisse perplexes certains démocrates chiites, puisque le parti de Samir Geagea avait déjà apporté un appui au candidat indépendant grec-orthodoxe sur la liste.
De sources concordantes ayant suivi de près la formation de la liste complète de l’opposition à Sud III, les FL s’étaient entendues dans un premier temps avec le noyau dur de la liste sur le choix d'Élias Jradé comme candidat indépendant au siège grec-orthodoxe. Un choix avalisé aussi par les Kataëb, qui continuent par ailleurs de soutenir la liste sans avoir de candidat.
Le souci se faisait en outre de la compléter et d’attirer des groupes de gauche que le Hezbollah aurait pu rallier à lui comme en 2018, afin de couper l’herbe sous le pied du parti chiite. Une ouverture s’est donc opérée en direction du PC et de Charbel Nahas. Un accord a été obtenu, excluant de la liste Adnan Abboud (notable originaire de Khyam) à Sud III, et incluant à Sud II la candidate de la gauche Roua Farès à la place du candidat du Parti communiste, Daoud Farij. C’est ce candidat, se présentant comme indépendant, qui a pourtant fini par être retenu par les FL à Tyr, sur une liste incomplète rivalisant avec la liste principale de l’opposition, après la rupture FL avec l’opposition unifiée à Marjayoun-Hasbaya.
«Les FL entravent une percée contre Hardane»
«Les Forces libanaises, qui ont refusé une alliance avec un candidat du PC à Sud III, l’acceptent à Sud II, et dans les deux cas au détriment de l’opposition chiite au Hezbollah», s’étonne un démocrate chiite, en s’interrogeant sur une possible connivence entre les Forces libanaises et le parti pro-iranien contre lequel les premières disent pourtant mener campagne.
Certains démocrates chiites soupçonnent les FL d’avoir incité à la formation de la liste incomplète rivale, même si celle-ci ne compte pas de candidat grec-orthodoxe. Pour rappel, Fadi Salamé, candidat attitré des FL depuis 2018, s’est retiré de la course.
Un autre démocrate chiite ajoute que le point fort de la principale liste de l’opposition à Sud III, par-delà les réserves acceptables sur certains noms, est d’avoir resserré les rangs face au parti chiite.
Elle aurait grâce a cela le plus de chance d'effectuer une percée au niveau du siège grec-orthodoxe, qu’occupe depuis 1992 nul autre qu'Assaad Hardane, député sortant du Parti syrien national social, à l’inimitié idéologique et historique avec les FL. «Quelle bataille plus symbolique que celle-ci pour les Forces libanaises?», s’interroge le démocrate chiite.
Samir Geagea a fini par annoncer samedi la décision de son parti de ne pas s’engager dans la bataille électorale dans la circonscription Sud III, au cours d’un meeting à Meerab avec des cadres FL de ces régions. Ce que les démocrates chiites interprètent comme un «boycottage» des élections. Il a expliqué que des opposants chiites "ont eu peur" de s’allier aux FL, tout comme d’autres indépendants "qui ont exigé que notre appui reste discret, ce que nous ne pouvions pas accepter".
Le choix de Kheireddine
Le Parti socialiste progressiste, qui lui aussi dit mener sa bataille électorale contre le Hezbollah, n’a pas tranché en revanche ses choix électoraux à Sud III, selon une source du parti.
La formation de Walid Joumblatt aurait compté sur Nabih Berry, président de la Chambre et chef du mouvement Amal, pour le choix du candidat au siège druze sur la liste du pouvoir, en l’occurrence Marwan Kheireddine, issu des rangs du Parti démocrate de Talal Arslane. «Le président de la Chambre a suggéré le nom de Marwan Kheireddine, que le PSP n’a ni rejeté, ni endossé», selon la source.
La circonscription du Sud III, formée des trois cazas de Nabatiyé, Marjayoun-Hasbaya et Bint Jbeil, est le terrain qui compte le plus de votes chiites au Liban, suivi par Tyr et Baalbeck, et donc le terrain où le Hezbollah et ses alliés assoient le plus confortablement leur hégémonie. Cela fait depuis 1992 que la liste n’a pas subi une percée, si bien que les législatives sont souvent assimilées à un referendum autour du Hezbollah plus qu’à des élections.
Mais cette hégémonie semble cette année le plus à risque d’être défiée, en comparaison avec d’autres fiefs du parti pro-iranien, après que l’opposition a réussi à se fédérer et à former une liste unifiée.
Réunion de plusieurs gauches
Après plusieurs semaines d’incertitude, la liste complète de l’opposition a fini par être annoncée le 1er avril, suscitant un certain espoir d'opérer une brêche, avant qu’une liste distincte ne soit aussi annoncée le lundi 4 avril. Celle-ci a déclenché les critiques d’opposants chiites la percevant comme nuisible parce que susceptible de scinder l’opposition au Hezbollah. Cette seconde liste a en tout cas vu l’un de ses cinq candidats se retirer, en l’occurrence Riad Issa, candidat au siège sunnite, ce qui l’a nettement affaiblie. Pour rappel, onze sièges sont à pourvoir dont huit réservés à la communauté chiite (trois à Nabatiyé, trois à Bint Jbeil et deux à Marjayoun-Hasbaya). Les trois sièges restants sont répartis respectivement entre sunnites, grec-orthodoxes et druzes, pour Marjayoun-Hasbaya. Le vote préférentiel est restreint à chaque caza en vertu de la loi électorale.
