Les infrastructures au Liban se dégradent rapidement en raison de l’absence de sens de responsabilité des responsables et des Libanais, en général.  

Les infrastructures publiques ont une "espérance de vie" souvent réduite au Liban. Des investissements lourds censés servir durant des décennies se dégradent en quelques années. Cela est d’actualité ces derniers temps du fait qu’il apparaît que les réseaux de télécoms du Liban se sont dégradés faute des fonds nécessaires pour assurer une bonne maintenance.

Les réseaux d’eau subissent le même sort. Idem pour les unités de production électrique. Pour ces dernières, le phénomène n’est pas nouveau. Elles subissent en effet depuis longtemps une dégradation accélérée car certaines d’entre elles (notamment celles de Zahrani et Deir Ammar) étaient supposées fonctionner au gaz. Or à défaut, elles ont utilisé depuis le début le mazout, ce qui a réduit leur espérance de vie. Et on parle là de milliards de dollars d’investissement initial, payé par les impôts et source de la dette croissante du Liban. Une incurie à laquelle on ajoute, là aussi, une maintenance insuffisante, toujours en raison d’un manque de devises fortes pour payer les pièces de rechange et les sociétés internationales qui sont chargées des opérations d’entretien.

Pour ne pas s’arrêter en si bon chemin, d’autres infrastructures insoupçonnées subissent depuis longtemps le même sort de dégradation accélérée, bien avant cette crise provoquée par un manque en devises. Prenons à titre d’exemple les routes, et spécifiquement, pour illustrer notre propos, l’autoroute du sud (Beyrouth-Khaldé-Saïda). Elle a été construite dans les années 1990 grâce à un investissement de plusieurs dizaines de millions de dollars, sans compter des frais s’élevant aussi à plusieurs dizaines de millions de dollars pour les expropriations des terrains.

À ce propos, on avait dit à l’époque que cette autoroute devait être ‘fermée’, c’est-à-dire sans accès direct des riverains, sauf par les sorties et les échangeurs réglementaires. Légalement, l’État peut utiliser jusqu’à 25% de votre terrain pour construire une route sans vous indemniser, considérant que ce qui reste sera plus cher du fait de la nouvelle route. Mais les propriétaires fonciers concernés, sachant qu’il s’agissait d’une autoroute ‘fermée’ et donc peu utile pour ce qui reste de leur terrain, se sont insurgés, puis ont exigé – et obtenu – une bonne compensation supplémentaire.

Une fois l’autoroute terminée, tout cela fut oublié et, avec l’appui de divers partis et milices locaux, les riverains ont entrepris d’effectuer des constructions au bord de l’autoroute : d’abord avec 20 mètres de recul, puis 10, puis 5, puis zéro, puis +1, c’est-à-dire qu’ils ont empiété sur la route avec des magasins et des constructions. Avec les étals de fruits qui s’étirent de plus en plus, l’automobiliste qui s’arrête pour acheter, le deuxième qui se met en double file, on a déjà occupé le quart de la largeur de l’autoroute. Pour occuper le reste, il est de coutume d’envoyer quelqu’un au beau milieu de la chaussée pour gesticuler et inciter ainsi les automobilistes à profiter de leurs produits.

Au train où se développe l’activité immobilière des deux côtés de cet axe routier, d’ici 10 à 15 ans l’autoroute ne sera plus qu’un lointain souvenir, transformée en souk populaire. On ira alors supplier les riches de ce monde : ‘’SVP, prêtez-nous de quoi construire une autre autoroute, celle-ci fait partie du passé’’.