PNUD: l'Ukraine doit affronter la corruption, son Némésis d'avant-guerre
©La conférence de Lugano prévoit un "Plan Marshall2 pour la reconstruction de l'Ukraine. (AFP)

Déjà avant le tournant du 24 février dernier et de son invasion, la corruption était le Némésis ukrainien. Le chef du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), en vue d'un Plan Marshall pour la reconstruction du pays, estime que Kiev doit s'atteler à combattre activement la corruption en perspective d'un afflux massif d'aides. Lutter contre ce fléau endémique "empêche le vol de son propre peuple", a déclaré à l'AFP Achim Steiner, en marge de la conférence de Lugano.



"Bonne gouvernance"

Cette dernière a permis aux dirigeants ukrainiens et leurs alliés de dessiner, lundi et mardi, les contours d'une future reconstruction du pays ravagé par l'armée russe. "La corruption en fin de compte est un vol, du développement national, du Trésor et, en fin de compte, des gens du pays", insiste M. Steiner.


M. Steiner rappelle que l'une des compétences du PNUD, présent depuis des décennies en Ukraine mais qui a dû revoir ses priorités avec la guerre et son cortège de déplacés et de réfugiés, est "la bonne gouvernance". "Nous avons des systèmes de soutien anti-corruption que nous fournissons aux gouvernements, mais c'est à leur invitation que nous le faisons", explique-t-il.



Et "il est dans l'intérêt de l'Ukraine d'être considérée comme proactive dans ce domaine" parce qu'il "y a une quantité importante de financement qui viendra de l'étranger" pour relever le pays.


Le chef du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) Achim Steiner.
Corruption: 122e sur 180

À Lugano, Denys Chmygal, le Premier ministre ukrainien a promis que "nous allons non seulement combattre la corruption mais la rendre impossible", notamment grâce à "la numérisation pour limiter au maximum les intermédiaires humains à même de céder à la tentation."

Pour Achim Steiner, le PNUD peut "très rapidement renforcer cette confiance dans la capacité de l'Ukraine à gérer cela" et "le niveau de confiance à l'international". Pour ce faire, l'agence onusienne peut s'appuyer sur sa "collaboration avec l'Ukraine sur des sujets comme la responsabilité, la transparence, l'utilisation également des technologies numériques pour les plateformes de gouvernement électronique".

Dans son rapport 2021, l'ONG Transparency International classe l'Ukraine 122e sur 180. C'est mieux qu'en 2014 (142e), et mieux que la Russie (136e), mais encore très loin derrière ses voisins membres de l'Union européenne où le moins bien placé, la Bulgarie, est au 78e rang.
Conséquences mondiales

Le responsable du PNUD, actif dans plus de 170 pays et territoires dans le monde, note comme nombre de ses collègues en charge des organisations d'aide de l'ONU que l'attention, justifiée, portée à l'Ukraine ne doit pas faire oublier le reste du monde, également touché par les conséquences indirectes de l'invasion russe.

Denys Chmygal, le Premier ministre ukrainien (à gauche).

"En tant que communauté mondiale, nous faisons face non seulement aux retombées de la pandémie de Covid 19, mais également aux pressions extraordinaires qui accompagnent la hausse des prix et l'augmentation du coût de la vie, par exemple sur les marchés de l'alimentation, de l'énergie et des capitaux", insiste le responsable.

"Tout cela s'aggrave en une crise financière extraordinaire", souligne-t-il. "De nombreux pays en développement sont aux limites de ce qu'ils pourraient emprunter, leurs budgets publics sont épuisés et pourtant ils doivent continuer à faire face à une crise après l'autre". "Pour l'ONU en général, c'est une période très difficile", poursuit-il. Quand "certains des pays les plus riches du monde commencent à réduire leur aide au développement c'est un signal tragique" pour les pays du Sud qui s'inquiètent d'être laissés pour compte, met-il en garde.

"Beaucoup de nos appels humanitaires dans des pays comme le Yémen ou la Syrie, (où sévissent) des conflits de longue date, ne sont même pas financés à hauteur de 40%", ajoute-t-il. "Nous réduisons en fait les rations, nous fermons les postes de santé, nous arrêtons littéralement le soutien à certaines des personnes les plus nécessiteuses au monde".

Avec AFP

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