La dignité et la démocratie au Liban
Francis Fukuyama, l'auteur très connu pour ses thèses sur «la fin de l'histoire», évoque dans son ouvrage sur «l'identité» un processus émergent lié à la «dignité» et à son rapport à l'identité nationale. Dans cet ouvrage, l’auteur détaille comment cette transformation intellectuelle s'est opérée à partir de tendances individuelles relatives à la dignité pour devenir un besoin collectif à part entière.

Bien qu’il considère que ce processus intellectuel philosophique occidental a progressé jusqu'à la génération post Jean-Jacques Rousseau cependant, c’est bien Kant et Hegel qui sont à l’origine de l'expansion de ce concept. Francis Fukuyama poursuit avec l’exégèse des récits religieux du christianisme qui faisaient référence au «choix moral» et comment les philosophes engagés dans la philosophie politique ont concilié le lien entre le privé et le public, et entre l'idée de dignité et de démocratie.

Certes, la démocratie est liée en grande partie à la dignité humaine, puisqu’il est impossible pour les peuples de vivre dignement sous des régimes dictatoriaux. La liberté individuelle et collective est liée à la dignité et à la démocratie. Partant, comment imaginer l’état des libertés sous des régimes autoritaires et répressifs?

Les équilibres politiques qui ont émergé à l’époque des «printemps arabes», pour ainsi dire, ont fait croire à de larges pans des sociétés arabes que la stabilité et la liberté sont fondamentalement contradictoires, dans le sens où la stabilité ne pouvait être atteinte que sous des régimes dictatoriaux qui confisquaient les libertés de leurs populations et leurs choix démocratiques, en échange de cette stabilité.

Néanmoins, cautionner cette équation ou céder à ses concepts est tout simplement inconcevable. Pour les peuples arabes, devoir choisir entre l'oppression ou le chaos est un choix difficile et contradictoire à l'histoire. Certes, l’exercice démocratique nécessite une maturité collective et une compréhension des processus politiques compliqués et de leurs répercussions multiformes sur la société. Mais, il est vrai aussi que la confiscation des libertés et l'aliénation des peuples dans les grandes prisons nationales que deviennent alors leur pays, est une option destructrice pour les sociétés.


Ce développement conceptuel de l'idée de dignité de l'individu dans la société et de son lien avec la démocratie revêt une importance exceptionnelle et fondamentale en raison de son lien réel avec l'avenir des peuples et les aspirations de leurs générations futures. Les régimes répressifs ou les régimes désintégrés (comme le Liban ces derniers temps), incitent leurs enfants à émigrer et à rechercher de meilleures alternatives qui leur permettent de vivre dignement.

Les Libanais qui ont émigré il y a deux ans et demi et ceux en voie de le faire partent en quête d’une dignité perdue dans leur patrie. Ils recherchent le b.a.-ba d'une vie décente et digne, qu'il est honteux de ne pas avoir au XXIᵉ siècle, soit dit en passant. Ils aspirent à obtenir les services premiers tels que l'électricité, l'eau, les télécommunications, les moyens de subsistance et l'habillement. Ils sont à la recherche d'une couverture santé, d’une sécurité sociale et d’une assurance vieillesse.

Au Liban, tous les systèmes de soins ont périclité, et il en est de même pour de nombreux autres secteurs. Le pays poursuivra son effondrement et se fracturera encore davantage sous le mandat actuel, qui rend son dernier souffle, en entraînant de nombreux Libanais avec lui. Néanmoins, l’heure du vrai changement a sonné. L'idée de «dignité collective» des citoyens a sombré en raison des développements dramatiques que le Liban a connus lors des deux dernières années.

Si les récentes élections législatives ont abouti à un changement partiel, dont les contours ne sont toujours pas clairement définis, il n’en demeure pas moins que la prochaine élection présidentielle constituera un tournant politique important pour reconstruire l'État et les institutions détruits pendant le «mandat fort». Les Libanais attendent l'élection d'un nouveau président qui inspire confiance à l'intérieur et à l'extérieur du pays et redonne l'espoir en un meilleur avenir.
Commentaires
  • Aucun commentaire