©Dès son arrivée sur l'île de Chypre, le pape François se rend chez les Maronites.
Dès son arrivée à Chypre, le 2 décembre dernier, le pape François s'est rendu à la rencontre des Maronites de l'île venus l’accueillir avec leur patriarche Béchara Raï. Le chef de l’Eglise maronite, venu du Liban voisin, était accompagné de l’évêque actuel de Chypre, Mgr Selim Jean Sfeir, et de l’évêque Youssef Antoine Soueif. Ce dernier, aujourd’hui en charge de l'évêché de Tripoli, fut évêque de Chypre de 2008 à 2021. C’est dire son attachement à ce peuple dont il fait désormais partie. A l’occasion de la récente visite du pape, il partage avec Ici Beyrouth, les craintes et les espoirs qu’il a vécu avec ses fidèles durant 13 années sur cette île divisée.
Le patriarche Béchara Raï a tenu à accueillir, en personne, le pape François pour cette première visite pontificale à Chypre depuis Benoit XVI, il y onze ans, en 2010. Le patriarche était alors accompagné de Mgr Soueif dont le cœur bât toujours au rythme de cette île qui fait face à son diocèse actuel de Tripoli. Cet évêque, originaire de Chekka (caza de Batroun, au Liban-Nord) a appris à découvrir les fidèles maronites et orthodoxes tant au pays du Cèdre qu’à Chypre, aussi bien montagnards qu’insulaires. Un entretien avec lui en marge de la visite du Saint Père est un moment intense et fort émouvant. Et pour cause : il porte en lui et transmet les souffrances et les espérances des populations du Liban, comme celles des Chypriotes.
Chypre le marque profondément et les Maronites de l'île habitent son cœur et sa foi de pasteur. Mgr Soueif assiste, jour après jour, aux dangers qui les menacent et aux conditions qui mettent leur existence en péril. Plus que quatre villages presque inhabités, et plus que quelques milliers de fidèles déracinés du nord de l’île et dispersés sur sa moitié sud. Avant l’invasion turque du 16° siècle, leur nombre dépassait, selon le patriarche Estéphanos Douayhi, les
60 000, répartis sur une soixantaine de villages.
Une organisation ecclésiastique
L’histoire de ces Chypriotes maronites remonterait aux 8°-9° siècles, nous indique l'évêque, qui cache mal la douleur de la compassion paternelle due à leur situation. Ces familles sont arrivées en même temps que les Jacobites (syriaques orthodoxes), les Assyriens (syriaques orientaux) et les Arméniens fuyant les invasions arabes. Elles seraient venues des régions septentrionales de la Syrie et du Liban. Leur nombre augmenta considérablement lors des retraits des Croisés au 13° siècles, lorsque Francs et Maronites vinrent y trouver refuge auprès des Lusignan, rois de Jérusalem.
Les Maronites auraient constitué à cette époque la seconde communauté de Chypre. Bien avant l’arrivée des Francs en 1191, et dès 1121, les Maronites disposent déjà d’une organisation ecclésiastique sur l’île. Un document patriarcal manuscrit en atteste. Il confie à des moines les soins de la population maronite et nomme un supérieur au couvent Saint-Jean de Coutsovendi. La communauté ne cesse de croître et de se développer notamment avec l’arrivée de nouveaux réfugiés du Liban suite à la chute du comté de Tripoli en 1289. En 1316, elle est constituée en diocèse et dotée d’un évêque. Au 15° siècle, c’est l’illustre savant maronite Gabriel Barcleieus (1447-1516) qui est nommé pour prendre en charge ce diocèse, et en 1735, l’Ordre Libanais Maronite y fonde un monastère et une école.
L'oppression ottomane
Après le génocide mamelouk qui fit fuir les Maronites à partir de Byblos, Batroun et Tripoli vers Chypre à la fin du 13° siècle, c’est l’invasion turque qui les surprend à nouveau sur l’île même, dès 1570. Une série de massacres réduit leur nombre de plusieurs milliers. Durant la période ottomane, le nombre de leurs villages passe de 60 à 39. Le patriarche Estéphanos Douayhi, évêque de Chypre entre 1668 et 1670, relate les terribles épreuves endurées par ses fidèles. Massacres, oppressions, destructions des villages, églises et monastères ; ce que les Mamelouks firent dans les montagnes du Liban, les Ottomans le perpétrèrent sur l’île.
Mais c’est probablement l’invasion turque de 1974 qui met fin, presque, à cette présence millénaire. Les villages maronites sont intégralement situés dans le nord de l’île, désormais occupé. Ils sont tous abandonnés ainsi que leurs vastes territoires. Avant cette invasion, il n’existait déjà plus que quatre villages sur les 60 que comptait autrefois la région. Leur population s’élevait à 5000 âmes. Aujourd’hui, ils ne comptent plus que quelques centaines de personnes âgées. Tous les Maronites ont fui vers la partie chrétienne au sud, où leur faculté d’adaptation les dissout progressivement au sein de la communauté grecque. Ce sont ces quatre derniers villages que Bkerké tente encore de préserver. Kormakitis, Asomatos, Aya Marina et Karpasia sont des villes fantômes. Leurs fils ne peuvent s’y rendre qu’après l’obtention d’une autorisation et pour des tâches bien déterminées et à marges limitées.
