Avec une inflation galopante et une baisse de la consommation, l’économie américaine semble à bout de souffle. Les multiples annonces de licenciement font craindre des risques de récession. 

Demande qui s’essouffle, production en berne, annonces de suppressions d’emploi qui se succèdent, en particulier dans la tech, l’économie américaine multiplie les signes de ralentissement en début d’année.

Jusqu’ici, malgré une inflation à des niveaux records depuis plus de 40 ans et une remontée express des taux par la Réserve fédérale (Fed) afin de la juguler au plus vite, l’économie américaine semblait tenir le choc, entre une consommation qui s’est maintenue une bonne part de l’année 2022 et un marché de l’emploi toujours très dynamique.

La baisse de la consommation affecte durement l’économie américaine, limitant l’ouverture de nouveaux commerces (AFP)

Pour preuve, en décembre, le taux de chômage était encore à 3,5%, avec des créations d’emploi supérieures à ce qui était attendu. De même, les ventes au détail sont restées en progression jusqu’au mois d’octobre.

Mais depuis novembre, la tendance s’est inversée, avec un secteur de la tech qui semble de plus en plus en souffrance et multiplie les licenciements massifs.

Dernier en date, Microsoft a annoncé mercredi qu’il allait licencier environ 10.000 personnes d’ici fin mars, après des annonces similaires chez Amazon (18.000 personnes), Salesforce (8.000 salariés) ou encore Meta (11.000 licenciés).

Malgré les fêtes de fin d’année et les nombreuses promotions, dont le célèbre Black Friday, en novembre puis en décembre, les ventes au détail ont parallèlement reculé, à chaque fois plus qu’attendu.

Selon le dernier rapport publié mercredi, le montant total des dépenses s’est élevé à 677,1 milliards de dollars en décembre, soit une baisse de 1,1% par rapport au mois précédent, dont les données ont été revues en baisse (-1% au lieu de -0,6% annoncé initialement).

Des personnes font du shopping pendant le Black Friday à Santa Anita dans la ville d’Arcadia, en Californie (AFP)

Certes, cette évolution est en partie portée par la baisse des prix, en particulier des carburants, mais elle souligne également que les Américains, après avoir longtemps pioché dans leurs économies, ne disposent plus d’autant de marge.

Prévision pessimiste

" Cette nouvelle baisse vient placer la consommation sur un mauvais pied pour débuter 2023 ", a estimé dans une note Kieran Clancy, économiste pour Pantheon Macroeconomics, " les consommateurs commencent à réduire leurs dépenses non essentielles du fait d’un contexte économique incertain ".

Autre cause : la hausse des taux par la Fed, qui vient renchérir les coûts du crédit et limiter de fait les capacités de dépense tant des foyers américains que des entreprises.

" La consommation a fortement ralenti en novembre et décembre. La hausse des coûts de l’emprunt et un marché de l’emploi qui marque sensiblement le pas vont constituer des contraintes supplémentaires pour les consommateurs. Mais le ralentissement graduel de l’inflation devrait venir en soutien des ménages ", a estimé dans une note l’économiste en chef pour les États-Unis de HFE, Rubeela Farooqi.

C’est d’ailleurs ce qu’a préféré mettre en avant le président américain Joe Biden, pour qui les nouveaux chiffres représentent " de nouvelles preuves que nous faisons de vrais progrès dans la lutte contre l’inflation et la baisse des coûts, permettant une transition réussie entre un redressement historique de l’économie et une croissance stable et régulière ".

Car l’inflation est désormais en phase de ralentissement depuis plusieurs mois, à 6,5% sur un an au mois de décembre, selon l’indice des prix CPI dévoilé le 12 janvier.

Les ventes au détail aux États-Unis ont chuté pour un deuxième mois consécutif en décembre (AFP)

Une tendance qui devrait d’ailleurs se poursuivre, car les prix à la production étaient en baisse de 0,5% en décembre par rapport au mois précédent, alors que les analystes s’attendaient à un repli de 0,1%.

Sur un an, ces prix sont désormais en hausse de 6,2%, contre 7,3% un mois plus tôt, un élément supplémentaire dans le sens d’un atterrissage à venir de l’inflation.

" Certes une partie de la baisse s’explique par la volatilité de la demande finale sur l’énergie, ce qui vient relativiser la bonne nouvelle. Mais la tendance nous fait anticiper une croissance annuelle des prix à la production sous les 2% à la fin du premier semestre ", a pour sa part jugé Matthew Martin, économiste pour Oxford Economics.

Autre signe qui devrait être vu d’un bon œil par la Fed: la production industrielle a poursuivi aussi son recul, avec en plus un taux d’utilisation des capacités industrielles désormais en dessous de la moyenne calculée entre 1972 et 2021.

" Certains secteurs de l’économie sont plus touchés que d’autres et l’industrie semble s’orienter vers une légère récession, qui devrait débuter au deuxième trimestre cette année ", a pour sa part anticipé Ryan Sweet, chef économiste chez Oxford Economics.

Avec AFP