Nucléaire iranien: l'UE optimiste, Washington tempère
©Les dirigeants du G7 ont abordé le dossier du nucléaire iranien, avant que Washington ne douche leurs espoirs. (Photo : AFP)
L'Union européenne a affirmé vendredi avoir réussi à sortir de l'impasse les négociations pour sauver l'accord sur le nucléaire iranien, mais les Etats-Unis ont aussitôt prévenu qu'un compromis avec l'Iran était "loin d'être acquis".

"Les négociations étaient au point mort et elles ont été rouvertes", s'est félicité le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell après une délicate mission de son émissaire à Téhéran -- sa "dernière cartouche" pour débloquer les pourparlers, selon ses propres mots avant le voyage.

"Il y a une perspective de parvenir à un accord final", a-t-il affirmé en Allemagne où il participait à une réunion ministérielle du G7.

L'UE coordonne ces tractations indirectes qui se sont ouvertes il y a un an à Vienne entre les Etats-Unis et l'Iran pour ressusciter l'accord de 2015, censé empêcher la République islamique de fabriquer la bombe atomique.

Le pacte est moribond depuis le retrait unilatéral en 2018 des Etats-Unis: sous la présidence de Donald Trump, ils ont réimposé des sanctions étouffantes à Téhéran, entraînant en riposte son désengagement progressif de l'accord -- même si les autorités iraniennes continuent de nier vouloir l'arme nucléaire.

L'élection de Joe Biden à la Maison Blanche a permis de relancer les efforts pour faire revivre l'accord, mais les négociations sont à l'arrêt depuis deux mois alors même qu'un projet de texte semblait à portée de signature.

"Voie médiane"


Une précédente navette d'Enrique Mora, le bras droit de Josep Borrell, entre Téhéran et Washington fin mars n'avait pas permis de percée.

En parallèle d'une tentative de médiation de l'émir du Qatar auprès des plus hauts dirigeants iraniens, M. Mora, négociateur en chef de l'UE pour ce dossier, est donc retourné en Iran où il a rencontré jeudi son homologue iranien Ali Bagheri .

"J'évalue cette réunion en Iran de manière très positive. Les négociations étaient bloquées depuis deux mois en raison de ces désaccords sur ce qu'il faut faire avec les Gardiens de la Révolution", a expliqué le chef de la diplomatie de l'UE.

L'un des derniers obstacles est en effet la demande de Téhéran que les Etats-Unis retirent les Gardiens de la Révolution, son armée idéologique, de la liste noire américaine des "organisations terroristes étrangères".

Washington assure que cette sanction, décidée par Donald Trump après le retrait de l'accord, n'a aucun lien avec le nucléaire et ne peut être discutée dans le cadre de ces négociations. Josep Borrell avait promis de proposer une "voie médiane".

"Tous les scénarios"


"Ce genre de choses ne peuvent pas être résolues du jour au lendemain. Disons que les choses étaient bloquées et qu'elles ont été débloquées", a-t-il dit vendredi, assurant que l'UE avait fait passer le message aux négociateurs "cela ne peut pas continuer ainsi".

"La réponse a été assez positive", s'est-il réjoui.

L'optimisme européen a toutefois été rapidement douché par les Etats-Unis.

Le porte-parole de la diplomatie américaine Ned Price a certes remercié Enrique Mora pour son "travail important pour relancer les échanges après plusieurs semaines de retard inutile".

"Cela étant dit, à ce stade un accord reste loin d'être acquis", a-t-il prévenu en réponse à des journalistes. Le gouvernement Biden, qui défend pourtant avec ferveur un retour dans l'accord malgré les critiques acerbes de l'opposition républicaine et d'une partie de son propre camp démocrate, continue de "se préparer à tous les scénarios", une issue diplomatique ou un échec du dialogue, a-t-il ajouté.

Pour le département d'Etat américain, "l'Iran doit décider s'il insiste sur des conditions qui n'ont rien à voir" avec le nucléaire "ou s'il veut conclure un accord rapidement".

"Nous et nos partenaires sommes prêts, depuis un certain temps déjà. Mais la balle est maintenant vraiment dans le camp de l'Iran", a ajouté Ned Price.

Les deux pays ennemis, sans relations diplomatiques depuis plus de 40 ans, se renvoient mutuellement la responsabilité du blocage depuis des semaines.

"Un résultat satisfaisant et fiable est à portée de main si les Etats-Unis prennent leur décision et tiennent leurs engagements", a commenté sur Twitter le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian.

AFP
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