Il n’est pas étonnant que la déferlante de la récession touche le secteur de l’immobilier, un des secteurs de l’économie réelle, qui avait maintenu le cap, pour des raisons particulières, durant les premières années de la crise. Au ralentissement qui l’a frappé par la suite, se greffent aujourd’hui des taxes, des impôts et des frais d’enregistrement qui se chiffrent à des millions de livres.    

La nouvelle fiscalité immobilière est entrée en vigueur immédiatement après l’approbation, avec onze mois de retard, du budget, en novembre 2022. À priori, il faut savoir que pour l’enregistrement de biens-fonds immobiliers après le 15 novembre 2022, l’estimation de la valeur réelle des propriétés bâties est calculée en dollars sur base du taux de change affiché par Sayrafa, la plateforme de change de la Banque du Liban (aujourd’hui, ce taux est de 30.300 LL pour un dollar). Quant aux contrats de vente conclus entre le 1er janvier 2022 et le 15 novembre 2022, l’estimation de la valeur réelle du bien-fonds est évaluée en dollars sur base de la moitié du taux de change de Sayrafa, conformément à la décision n° 688/1 du ministère des Finances.

Quant aux frais d’enregistrement d’un bien-fonds bâti, ils sont calculés sur base de la valeur locative de celui-ci multipliée par 30 au lieu de 20. La valeur locative d’une propriété immobilière est définie selon plusieurs critères, notamment sa superficie, sa location et sa catégorisation; elle doit représenter au moins un taux de rendement locatif de l’investissement immobilier égal à 2,5%, selon les dispositions de la Loi de Finance de 2022. Par exemple, le prix d’un appartement vendu 100.000 dollars passerait à 3 milliards et 30 millions de livres, alors que ses frais d’enregistrement tourneraient autour de 85 millions de livres au lieu de 6, soit près de 14 fois plus. À cela, il faut ajouter la taxe annuelle sur le bien-fonds bâti, qui est dorénavant calculée sur base de sa nouvelle valeur locative.

Pour ce qui est de la succession, un premier impôt est calculé sur la valeur nette de celle-ci. Il est de 5 pour mille et s’applique à tous les droits et biens mobiliers et immobiliers. Le second impôt est calculé par tranche, selon le degré de parenté entre le de cujus et les héritiers. Le barème des droits de succession intervient après déduction des abattements, qui est de l’ordre de 200 millions de livres.

Trop d’impôts tuent l’impôt

Le nouveau train de taxes et d’impôts qui vise à accroître les revenus de l’État constituera un obstacle de taille à la régularisation de la situation de nombreux citoyens à un stade ultérieur. Ainsi, les opérations d’enregistrement seront limitées aux grands appartements, dont les acquéreurs ont des dollars "frais". Il est donc certain que les files d’attente dans les administrations du cadastre, observées avant l’augmentation des taxes et des impôts, disparaîtront. Ayant à l’esprit, à titre indicatif, que les droits de douane ont été multipliés par dix dans le cadre du budget 2022, les salaires des fonctionnaires du secteur public par trois, et ceux du secteur privé environ par cinq.

Les pots-de-vin

Plus encore, les frais d’enregistrement immobilier seront calculés sur la base du montant le plus élevé entre la valeur locative et celle du contrat de vente. Cette estimation est laissée à l’appréciation de l’expert agréé par l’État. Ce qui ouvre grand la porte aux versements de pots-de-vin; c’est que l’expert a toute latitude pour calculer la valeur locative, en estimant que les prix dans la région où se trouve le bien-fonds immobilier à évaluer ont augmenté de 20 fois ou d’une fois et demie.

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