L’affaire des procès touchant et parfois condamnant des banques libanaises pour non-restitution de dépôts continue de faire des vagues. La dernière affaire en date, révélée par le magazine français Challenges la semaine dernière, concerne une syrienne résidente en France qui a exigé, lors d’un procès auprès d’un tribunal parisien, la restitution de près de 2,5 millions d’euros déposés à la Banque Saradar (Liban). Le jugement du tribunal de première instance a été favorable à la plaignante, mais la banque compte faire appel et semble confiante dans l’issue de l’affaire.

Divers autres procès similaires sont en cours dans des pays européens. Au Liban aussi des actions en justice ont été entamées, généralement auprès de juges de référés qui ont dans la plupart des cas ordonné aux banques concernés de restituer l’argent déposé, mais de telles actions sont toujours en cours auprès des tribunaux de fond, sans jugement final pour le moment.

Au-delà des circonstances particulières de chaque cas, et les argumentaires relatifs utilisés par les avocats de la défense, il serait bon d’exposer le contexte général, qui se résume en trois points :

• Aucune législation (de contrôle de capitaux) n’a malheureusement été promulguée par le Parlement libanais, ou toute autre autorité, qui puisse protéger les banques dans de telles affaires. Elles ne peuvent donc invoquer une interdiction légale pour justifier leur refus de servir normalement leur clientèle selon l’usage.
• Aucune banque au monde ne peut restituer les dépôts de tous leurs clients à court terme, même dans les pays les plus prospères, surtout lorsqu’il y a un afflux de demandes de ce genre, comme c’est le cas au Liban depuis 2019. Une limitation spontanée des retraits, surtout en devises étrangères, est donc nécessaire pour préserver l’intégrité de l’établissement. Fait significatif : même les (rares) banques étrangères actives au Liban, et dont la taille locale ne représente qu’une fraction minime de leur taille globale, pratiquent le contrôle spontané de capitaux.
• Selon un avocat neutre que nous avons interrogé, qui n’est donc pas au fait des détails de chaque affaire, il serait bon de se pencher sur la possibilité d’invoquer le cas de force majeure pour sortir de cet imbroglio. Ce cas de figure, assez courant dans les affaires judiciaires, devrait être exploré à son avis, arguant du défaut de paiement de l’Etat et de la situation de faillite financière dans le pays. D’autres pistes sont à l’étude au sein des départements juridiques des banques.