Alors que les pays du Moyen-Orient ne savent plus où donner de la tête à mesure que défilent les crises auxquelles ils doivent faire face, d’autres pays (non-arabes), influents et intéressés, s’invitent dans la course pour se positionner et renforcer davantage leur influence, une fois les règlements conclus.

Paradoxalement, tous les dirigeants de ces pays, sans aucune exception, ont parfaitement préparé leurs dossiers et affuté leurs arguments pour justifier leur recours à la force et à la violence, peu importe si ces arguments sont valides.  Peu importe également les tactiques utilisées par ces derniers pour arriver à leurs fins.

Partant, ce qui est admis et acceptable dans un dossier, sera réfuté dans un autre. Dans la même ligne, on se met d’accord au cas par cas pour conclure des accords ponctués par une rivalité par ici et une entente par là. Le sommet de Téhéran en est la parfaite illustration. Bien que le dossier syrien a été le sujet principal de ce sommet axé sur le retour à la paix en Syrie, cela n’implique pas pour autant l’absence d’un accord tacite sur le partage de ses territoires entre les parties prenantes, qui se disputent de plus en plus afin d’étendre leur contrôle là où elles le peuvent.

À vrai dire, ces contradictions ne gâchent pas les alliances potentielles. Les objectifs divergents entre la Turquie, l’Iran et la Russie n’ont pas empêché la tenue de ce sommet. Pas plus que le mutisme iranien suite à l’annonce par les autorités turques de l’arrestation de suspects iraniens, accusés d’avoir organisé et planifié l’assassinat d’Israéliens en Turquie, et leur déferrement devant la justice.

Ceci étant dit, l’Iran ne conteste pas les relations solides qu’entretiennent la Russie et la Turquie avec Israël.

Dans ce contexte, la synchronisation entre les Turcs et les Iraniens face aux Kurdes, reste la règle d’or, mais uniquement au nord de l’Iran et en Irak, tandis que l’Iran ne trouve pas d’inconvénient à ce que son allié syrien soit plus conciliant avec les Kurdes, qui dans ce cas, pourrait servir son combat contre les Américains et les Turcs.

De son côté, le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlüt Çavuşoğlu, affirme que son pays est tout à fait prêt à soutenir le régime syrien dans son affrontement contre les "Unités de protection du peuple kurde". Alors que la Turquie s’inquiète de l’indulgence russe à l’égard de la montée en puissance des Iraniens, dictée tout simplement par la guerre en Ukraine, les Russes et les Iraniens, quant à eux, ne se soucient pas outre mesure de la présence de la Turquie dans l’OTAN, tant qu’elle ne souscrit pas aux sanctions contre la Russie, comme elle le fait déjà pour l’Iran. De plus, Moscou s’apprêterait à accepter une médiation turque entre les Russes et les Ukrainiens, après avoir rejeté l’offre de médiation proposée par les Israéliens.

Toutefois, ces contradictions n’ont pas empêché l’émergence de ce nouvel axe bien avant le sommet de Téhéran et son maintien à son terme, de même qu’elles n’ont pas atténué le besoin impérieux de ces trois pays les uns des autres. Comment pourrait-il en être autrement au regard du chaos qui règne présentement sur la scène internationale?

Force est de constater que la coordination entre ces trois pays sur le dossier syrien, n’équivaut nullement à un changement de plans ou à une modification dans les objectifs militaires et stratégiques. À savoir que ceux-ci ne se limiteront pas à une zone géographique donnée, mais s’étendront – selon les besoins – à l’Irak, au Liban et à d’autres pays, si les intérêts imposent l’ouverture vers de nouveaux marchés pour exporter le gaz, en pleine crise européenne de l’énergie causée par la guerre en Ukraine.

Ainsi, comment pourrait-il en être autrement quand on sait que la fin justifie les moyens? Et, quand la politique passe d’un extrême à l’autre et fait tout et son contraire, et que les sensibilités, les affiliations et les valeurs sont les grands absents en ces moments historiques…

La région vit effectivement des moments historiques et l’occasion qui se trouve à sa portée à l’heure actuelle ne se représentera pas. Cependant, si la guerre d’usure se poursuit, que la violence s’exacerbe, et qu’aucune solution viable n’est trouvée, celui qui aura su profiter de ce moment aura remporté des gains substantiels et renforcé sa position.

En réalité, ce qui compte, c’est de savoir qui sont les gagnants, et de quelle manière ils vont bénéficier de ces règlements une fois conclus. En outre, les victorieux seront peu soucieux de ce que l’Histoire rapportera comme des crimes contre l’humanité commis à cette période.

Et bien évidemment, ni les pays ni les dirigeants concernés, ni même l’Histoire, auront des considérations pour les peuples affligés, qui seront les seuls à payer la facture salée de ces moments historiques.