Covid en Corée du Nord: une parade militaire responsable?
©Le dictateur nord-coréen est apparu masqué à la télévision. (Photo by Anthony WALLACE / AFP)
Longtemps resté vierge de tout cas de Covid-19, du moins officiellement, le régime communiste est désormais touché par la pandémie mondiale. Kim Jong-Un a précisé que le virus s'était déjà répandu à travers tout le pays et que des dizaines de milliers de personnes étaient "isolées et soignées". Une parade militaire serait responsable de cette vague inédite dans ce pays déjà isolé du monde extérieur.

Ce pays reclus avait fait état jeudi de ses premiers cas de coronavirus, déclarant passer en régime de "prévention d'urgence maximale des épidémies", après que des personnes avaient été testées positives au sous-variant BA.2 d'Omicron.

L'agence de presse officielle KCNA a indiqué vendredi que le leader Kim Jong Un s'était rendu au siège national de la prévention des épidémies où il avait "pris connaissance de la propagation du Covid-19 dans tout le pays".

Six personnes victimes de "fièvre" sont mortes dans le pays, dont une testée positive au sous-variant BA.2 d'Omicron, a indiqué KCNA.

"Plus de 350.000 personnes ont présenté de la fièvre en peu de temps et au moins 162.200 d'entre elles sont complètement guéries", a détaillé la même source. "Rien que le 12 mai", quelque 18.000 personnes ont présenté des symptomes à travers le pays et "187.800 personnes sont isolées et soignées", selon la même source.

Aucun des 25 millions d'habitants n'est vacciné contre le coronavirus, Pyongyang ayant rejeté les offres de vaccination de l'Organisation mondiale de la santé, de la Chine et de la Russie.

Kim Jong Un, qui est apparu pour la première fois à la télévision portant un masque, a présidé jeudi une réunion d'urgence du bureau politique sur la situation épidémique. Il a ordonné des mesures de confinement pour tenter d'enrayer la propagation du virus.

"C'est le défi le plus important et la tâche la plus importante auxquels notre parti doit faire face pour inverser rapidement cette situation de crise sanitaire", a souligné KCNA.

La Corée du Nord, qui a été l'un des premiers pays au monde à fermer ses frontières en janvier 2020 après l'apparition du virus dans la Chine voisine, s'est longtemps vantée de sa capacité à tenir le virus à distance. Elle n'avait jusqu'à présent signalé aucun cas confirmé de Covid-19 à l'OMS.

Un représentant de l'organisation mondiale de la santé pour la Corée du Nord a déclaré vendredi que l'OMS avait assisté Pyongyang das l'élaboration d'un plan de vaccination au début de l'année.

En Corée du Sud, la nouvelle administration du président Yoon Suk-yeol a proposé d'envoyer des vaccins au Nord, précisant cependant n'en avoir pas encore discuté avec Pyongyang.

Des employés pulvérisent du désinfectant dans le cadre des mesures préventives contre le coronavirus Covid-19 au Pyongyang Children's Department Store à Pyongyang le 18 mars 2022. (Photo de KIM Won Jin / AFP)

Excès de "confiance"


Le régime de Kim Jong Un ne semble selon lui avoir "réalisé la gravité" de la situation que tardivement et a procédé à des tests de dépistage du Covid-19 après le retour des participants au défilé dans leurs districts.

"L'organisation d'un défilé militaire en présence d'une grande foule, alors que le variant Omicron faisait rage en Chine voisine, montre que Pyongyang était trop confiant dans ses capacités à combattre et à prévenir le virus", assure Cheong Seong-chang, de l'Institut Sejong.

Le pays reclus avait fait état jeudi de ses premiers cas de coronavirus et a déclaré un confinement national. Six personnes victimes de "fièvre" sont mortes dans le pays, dont une testée positive au sous-variant BA.2 d'Omicron, selon l'agence de presse officielle KCNA.

Aucun des 25 millions d'habitants n'est vacciné contre le coronavirus, Pyongyang ayant rejeté les offres de vaccination de l'Organisation mondiale de la santé, de la Chine et de la Russie.

La Corée du Nord a été l'un des premiers pays à fermer ses frontières en janvier 2020 après l'apparition du virus en Chine voisine.

Sa politique d'isolement strict a semblé tenir dans un premier temps le Covid à distance, et le pays n'a signalé aucun cas pendant deux ans, bien que cette affirmation soit mise en doute par certains experts.

