©Une manifestation antirusse a eu lieu hier à Varsovie, en Pologne. (AFP)
Sous les champs de bataille, une guerre souterraine, celle des taupes, fait rage en Ukraine. Si la Russie a utilisé tout son arsenal militaire dans l'invasion de l'Ukraine, c'est la première fois que l'on parle de l'arme de l'espionnage, profession première du président Poutine. Dans la nuit de dimanche à lundi, sans donner trop de détails, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a limogé deux hauts responsables de l'appareil de l'Etat. La procureure générale, Iryna Venediktova, et le chef des services de sécurité (SBU), Ivan Bakanov, ont été démis de leurs fonctions en raison de soupçons de trahison de certains de leurs subordonnés au profit des Russes. Dans son adresse quotidienne du soir, Zelensky a précisé que les autorités ukrainiennes enquêtent sur plus de 650 cas de soupçons de trahison de responsables locaux, dont 60 dans les zones occupées par les forces russes et prorusses.
"Un si grand nombre de crimes contre les fondations de la sécurité nationale et les liens établis entre des responsables ukrainiens en charge de l'application des lois et les services spéciaux russes posent des questions très sérieuses aux dirigeants concernés. Chacune de ces questions recevra une réponse", a-t-il poursuivi.
Mme Venediktova a notamment dirigé l'enquête sur les atrocités présumées commises au début de l'invasion par les forces russes dans la ville de Boutcha, banlieue au nord-ouest de Kiev, devenues aux yeux de l'Occident un symbole des "crimes de guerre" russes en Ukraine.
Nouvelles sanctions
Lundi, les ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne vont débattre d'un durcissement des sanctions contre Moscou, les salves successives adoptées jusqu'à présent ayant isolé et durement frappé économiquement la Russie, sans la faire reculer ou renoncer à son invasion lancée le 24 février.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le Haut représentant de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité Josep Borrell lors de leur visite dans la ville martyre de Boutcha.
Ils doivent se pencher sur deux propositions de la Commission européenne d'interdire les achats d'or à la Russie pour aligner les sanctions de l'UE sur celles de ses partenaires du G7, et d 'inscrire de nouvelles personnalités russes sur la liste noire de l'UE.
"Moscou doit continuer à payer le prix fort pour son agression", a déclaré vendredi la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, après avoir transmis les nouvelles mesures aux Vingt-Sept.
"Le défi posé par la Russie va durer"
Le chef d'état-major des armées britanniques, l'amiral Tony Radakin s'est inscrit en faux contre des rumeurs concernant la santé du président russe Vladimir Poutine ou la possibilité qu'il puisse être assassiné.
"Je pense que certains commentaires sur le fait qu'il (Poutine) ne soit pas en bonne santé ou qu'il finisse par se faire assassiner, et bien je pense que se sont des voeux pieux", a déclaré sur la BBC M. Radakin dans une interview diffusée dimanche.
Les rumeurs sur la santé de Vladimir Poutine, 70 ans en octobre, sont invérifiables.
"En tant que professionnels militaires, nous voyons un régime relativement stable en Russie, le président Poutine a été en mesure d'étouffer toute opposition (...) et personne au sommet n'a la motivation de le défier", a-t-il soutenu.
Le chef d'état-major des armées britanniques, l'amiral Tony Radakin (à droite) en compagnie du ministre de la Défense Ben Wallace.
Selon lui, "le défi que pose la Russie va durer" potentiellement pendant "des décennies en termes de menace" et le Premier ministre qui succèdera à Boris Johnson, démissionnaire, devra être conscient que la Russie est "la plus grande menace" pour le Royaume-Uni.
M. Radakin a affirmé à la BBC que l'armée ukrainienne était "absolument" convaincue qu'elle allait gagner la guerre déclenchée par l'invasion du pays par la Russie en février.
Selon les estimations de l'armée britannique, la Russie "a perdu plus de 30% de son efficacité au combat terrestre".
"Cela signifie que 50.000 soldats russes sont morts ou ont été blessés dans ce conflit, que près de 1.700 chars russes ont été détruits, que près de 4.000 véhicules blindés appartenant à la Russie ont été détruits", a affirmé M. Radakin.
Le maître du Kremlin a affirmé au début du mois que l'armée russe n'avait "pas encore commencé les choses sérieuses", et son ministre de la Défense Sergueï Choïgou a ordonné la semaine passée d'"accroître encore" la pression militaire.
Reprise des bombardements
La Russie a annoncé samedi avoir officiellement mis fin à la "pause opérationnelle" de son armée décrétée il y a huit jours, et les bombardements ont repris avec plus d'intensité dans le Donbass, dont le contrôle total est le principal objectif à court terme de Moscou.
Donetsk, l'une des deux provinces du Donbass, a été ciblée par "les Russes (qui) continuent de bombarder les infrastructures civiles, en particulier les établissements d'enseignement", a déclaré le gouverneur de la région, Pavlo Kyrylenko.
Les séparatistes prorusses qui tiennent une partie de la même région depuis 2014 ont de leur côté accusé les forces ukrainiennes d'avoir tiré 60 roquettes avec des lance-roquettes multiples Grad sur un quartier de Donetsk.
Au nord-est, des missiles ont frappé dans la nuit de samedi à dimanche Kharkiv, la deuxième ville du pays, proche de la frontière russe. D'autres frappes ont visé Mykolaïv, ville du sud proche de la mer Noire, et des villages de la région, selon Vitaliy Kim, le gouverneur local.
Controverse avec Trudeau
Le président Zelensky a par ailleurs de nouveau critiqué dimanche la décision canadienne, prise la semaine dernière, de permettre le retour en Europe de turbines réparées au Canada et destinées au gazoduc russe Nord Stream.
Il a indiqué avoir dit au Premier ministre canadien Justin Trudeau, qu'il a eu au téléphone dans la journée, que les Ukrainiens n'accepteraient jamais cette décision qui viole selon lui le régime des sanctions contre la Russie.
"C'est une question de respect des sanctions. S'il y a une violation maintenant, cela ne tardera pas avant qu'il y en ait d'autres", a ajouté le président en accusant la Russie de pratiquer un chantage au gaz et en soulignant qu'il y avait d'autres moyens d'acheminer le gaz russe en Europe.
Arrestation de la journaliste russe rebelle
En Russie, la journaliste russe Marina Ovsiannikova, devenue célèbre après son irruption en direct à la télévision avec une pancarte critiquant l'offensive de Moscou en Ukraine, a été interpellée dimanche, ont indiqué son entourage et son avocat.
Aucune déclaration officielle n'a été faite sur les raisons de son interpellation, mais celle-ci intervient quelques jours après que Mme Ovsiannikova a manifesté seule près du Kremlin en brandissant une pancarte critiquant l'intervention militaire en Ukraine et le président Vladimir Poutine.
La guerre en Ukraine entrera le 24 juillet dans son sixième mois et il n'existe aucun bilan global des victimes civiles du conflit jusqu'à présent.
AFP
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