La liste de l’opposition unifiée baptisée «Ensemble vers le changement» a pour point fort d’avoir réuni différentes tendances de gauche, aux positions variables à l’égard du Hezbollah.
Elle compte des indépendants ou ex-partisans issus de la mouvance de gauche qui se sont ralliés à la révolution à travers des groupes clairement opposés au parti chiite. «C’est le noyau dur de la liste», rapporte un indépendant qui a participé à sa formation. Pour pouvoir unifier l’opposition, un dialogue a été mené avec des indépendants comme Élias Jradé, médecin (candidat au siège grec-orthodoxe) et l’avocat Firas Hamdane (candidat au siège druze).
Ce dialogue a aussi inclu d’autres groupes de gauche aux positions moins tranchées à l’égard du Hezbollah, comme le Parti communiste, représenté par Khalil Dib sur la liste et le mouvement Citoyens et citoyennes dans un État, conduit par Charbel Nahas, avec comme candidat Nizar Rammal, les deux groupes agissant cette année en duopole.
Inconsistance FL entre Sud II et Sud III
Cette ouverture n’a pas été tolérée par les Forces Libanaises, mettant en doute l’engagement réel du Parti communiste contre le Hezbollah. Le fait que le PC se soit opposé à une alliance officielle avec les FL dans d’autres circonscriptions n’a pas facilité les choses.
Les FL ont donc décidé de se dissocier de la liste. Mais leur choix laisse perplexes certains démocrates chiites, puisque le parti de Samir Geagea avait déjà apporté un appui au candidat indépendant grec-orthodoxe sur la liste.
De sources concordantes ayant suivi de près la formation de la liste complète de l’opposition à Sud III, les FL s’étaient entendues dans un premier temps avec le noyau dur de la liste sur le choix d'Élias Jradé comme candidat indépendant au siège grec-orthodoxe. Un choix avalisé aussi par les Kataëb, qui continuent par ailleurs de soutenir la liste sans avoir de candidat.
Le souci se faisait en outre de la compléter et d’attirer des groupes de gauche que le Hezbollah aurait pu rallier à lui comme en 2018, afin de couper l’herbe sous le pied du parti chiite. Une ouverture s’est donc opérée en direction du PC et de Charbel Nahas. Un accord a été obtenu, excluant de la liste Adnan Abboud (notable originaire de Khyam) à Sud III, et incluant à Sud II la candidate de la gauche Roua Farès à la place du candidat du Parti communiste, Daoud Farij. C’est ce candidat, se présentant comme indépendant, qui a pourtant fini par être retenu par les FL à Tyr, sur une liste incomplète rivalisant avec la liste principale de l’opposition, après la rupture FL avec l’opposition unifiée à Marjayoun-Hasbaya.
«Les FL entravent une percée contre Hardane»
«Les Forces libanaises, qui ont refusé une alliance avec un candidat du PC à Sud III, l’acceptent à Sud II, et dans les deux cas au détriment de l’opposition chiite au Hezbollah», s’étonne un démocrate chiite, en s’interrogeant sur une possible connivence entre les Forces libanaises et le parti pro-iranien contre lequel les premières disent pourtant mener campagne.
Certains démocrates chiites soupçonnent les FL d’avoir incité à la formation de la liste incomplète rivale, même si celle-ci ne compte pas de candidat grec-orthodoxe. Pour rappel, Fadi Salamé, candidat attitré des FL depuis 2018, s’est retiré de la course.
Un autre démocrate chiite ajoute que le point fort de la principale liste de l’opposition à Sud III, par-delà les réserves acceptables sur certains noms, est d’avoir resserré les rangs face au parti chiite.
Elle aurait grâce a cela le plus de chance d'effectuer une percée au niveau du siège grec-orthodoxe, qu’occupe depuis 1992 nul autre qu'Assaad Hardane, député sortant du Parti syrien national social, à l’inimitié idéologique et historique avec les FL. «Quelle bataille plus symbolique que celle-ci pour les Forces libanaises?», s’interroge le démocrate chiite.
Samir Geagea a fini par annoncer samedi la décision de son parti de ne pas s’engager dans la bataille électorale dans la circonscription Sud III, au cours d’un meeting à Meerab avec des cadres FL de ces régions. Ce que les démocrates chiites interprètent comme un «boycottage» des élections. Il a expliqué que des opposants chiites "ont eu peur" de s’allier aux FL, tout comme d’autres indépendants "qui ont exigé que notre appui reste discret, ce que nous ne pouvions pas accepter".
Le choix de Kheireddine
Le Parti socialiste progressiste, qui lui aussi dit mener sa bataille électorale contre le Hezbollah, n’a pas tranché en revanche ses choix électoraux à Sud III, selon une source du parti.
La formation de Walid Joumblatt aurait compté sur Nabih Berry, président de la Chambre et chef du mouvement Amal, pour le choix du candidat au siège druze sur la liste du pouvoir, en l’occurrence Marwan Kheireddine, issu des rangs du Parti démocrate de Talal Arslane. «Le président de la Chambre a suggéré le nom de Marwan Kheireddine, que le PSP n’a ni rejeté, ni endossé», selon la source.
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