Pyongyang a même organisé un défilé militaire nocturne en septembre 2021 sans qu'aucune conséquence ne soit signalée, bien que des photographies de cet événement montrent des participants portant des masques.

Mais au fil du temps, il semble que la Corée du Nord ait relâché sa vigilance sur le plan intérieur, les médias d'État faisant état de la lutte contre l'épidémie de manière plus sporadique, selon les analystes.


A l'époque du défilé de 2021, la circulation des personnes et des biens vers et depuis la Chine faisaient l'objet d'un verrouillage quasi-total, note Yang Moo-jin, professeur à l'Université des études nord-coréennes.

Mais au début de l'année, la Corée du Nord a brièvement assoupli ses restrictions sanitaires, menant probablement à l'épidémie actuelle d'Omicron, ajoute-t-il.

"Le virus a pu pénétrer en Corée du Nord par trois voies différentes : les chemins de fer, le transport maritime et la contrebande", a-t-il ajouté.

Deux hommes vérifient leurs téléphones alors qu'un écran de télévision montre des images d'archives d'un test de missile nord-coréen lors d'une émission d'information. (AFP)

Crise sanitaire majeure ?


Le virus pourrait s'être déjà propagé à travers le pays, selon des analystes, à l'occasion notamment d'importants événements en avril à Pyongyang, en particulier un défilé militaire le 25 avril au cours duquel ni les participants ni les spectateurs ne portaient de masque.

"L'organisation d'une parade militaire à laquelle a assisté une grande foule, alors qu'Omicron faisait rage en Chine voisine, montre que Pyongyang était trop confiant dans ses capacités à combattre et à prévenir le virus", a dit à l'AFP Cheong Seong-chang, spécialiste de la Corée du Nord à l'Institut Sejong.

Le pays pourrait faire face à une crise sanitaire majeure, Omicron étant hautement transmissible, a-t-il estimé, rappelant que Pyongyang avait fait état de près de 20.000 cas en une seule journée.

"Si le nombre de décès dus à Omicron monte en flèche, Pyongyang pourrait être amené à demander le soutien de la Chine", a-t-il ajouté.

Pékin a offert jeudi son aide à la Corée du Nord dont les infrastructures sanitaires sont notoirement défaillantes.

La Chine, seule grande économie du monde à maintenir une politique zéro Covid, est cependant aux prises avec de multiples foyers d'Omicron en dépit de stricts confinements et de dépistages massifs à travers le pays.

Vendredi, Kim Jong Un "a déclaré que la priorité absolue était d'empêcher la propagation du virus en verrouillant activement les zones et en isolant et traitant les personnes atteintes de fièvre de manière responsable", a rapporté KCNA.

Quelques heures après avoir fait état de ses premiers cas de Covid jeudi, la Corée du Nord avait tiré des missiles balistiques.

L'administration du nouveau président sud-coréen Yoon Suk-yeol a fustigé ces nouveaux essais qui font partie d'une "provocation permanente de tir de missiles balistiques, malgré l'irruption du coronavirus".

Censé être une célébration triomphale des prouesses martiales de la Corée du Nord, un défilé militaire géant pour célébrer la fondation de l'armée pourrait avoir involontairement propagé le Covid-19 dans tout le pays, selon les experts.

La Corée du Nord a annoncé vendredi son premier mort du Covid-19, précisant que le virus s'est déjà répandu à travers tout le pays, une "fièvre" s'étant "propagée de manière explosive dans tout le pays à partir de la fin avril" selon l'agence de presse officielle KCNA.

Pour Hong Min, chercheur à l'Institut coréen pour l'unification nationale, basé à Séoul, l'actuelle épidémie de Covid-19 est "étroitement liée à la parade du 25 avril", un gigantesque défilé militaire à l'occasion du 90e anniversaire de l'Armée populaire révolutionnaire de Corée.

Les images de l'événement diffusées par la télévision d'État montrent des milliers de personnes - non masquées et sans distanciation sociale - entassées sur la place Kim Il Sung à Pyongyang pour voir défiler les soldats et applaudir le passage de chars, de lance-roquettes et de gros missiles balistique intercontinentaux (ICBM).

"Plus de 20.000 personnes se sont préparées à la parade deux mois avant l'événement et sont restées dans la capitale pour des séances de photos avec Kim Jong Un", a ajouté Hong Min à l'AFP.

Avec AFP
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