Mardi 15 avril 1975 : Paris rend un dernier hommage à Joséphine Baker, décédée trois jours plus tôt à l’hôpital où une « cardiopathie sévère » compliquée d’une « atteinte neurologique grave » ont tragiquement précipité son « final ». Elle avait 68 ans.
« Elle s’est éteinte à l’aube (du 12 avril, NDLR), trois jours après avoir fêté ses noces d’or avec la scène dans le nouveau spectacle monté en son honneur au music-hall de Bobino », écrit alors l’AFP. Voici le récit des derniers adieux de l’artiste à Paris, racontés à partir de dépêches d’archives.
Pour la « Josephine Baker story », une revue consacrée à sa vie, « on n’a pas lésiné » sur les moyens : 15 décors, 40 costumes, 2 000 paires de chaussures, 40 danseurs pour un total de 3 millions de francs. « C’est le grand retour de Joséphine qui rajeunit Paris de 50 ans », titre la presse. Le président Valéry Giscard d’Estaing lui fait part de « la reconnaissance de la France dont le cœur a si souvent battu avec le vôtre ». Elle ne s’était pas produite à Paris depuis 1959. « On ne peut pas finir sa carrière ailleurs ! », disait-elle. Mais lors du gala donné le 9 avril pour ses 50 années de scène, « son organisme n’a pas résisté à ces émotions et elle était frappée 24 heures plus tard de congestion cérébrale ».
« Elle est morte après avoir obtenu la plus grande récompense de sa carrière : son triomphe pour son gala de rentrée », confiait Line Renaud, restée à ses côtés jusqu’à sa mort. « Elle était au comble de la joie ».
« Bobino illuminé de tous ses feux »
En ce matin du 15 avril, le théâtre « Bobino est illuminé de tous ses feux. Plusieurs centaines d’amis inconnus - des gens âgés pour la plupart - émus, les yeux rougis, se sont regroupés là, dans la petite rue de la Gaîté. C’est peut-être ce matin devant le music-hall au fronton duquel brille encore en lettres immenses le nom de Joséphine, l’adieu le plus émouvant de Paris ».
Auparavant, dans la chapelle ardente dressée pendant deux jours à l’hôpital de la Salpêtrière, le personnel, mais aussi des amis comme Tino Rossi ou Michel Simon lui avaient rendu un dernier hommage. Une immense croix de roses et lilas blancs reposait sur le cercueil d’acajou. Elle portait cette seule inscription : « Papa et les enfants ».
Deux immenses chars de fleurs précèdent le fourgon mortuaire dans lequel ont pris place deux enfants de Joséphine, son ex-mari Jo Bouillon et sa sœur Margarette.
De « véritables obsèques nationales »
Après un arrêt symbolique devant Bobino, le cortège arrive à midi devant l’église de la Madeleine dont les marches sont noires de monde. Plusieurs milliers de Parisiens attendent.
Quelques personnalités pénètrent dans l’église derrière le cercueil notamment la princesse Grace de Monaco, Sophia Loren et l’acteur Jean-Claude Brialy.
« Plus de 1 500 personnes prennent place dans l’église. Non seulement la grande nef, mais les bas-côtés, les déambulatoires sont combles et pourtant des milliers d’admirateurs de la grande artiste ont dû rester durant tout l’office sur les marches de l’église et les trottoirs avoisinants ».
« Le catafalque, encadré d’une double haie de drapeaux tricolores auxquels a été ajouté un drapeau américain, disparaît sous les fleurs : immenses croix de roses blanches, couronnes de lilas, de roses roses, de lys, de delphiniums, d’orchidées, parmi lesquelles a été disposé un coussin portant les trois décorations de la croix de guerre et de la résistance de la défunte ».
Sous les projecteurs de la télévision et les flashes des photographes qui ont envahi jusqu’à la chaire, la messe est dite par le chanoine Thorel, curé de la paroisse.
« Paris a eu pour Joséphine un coup de cœur », déclare-t-il, évoquant « son aventure extraordinaire depuis sa naissance dans la misère, à Saint-Louis dans le Missouri, jusqu’à son triomphe, il y a quelques jours » et rendant hommage au « courage qui la fit s’engager dans les forces françaises libres ».
"En sortant, le prêtre confie à un de ses cocélébrants : C’étaient de véritables obsèques nationales. Les mœurs et l’Église ont changé depuis l’enterrement à la sauvette de Molière".
C’est dans l’intimité qu’elle est enterrée quatre jours plus tard au cimetière de marin de Monaco.
AFP/Raphaëlle PICARD
@AFP
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En ce matin du 15 avril, le théâtre « Bobino est illuminé de tous ses feux. Plusieurs centaines d’amis inconnus - des gens âgés pour la plupart - émus, les yeux rougis, se sont regroupés là, dans la petite rue de la Gaîté. C’est peut-être ce matin devant le music-hall au fronton duquel brille encore en lettres immenses le nom de Joséphine, l’adieu le plus émouvant de Paris ».
Auparavant, dans la chapelle ardente dressée pendant deux jours à l’hôpital de la Salpêtrière, le personnel, mais aussi des amis comme Tino Rossi ou Michel Simon lui avaient rendu un dernier hommage. Une immense croix de roses et lilas blancs reposait sur le cercueil d’acajou. Elle portait cette seule inscription : « Papa et les enfants ».
Deux immenses chars de fleurs précèdent le fourgon mortuaire dans lequel ont pris place deux enfants de Joséphine, son ex-mari Jo Bouillon et sa sœur Margarette.
De « véritables obsèques nationales »
Après un arrêt symbolique devant Bobino, le cortège arrive à midi devant l’église de la Madeleine dont les marches sont noires de monde. Plusieurs milliers de Parisiens attendent.
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« Plus de 1 500 personnes prennent place dans l’église. Non seulement la grande nef, mais les bas-côtés, les déambulatoires sont combles et pourtant des milliers d’admirateurs de la grande artiste ont dû rester durant tout l’office sur les marches de l’église et les trottoirs avoisinants ».
« Le catafalque, encadré d’une double haie de drapeaux tricolores auxquels a été ajouté un drapeau américain, disparaît sous les fleurs : immenses croix de roses blanches, couronnes de lilas, de roses roses, de lys, de delphiniums, d’orchidées, parmi lesquelles a été disposé un coussin portant les trois décorations de la croix de guerre et de la résistance de la défunte ».
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AFP/Raphaëlle PICARD
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