La Cour pénale internationale, vingt ans d'(in)efficacité
Vendredi 1er juillet, la Cour pénale internationale (CPI) a célébré son vingtième anniversaire. Remise sur le devant de la scène avec la guerre en Ukraine, cette institution judiciaire est cependant critiquée par son manque d'efficacité. En vingt ans, son bilan ne s'élève qu'à cinq condamnations. 

La Cour pénale internationale (CPI) célèbre vendredi 1er juillet son vingtième anniversaire, marqué par la guerre en Ukraine qui lui donne un nouvel élan après deux décennies de critiques et de controverses.

Un maigre bilan de cinq condamnations et des accusations selon lesquelles elle ne s'est concentrée que sur l'Afrique ont terni l'image de la CPI, dont le traité fondateur --le Statut de Rome-- est entré en vigueur le 1er juillet 2002.

Le refus de grandes puissances mondiales telles que les États-Unis, la Russie et la Chine de rejoindre cette instance a également entravé la portée de la cour, qui siège à La Haye, aux Pays-Bas.

Cour pénale internationale Le procureur de la CPI Karim Khan devant les locaux de l'institution, à la Haye (Pays-Bas) (AFP)
Un "pilier du système juridique international"

Mais la seule juridiction permanente au monde dédiée à la lutte contre l'impunité pour les génocides, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre et le crime d'agression reste la juridiction de dernier recours pour de nombreux pays.

Elle est un "pilier du système juridique international", a salué le juge président Piotr Hofmański en ouvrant une conférence organisée pour les 20 ans de la cour.

L'anniversaire de la cour est "une réalisation formidable", a souligné le procureur Karim Khan lors de la conférence. Mais, entouré de certains "architectes" du statut fondateur, M. Khan a comparé la CPI à un bâtiment "sous pression".

"Il faut procéder à des rénovations, il faut devenir plus forts et plus efficaces", a-t-il ajouté.

L'enquête en Ukraine, ouverte à la suite de l'invasion russe avec le soutien imminent de 43 États, donne une chance à la CPI de prouver ses pouvoirs.

Cour pénale internationale ukraine La procureure générale d'Ukraine Iryna Venediktova et le procureur de la CPI Karim Khan en Ukraine (AFP)

L'investigation a déjà valu à la cour un regain de soutien occidental, notamment avec l'aide de dizaines d'enquêteurs étrangers.
Seulement cinq condamnations

La CPI est le successeur du tribunal de Nuremberg qui a jugé les crimes nazis après la Seconde Guerre mondiale, lorsque le nouvel ordre international était en quête d'un idéal de justice mondiale.


Les tribunaux sur les guerres en ex-Yougoslavie dans les années 1990, le génocide rwandais en 1994 et le conflit en Sierra Leone ont également jeté les bases d'une cour permanente à La Haye.

Le Statut de Rome a été signé en 1998, avec une entrée en vigueur quatre ans plus tard.

Mais la CPI n'a depuis obtenu que cinq condamnations, tous des rebelles africains et aucun chef de gouvernement.

"En considérant l'héritage de la CPI à la lumière de ses nobles objectifs, les résultats sont négligeables", a déclaré à l'AFP Thijs Bouwknegt de l'Institut NIOD pour les études sur la guerre, l'Holocauste et le génocide.

Cour pénale internationale

L'ancien président ivoirien Laurent Gbagbo a été innocenté, l'ancien vice-président de la République démocratique du Congo Jean-Pierre Bemba acquitté en appel et les poursuites à l'encontre du président kenyan Uhuru Kenyatta ont été abandonnées.
Certaines grandes puissances absentes

Tout aussi préjudiciable est l'absence de certaines grandes puissances. Les États-Unis, qui ont signé le Statut de Rome en 2000, mais ne l'ont jamais ratifié, ont parfois été activement hostiles, sanctionnant même la cour pour son enquête en Afghanistan.

La Chine, Israël, la Birmanie et la Syrie se sont également tenus à l'écart, tout comme la Russie, qui aurait même envoyé un espion se faisant passer pour un stagiaire pour influencer l'enquête de la CPI sur l'Ukraine.

Cependant, de nouvelles enquêtes ont été ouvertes ces dernières années sur certains des conflits les plus contestés au monde, notamment Israël-Palestine, l'Afghanistan, la Birmanie et les Philippines.

Les conflits sont aujourd'hui documentés de manière fondamentalement différente que lorsque la cour est née il y a 20 ans, notamment grâce aux smartphones, a souligné Karim Khan.

La technologie est "capitale pour faire la différence entre le bon grain et l'ivraie" dans le rassemblement de preuves, a-t-il souligné.

"Je suis convaincu que la justice internationale peut accélérer et progresser et avoir l'impact requis", a affirmé M. Khan, à condition de travailler "de manière collective" pour être plus efficace.

Avec AFP
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