La pandémie de Covid-19 n’a pas été la première tempête économique à requérir le soutien massif des banques centrales.

La Banque centrale européenne, tout comme la Réserve fédérale américaine, a été régulièrement appelée ces 15 dernières années à jouer les pompiers, s’attirant aussi des critiques sur son interventionnisme.Alors que l’heure est au retrait très progressif de certains soutiens, voici les jalons de ces politiques " non conventionnelles ".

Les banques sous perfusion

Quand éclate à l’été 2007 la crise du crédit immobilier à risque aux Etats-Unis, dite des " subprimes ", les banques ne se font plus confiance et refusent de se prêter mutuellement de l’argent, menaçant tout le système d’effondrement.

Depuis sa villégiature de vacances, Jean-Claude Trichet, alors président de la BCE, décide d’injecter des milliards de liquidités en plusieurs opérations durant le mois d’août.

Ces opérations sont menées à taux fixe, donc au meilleur taux, et non via une enchère comme habituellement.

Le calme revient mais à l’automne 2008, la chute de la banque américaine Lehman Brothers crée un séisme mondial.

La BCE répond plus fort, accordant des crédits illimités aux banques à un taux d’intérêt fixe, en étant moins regardante sur les garanties apportées.

Préserver l’euro quoi qu’il en coute

Au printemps 2010, la monnaie unique européenne est malmenée par la crise de la dette grecque avec le risque de contagion dans toute la zone euro.

Pour faire barrage à la spéculation contre ces pays exsangues, dont les taux d’emprunt sur le marché obligataire s’envolent, la BCE rachète des titres souverains, d’abord de Grèce, puis d’autres Etats (Portugal, Espagne, Irlande, Italie) pour qu’ils se financent à des conditions supportables.

Environ 210 milliards d’euros seront dépensés entre 2010 et 2012 au titre d’un mécanisme baptisé " SMP " vivement contesté par la Banque centrale allemande (Bundesbank), qui y voit un moyen détourné de financer les Etats, ce qui est interdit par les traités.

Tandis que les banques rechignent fin 2011 à ouvrir les vannes du crédit, la BCE sous la houlette de son nouveau président, Mario Draghi, lance une série de prêts exceptionnels à long terme et bon marché, dit " LTRO " (Long Term Targeted Refinancing Operation).

Mais en août 2012, face à des investisseurs toujours persuadés que la zone euro risque d’éclater, Mario Draghi, va improviser son désormais célèbre " whatever it takes ": " dans le cadre de son mandat ", la BCE est " prête à tout " pour sauver l’euro, lance-t-il. La confiance des marchés est restaurée.

Pour mettre ce discours en musique, la BCE sort à l’automne son bazooka, les " OMT " (Outright Monetary Transaction). Prévoyant de racheter sans limite de la dette pour les pays vulnérables, ce programme n’a jamais été activé.

Le spectre de la déflation

La crise des dettes souveraines s’éloigne mais la zone euro doit désormais craindre courant 2014 la déflation, spirale auto-entretenue de baisse des prix, des salaires et des investissements.

Alors que les taux " directeurs " de la BCE, son outil classique pour piloter l’inflation, ont déjà été abaissés depuis des années, la BCE va plus loin et porte en juin 2014 son taux de dépôt en territoire négatif, à -0,10%, pénalisant les banques qui placent leurs liquidités dans ses coffres plutôt que de les prêter.

Objectif: relancer le crédit. Ce taux est depuis passé à -0,5%.

Parallèlement, une nouvelle série de méga prêts aux banques, les " TLTRO " (Targeted Long Term Refinancing Operations), est accordée aux banques qui s’engagent à augmenter leurs crédits au secteur privé.

L’inflation passant en territoire négatif fin 2014, la BCE annonce en janvier 2015 un vaste programme d’achats d’actifs publics et privés, le " QE " (Quantitative easing), toujours en vigueur.

Traiter l’urgence de la pandémie

Début 2020, la pandémie de Covid-19 fait trembler la planète financière.

La présidente de la BCE, Christine Lagarde improvise le 18 mars une téléconférence depuis sa cuisine, d’où va émerger le " programme de rachat d’urgence face à la pandémie " (PEPP). Cet outil très souple dans son fonctionnement est d’abord prévu pour permettre 750 milliards d’euros de rachats de dette publique et privée. L’enveloppe a été progressivement portée à 1.850 milliards d’euros, avec un terme fixé à mars 2022.

Les marchés spéculent aujourd’hui sur l’après-PEPP dans un contexte d’inflation revenue à un niveau historique, titillant les 5% en zone euro, qui devrait en théorie pousser la BCE à resserrer les vannes du crédit. Ce qu’elle n’a plus fait depuis dix ans.

AFP

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