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[audio mp3="https://icibeyrouth.com/wp-content/uploads/2023/07/On-peut-evaluer-lepaisseur-du-brouillard-sur-la-scene-locale-en-calculant-le-nombre-de-points.mp3"][/audio]
On peut évaluer l’épaisseur du brouillard sur la scène locale en calculant le nombre de points d’interrogation dans les titres de presse, dans votre journal télévisé, ou dans les commentaires de ces ‘observateurs-spécialistes’ invités dans les talk-shows. Il n’y a que ça en ce moment. On a dû à chaque fois demander à l’intervenant de relater ce qui risque de se passer. ‘’Mais je n’en sais rien,’’ dirait-il. ‘’Parfait, il faut le dire en dix minutes.’’
C’est exactement le cas actuellement dans l’histoire de l’héritage de la Banque centrale. Tous les scénarios ont été passés au crible sur les topics à la mode: prorogation, démissions, affaires courantes, successions, Sayrafa, taux de change, spéculation, etc.
Pour ne pas en rajouter encore, une couche de brouillard, voyons de près quelques constantes, plus quelques constatations à la lumière des faits du jour:
1- D’abord, une banque centrale ne peut pas résoudre une crise financière à elle toute seule, quel que soit le gouvernorat. Il faut que son action s’intègre dans un plan global, qui n’existe pas. Le vrai pouvoir est ailleurs, surtout dans un Liban pris en otage.
Mais une banque centrale est aussi un pilier essentiel, et le gouvernorat est l’une des fonctions les plus difficiles. On le voit bien quand le président de la Fed déclare, après la crise en 2008 et tout récemment après la chute de la Silicon Valley Bank, ‘’on aurait dû être plus vigilant, il faut qu’on améliore le système’’.
2- On est en train de conférer trop de crédit à cette plateforme qui s’appelle Sayrafa. C’est un outil qui devait servir à l’origine à réguler le marché de change et à limiter les dégâts. On sait qu’elle a parfois échoué, avant de réussir. Mais cette réussite, depuis trois mois, est toute relative, car c’est le contexte qui l’a permise, avec un apport en dollars frais qui s’est considérablement développé.
3- L’ère post-Salamé semble assez problématique. D’abord parce que les ‘vices’ ne semblent pas être sur la même longueur d’onde. L’un veut, dit-on, recourir à Bloomberg pour gérer la plateforme, ce qui est en soi farfelu. Comment peut-on privatiser une telle fonction critique et quelle mission précise peut-on lui donner?
L’autre veut la supprimer carrément, disant qu’elle n’est pas transparente, ce qui est aussi biscornu. Car en réalité, une banque centrale n’est pas toujours supposée déclarer au public, et aux spéculateurs, ce qu’elle compte faire. Ce sont ses outils de travail, ses armes de défense. Un commandant militaire ne dévoile pas les armes qu’il compte mettre en œuvre pour repousser une attaque.
Ajoutons à cela une indiscrétion qui dit que personne, parmi ces dauphins, ne sait exactement comment fonctionne Sayrafa, à part le gouverneur Salamé – et accessoirement Marianne Hoyek qui, oublions les affaires judiciaires, semble avoir des aptitudes remarquables.
Il n’empêche qu’une autre critique, celle-ci bien réelle, consiste à dire que Sayrafa profite, mis à part les fonctionnaires, à quelques privilégiés qui font de l’argent facile sur les opérations de change.
4- Un autre problème inhérent aux quatre héritiers du trône est leurs affiliations politiques respectives. Riad Salamé, quoi qu’on dise, n’était pas l’homme d’un zaïm particulier, du moins depuis Rafic Hariri, et encore.
La preuve, dans les plans gouvernementaux, comme dans les affaires quotidiennes, on n’a aucun scrupule à le laisser porter seul le chapeau de la dévaluation, de l’inflation, des difficultés bancaires, de la corruption, de la dette publique, de la famine en Afrique et du réchauffement climatique.
Bien sûr, il n’était pas immunisé contre le virus des interventions politiques. Mais qui l’était vraiment? Riad Salamé avait ses supporters politiques occasionnels, mais surtout beaucoup d’ennemis, ou ceux qui ont choisi de l’être.
Avec les quatre vices, c’est différent, leurs couleurs politiques sont déjà éclatantes, à défaut d’être resplendissantes. Cela est de nature à compliquer leur tâche surtout si on doit opter in fine pour une gouvernance collégiale. Ce qui est probable, car personne ne veut assumer seul – et personne ne veut que l’autre soit seul aux commandes. Les egos respectifs feront le reste.
Ces couleurs politiques donnent en plus d'allergies cutanées aux Américains. Car un gouverneur d’une banque centrale au Liban a une sensibilité particulière, vis-à-vis de cette lésion appelé le Hezbollah. Certains avaient cru percevoir des liaisons secrètes et dangereuses entre Riad Salamé et le Hezb, ce qui est grotesque: il aurait sauté depuis longtemps.
Or l’accord des Américains sur le gouvernorat est essentiel car ils peuvent tout simplement placer la BDL sur la liste noire, et c’en est fini des liaisons financières avec le monde. Les banques centrales iranienne et russe en ont fait l’expérience, et même l’irakienne à un moment donné.
Reste le mot de la fin. Comment on en est arrivé là? Certains croient au hasard du calendrier, à une coïncidence, ou à des impératifs quelconques. Beaucoup aussi croient au Père Noël, aux dragons, et aux sirènes. Pourtant la réalité est toute simple: c’est juste un autre pilier de la République qu’il faudrait déconstruire.
