Le président de l’Association des commerçants de Beyrouth, Nicolas Chammas, a demandé que le projet de loi imposant une taxe aux agents du secteur privé qui ont remboursé des prêts "à une valeur différente de la valeur réelle" soit retiré de la circulation, dénonçant sur ce plan "une politique injuste de deux poids, deux mesures".

À l’issue d’une réunion élargie des représentants des syndicats du secteur commercial, qui s’est tenue mardi au siège de l’Association des commerçants de Beyrouth, le président de l’Association, Nicolas Chammas, a dénoncé le projet de loi imposant "une taxe à toute personne qui a remboursé son prêt sur base d’une valeur différente de la valeur réelle", reprenant ainsi les termes utilisés dans le projet de loi.

M. Chammas s’est dit "surpris de voir le secteur privé, qui a remboursé ses prêts selon les lois et règlements en vigueur, être puni, alors que l’État, qui a failli au paiement de ses dettes, et qui est censé agir en bon père de famille, soit dispensé d’indemniser ses créanciers"

"L’objectif affiché de l’adoption de ce projet de loi, à savoir la création d’un Fonds de recouvrement des dépôts, qui est une priorité nationale absolue, ne pourra être atteint qu’à travers la reconnaissance de la responsabilité de l’État dans l’effondrement financier, et l’exploitation de ses actifs, conformément aux principes de bonne gouvernance, afin de sécuriser les ressources financières souhaitées, conformément à la feuille de route détaillée précédemment proposée par les organismes économiques", a déclaré M. Chammas, ajoutant que "l’État est le premier responsable des drames financiers vécus par les Libanais, notamment de l’essor du marché des chèques bancaires (qui est au cœur du problème des prêts remboursés), en raison d’une série d’erreurs, dont le défaut désordonné sur les euro-obligations et la déclaration de faillite en mars 2020".

"Le projet de loi proposé consacre, consciemment ou inconsciemment, la distinction entre l’ancien dollar (lollar) et le nouveau dollar (dollar frais), puisqu’il part du principe que leur valeur est complètement différente. Dans la pratique, le gouvernement a porté un coup sévère aux dépôts bancaires et a établi un précédent officiel. Cela anéantit les espoirs des déposants de récupérer leur argent, ce qui est paradoxalement l’opposé de l’objectif recherché par les auteurs de la loi", a-t-il martelé.

Selon Nicolas Chammas, le remboursement des prêts au cours des dernières années a été l’une des deux principales raisons de la reprise économique relative récente, car il a déchargé les entreprises de leur endettement et leur a ainsi donné les capacités financières pour investir, recruter du personnel, augmenter les salaires, relancer l’économie et améliorer les recettes fiscales. Faut-il casser cette dynamique vertueuse et ramener la réalité économique à la case départ?

Nicolas Chamams a souligné que "le comble de l’hérésie réside dans le fait d’aborder un seul aspect de la crise financière et économique, comme l’examen des passifs sans actifs ou des profits indépendamment des pertes", mettant l’accent par ailleurs sur le fait que "le secteur privé souffre de crises successives alors qu’il est soumis à une taxe sur des revenus fictifs du fait de l’inflation". "Les commerçants ont perdu beaucoup d’argent sur leurs créances en continuant pendant longtemps à payer des intérêts débiteurs alors que les intérêts créditeurs sur leurs dépôts et leur épargne dans les banques étaient nuls "

Dans le cadre du projet de loi, contrairement aux dispositions  du Code de la monnaie et du crédit, le chèque bancaire ne représente plus un moyen de paiement légitime, car il ne couvre plus la totalité du montant en espèces. Comment alors résoudre le dilemme des paiements (y compris les loyers) qui ont été payés pour une fraction de leur valeur et déposés chez des notaires en pleine légitimité?, s’est encore interrogé M.Chammas.

Il a enfin demandé que le projet de loi soit retiré de la circulation.