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‘’Exporter ou mourir’’: ce slogan, lancé par The Economist dans le temps, a été repris, depuis, par d’innombrables officiels de par le monde. C’est en particulier vrai pour les pays qui sont frappés par cette malédiction de chute de la monnaie nationale. Car ils devraient jouir d’un avantage préférentiel pour doper leurs exportations, vu que leurs coûts locaux, même s’ils augmentent, restent compétitifs en valeur dollar, et donc pour l’export.

Tout cela est vrai, prouvé et observé dans de nombreux cas. Alors pourquoi ce phénomène ne s’est pas produit au Liban? Même en l’absence de chiffres officiels actualisés, le total export a tout l’air de fluctuer toujours entre 3 et 4 milliards de dollars par an, le même ordre de grandeur depuis des années. Voyons donc ces causes de manquement qui, par leur définition même, donnent les solutions possibles.

1- Les pays du Golfe, particulièrement allergiques au Captagon et aux insultes, sont toujours fermés à nos produits (merci qui?). Et les comédies burlesques des autorités pour endiguer cette production font penser surtout au Tartuffe de Molière.

2- Les producteurs, surtout les agriculteurs et agro-industries, n’ont pas assez misé sur le marché européen par le passé. Un marché pourtant ouvert par l’accord Euromed. Ils disent que, contrairement aux marchés arabes, ils n’y ont pas assez de connexions avec les centrales d’achat. Résultat, on voit les oranges de Haïfa, bien moins bonnes que les nôtres et plus chères, remplir les étals en Europe.

3- Terminés les crédits bancaires, ce qui prive les industriels de fonds pour investir dans de nouvelles machines. Même les simples opérations bancaires sont devenues compliquées. Les initiatives privées, telles que Cedar Oxygen et d’autres promues par des organismes internationaux, n’ont pas encore produit un effet massif.

4- Et, plus largement, la réputation sulfureuse que le pays a acquise (encore merci, vraiment!) donne l’impression qu’il n’est plus fiable. D’où la propension de certains industriels à installer des unités de production à Chypre ou ailleurs pour garder leur clientèle internationale.

5- Ceci dit, une internationalisation de la production, en disséminant donc des unités un peu partout, n’est pas mauvaise en soi. Elle est économiquement justifiée, et pratiquée par toutes les grandes industries dans le monde. Ce n’est pas en s’isolant dans cette Suisse de 8 millions d’habitants que Nestlé aurait pu devenir le leader mondial dans son secteur.

6- La consommation interne a suivi une mutation depuis 2019 vers les produits locaux, en remplacement des produits européens devenus trop chers. Ce qui a amené les industriels à satisfaire en priorité ces besoins, aux dépens des exportations, une évolution normale. Sauf que cette stratégie libellée ‘industrie de remplacement’ a ses limites, vu la (petite) taille du marché interne, alors que l’autre option, ‘industrie d’export’, ouvre les portes du marché mondial. Nos ambassades devraient à ce propos sortir de leur léthargie légendaire. Idem pour les chambres de commerce et les fédérations professionnelles.

7- Malheureusement, la réduction des coûts généraux a été compensée par une facture d’énergie exorbitante, deux factures pour être précis. L’enchérissement récent de l’électricité étatique a alourdi encore plus ce poste de dépense, alors que sa fourniture, de piètre qualité, reste vacillante – le terme ‘’courant alternatif’’ n’a jamais aussi bien porté son nom.

8- L’effondrement annoncé de la CNSS a également rajouté une charge supplémentaire: d’un côté, les entreprises ne peuvent échapper aux cotisations étatiques, et de l’autre, elles se sentent obligées quand même d’offrir une couverture médicale privée à leurs employés. Une première dans le monde étrange de l’absurde absolu.

9- On oublie souvent, dans les histoires d’exportation, celles liées aux services, qui ont, historiquement, au moins autant d’importance que celles des produits. La liste ici est longue: services juridiques, informatiques, culturels, universitaires, financiers, culinaires, audiovisuels, touristiques… Des ‘produits’ qui ne demandent ni matière première, ni infrastructure lourde. Et c’est là donc que le potentiel peut être multiplié au souhait, alors que ces étroits d’esprit parmi les responsables, c’est-à-dire presque tous, ne voient que des bâtiments et des hangars comme preuve industrielle.

Évidemment, on se sent un peu ridicule à débattre de telles affaires alors que les responsables ont l’air, et l’esprit, complètement ailleurs. En plus de leurs préoccupations égocentriques, il faut maintenant qu’ils arrivent à résoudre cette énigme: où est donc passé le 128e bulletin de vote?!

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