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On peut évaluer l’épaisseur du brouillard sur la scène locale en calculant le nombre de points d’interrogation dans les titres de presse, dans votre journal télévisé, ou dans les commentaires de ces ‘observateurs-spécialistes’ invités dans les talk-shows. Il n’y a que ça en ce moment. On a dû à chaque fois demander à l’intervenant de relater ce qui risque de se passer. ‘’Mais je n’en sais rien,’’ dirait-il. ‘’Parfait, il faut le dire en dix minutes.’’
C’est exactement le cas actuellement dans l’histoire de l’héritage de la Banque centrale. Tous les scénarios ont été passés au crible sur les topics à la mode: prorogation, démissions, affaires courantes, successions, Sayrafa, taux de change, spéculation, etc.
Pour ne pas en rajouter encore, une couche de brouillard, voyons de près quelques constantes, plus quelques constatations à la lumière des faits du jour:
1- D’abord, une banque centrale ne peut pas résoudre une crise financière à elle toute seule, quel que soit le gouvernorat. Il faut que son action s’intègre dans un plan global, qui n’existe pas. Le vrai pouvoir est ailleurs, surtout dans un Liban pris en otage.
Mais une banque centrale est aussi un pilier essentiel, et le gouvernorat est l’une des fonctions les plus difficiles. On le voit bien quand le président de la Fed déclare, après la crise en 2008 et tout récemment après la chute de la Silicon Valley Bank, ‘’on aurait dû être plus vigilant, il faut qu’on améliore le système’’.
2- On est en train de conférer trop de crédit à cette plateforme qui s’appelle Sayrafa. C’est un outil qui devait servir à l’origine à réguler le marché de change et à limiter les dégâts. On sait qu’elle a parfois échoué, avant de réussir. Mais cette réussite, depuis trois mois, est toute relative, car c’est le contexte qui l’a permise, avec un apport en dollars frais qui s’est considérablement développé.
3- L’ère post-Salamé semble assez problématique. D’abord parce que les ‘vices’ ne semblent pas être sur la même longueur d’onde. L’un veut, dit-on, recourir à Bloomberg pour gérer la plateforme, ce qui est en soi farfelu. Comment peut-on privatiser une telle fonction critique et quelle mission précise peut-on lui donner?
L’autre veut la supprimer carrément, disant qu’elle n’est pas transparente, ce qui est aussi biscornu. Car en réalité, une banque centrale n’est pas toujours supposée déclarer au public, et aux spéculateurs, ce qu’elle compte faire. Ce sont ses outils de travail, ses armes de défense. Un commandant militaire ne dévoile pas les armes qu’il compte mettre en œuvre pour repousser une attaque.
Ajoutons à cela une indiscrétion qui dit que personne, parmi ces dauphins, ne sait exactement comment fonctionne Sayrafa, à part le gouverneur Salamé – et accessoirement Marianne Hoyek qui, oublions les affaires judiciaires, semble avoir des aptitudes remarquables.
Il n’empêche qu’une autre critique, celle-ci bien réelle, consiste à dire que Sayrafa profite, mis à part les fonctionnaires, à quelques privilégiés qui font de l’argent facile sur les opérations de change.
4- Un autre problème inhérent aux quatre héritiers du trône est leurs affiliations politiques respectives. Riad Salamé, quoi qu’on dise, n’était pas l’homme d’un zaïm particulier, du moins depuis Rafic Hariri, et encore.
La preuve, dans les plans gouvernementaux, comme dans les affaires quotidiennes, on n’a aucun scrupule à le laisser porter seul le chapeau de la dévaluation, de l’inflation, des difficultés bancaires, de la corruption, de la dette publique, de la famine en Afrique et du réchauffement climatique.
Bien sûr, il n’était pas immunisé contre le virus des interventions politiques. Mais qui l’était vraiment? Riad Salamé avait ses supporters politiques occasionnels, mais surtout beaucoup d’ennemis, ou ceux qui ont choisi de l’être.
Avec les quatre vices, c’est différent, leurs couleurs politiques sont déjà éclatantes, à défaut d’être resplendissantes. Cela est de nature à compliquer leur tâche surtout si on doit opter in fine pour une gouvernance collégiale. Ce qui est probable, car personne ne veut assumer seul – et personne ne veut que l’autre soit seul aux commandes. Les egos respectifs feront le reste.
Ces couleurs politiques donnent en plus d'allergies cutanées aux Américains. Car un gouverneur d’une banque centrale au Liban a une sensibilité particulière, vis-à-vis de cette lésion appelé le Hezbollah. Certains avaient cru percevoir des liaisons secrètes et dangereuses entre Riad Salamé et le Hezb, ce qui est grotesque: il aurait sauté depuis longtemps.
Or l’accord des Américains sur le gouvernorat est essentiel car ils peuvent tout simplement placer la BDL sur la liste noire, et c’en est fini des liaisons financières avec le monde. Les banques centrales iranienne et russe en ont fait l’expérience, et même l’irakienne à un moment donné.
Reste le mot de la fin. Comment on en est arrivé là? Certains croient au hasard du calendrier, à une coïncidence, ou à des impératifs quelconques. Beaucoup aussi croient au Père Noël, aux dragons, et aux sirènes. Pourtant la réalité est toute simple: c’est juste un autre pilier de la République qu’il faudrait déconstruire.
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