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Les jeunes Massaï, parés de leurs coiffes ornées de plumes d’autruche et arborant des cheveux teints en ocre rouge, immortalisent leur rite de passage à l’âge adulte au moyen de selfies.

De Kisii à Nairobi, en passant par Machakos, des centaines de jeunes Massaï, appartenant à la génération des "Moran" (guerriers en langue massaï), ont afflué vers Nailare pour participer à une cérémonie emblématique. Cette tradition, symbolisant leur passage à l’âge adulte, représente une étape fondamentale dans leur vie. En parallèle, elle illustre aussi la tension entre tradition et modernité.

"C’est l’aboutissement de notre jeunesse. Cette cérémonie fortifie le lien entre nous et ancre notre identité", confie fièrement Hillary Odupoy, jeune étudiant en médecine, le regard caché derrière des lunettes de soleil et le torse orné de perles traditionnelles.

Le panorama est saisissant: une marée de participants vêtus de rouge, cette couleur sacrée des Massaï. De leurs cheveux imprégnés d’un mélange d’ocre et d’huile à leur shuka – la couverture traditionnelle –, tout évoque une fidélité à des coutumes ancestrales.

Cependant, cette tradition millénaire se heurte à la réalité contemporaine. Nombreux sont ces jeunes qui ont quitté leur région natale pour suivre des études ou accepter des emplois en milieu urbain. Malgré la distance, le rite de passage, qui ne se tient que tous les dix ans dans chaque clan, a un pouvoir rassembleur.

Toutefois, la modernité s’infiltre, même dans ces rituels. Peter Ledama Ntuntai, un étudiant en agriculture âgé de 24 ans, souligne: "Outre l’éducation occidentale, l’éducation traditionnelle reste primordiale. Elle façonne notre conduite." De son côté, Olerina Karia, un aîné de la communauté, ajoute: "Nous insufflons aux jeunes l’importance d’être des citoyens responsables. Néanmoins, certaines traditions, comme la chasse au lion ou l’excision, doivent être abandonnées, en particulier lorsqu’elles violent la loi."

Ces traditions, autrefois au cœur de la culture massaï, s’effacent progressivement. Avec la chasse au lion désormais illégale, les retombées du tourisme, notamment dans des régions clés comme le parc Maasai Mara, deviennent essentielles. De plus, bien que l’excision ait été une coutume profondément enracinée, l’interdiction de 2011 au Kenya a engendré un déclin de cette pratique.

La dynamique sociale évolue également. Alors qu’autrefois, un mariage ne pouvait avoir lieu qu’après la cérémonie de l’Eunoto, de plus en plus de Moran modifient cette trajectoire, comme le note Olerina Karia avec une pointe d’amusement: "La société se transforme. Durant leurs études, de nombreux Massaï trouvent l’amour et se marient. Nous nous adaptons."

Mais malgré ces changements, une préoccupation majeure subsiste: la potentialité d’une érosion culturelle. Pour Olerina, le danger réside dans la commercialisation par des étrangers qui éclipseraient les véritables gardiens de ces traditions.

Ainsi, en équilibre entre le passé et le présent, la communauté massaï s’efforce de naviguer entre sauvegarde de l’identité et adaptation à une ère moderne en constante évolution.

Avec AFP

 

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