Et pourtant, les évêques maronites de Chypre ont été depuis toujours fort confiants. Cette île a toujours bénéficié des plus illustres symboles de l’Eglise maronite à la tête de son diocèse. Depuis le savant Gabriel Barcleius au 15° siècle, et le futur patriarche Estéphanos Douayhi au 17° siècle, jusqu’aux évêques contemporains Boutros Gemayel, Youssef Antoine Soueif et Selim Jean Sfeir, tous accompagnent leurs actions concrètes par leurs prières et leur foi inébranlable dans le mystère de l’espérance.
Le patriarche Béchara Raï a tenu à accueillir, en personne, le pape François pour cette première visite pontificale à Chypre depuis Benoit XVI, il y onze ans, en 2010. Le patriarche était alors accompagné de Mgr Soueif dont le cœur bât toujours au rythme de cette île qui fait face à son diocèse actuel de Tripoli. Cet évêque, originaire de Chekka (caza de Batroun, au Liban-Nord) a appris à découvrir les fidèles maronites et orthodoxes tant au pays du Cèdre qu’à Chypre, aussi bien montagnards qu’insulaires. Un entretien avec lui en marge de la visite du Saint Père est un moment intense et fort émouvant. Et pour cause : il porte en lui et transmet les souffrances et les espérances des populations du Liban, comme celles des Chypriotes.
Chypre le marque profondément et les Maronites de l'île habitent son cœur et sa foi de pasteur. Mgr Soueif assiste, jour après jour, aux dangers qui les menacent et aux conditions qui mettent leur existence en péril. Plus que quatre villages presque inhabités, et plus que quelques milliers de fidèles déracinés du nord de l’île et dispersés sur sa moitié sud. Avant l’invasion turque du 16° siècle, leur nombre dépassait, selon le patriarche Estéphanos Douayhi, les
60 000, répartis sur une soixantaine de villages.
Une organisation ecclésiastique
L’histoire de ces Chypriotes maronites remonterait aux 8°-9° siècles, nous indique l'évêque, qui cache mal la douleur de la compassion paternelle due à leur situation. Ces familles sont arrivées en même temps que les Jacobites (syriaques orthodoxes), les Assyriens (syriaques orientaux) et les Arméniens fuyant les invasions arabes. Elles seraient venues des régions septentrionales de la Syrie et du Liban. Leur nombre augmenta considérablement lors des retraits des Croisés au 13° siècles, lorsque Francs et Maronites vinrent y trouver refuge auprès des Lusignan, rois de Jérusalem.
Les Maronites auraient constitué à cette époque la seconde communauté de Chypre. Bien avant l’arrivée des Francs en 1191, et dès 1121, les Maronites disposent déjà d’une organisation ecclésiastique sur l’île. Un document patriarcal manuscrit en atteste. Il confie à des moines les soins de la population maronite et nomme un supérieur au couvent Saint-Jean de Coutsovendi. La communauté ne cesse de croître et de se développer notamment avec l’arrivée de nouveaux réfugiés du Liban suite à la chute du comté de Tripoli en 1289. En 1316, elle est constituée en diocèse et dotée d’un évêque. Au 15° siècle, c’est l’illustre savant maronite Gabriel Barcleieus (1447-1516) qui est nommé pour prendre en charge ce diocèse, et en 1735, l’Ordre Libanais Maronite y fonde un monastère et une école.
L'oppression ottomane
Après le génocide mamelouk qui fit fuir les Maronites à partir de Byblos, Batroun et Tripoli vers Chypre à la fin du 13° siècle, c’est l’invasion turque qui les surprend à nouveau sur l’île même, dès 1570. Une série de massacres réduit leur nombre de plusieurs milliers. Durant la période ottomane, le nombre de leurs villages passe de 60 à 39. Le patriarche Estéphanos Douayhi, évêque de Chypre entre 1668 et 1670, relate les terribles épreuves endurées par ses fidèles. Massacres, oppressions, destructions des villages, églises et monastères ; ce que les Mamelouks firent dans les montagnes du Liban, les Ottomans le perpétrèrent sur l’île.
Mais c’est probablement l’invasion turque de 1974 qui met fin, presque, à cette présence millénaire. Les villages maronites sont intégralement situés dans le nord de l’île, désormais occupé. Ils sont tous abandonnés ainsi que leurs vastes territoires. Avant cette invasion, il n’existait déjà plus que quatre villages sur les 60 que comptait autrefois la région. Leur population s’élevait à 5000 âmes. Aujourd’hui, ils ne comptent plus que quelques centaines de personnes âgées. Tous les Maronites ont fui vers la partie chrétienne au sud, où leur faculté d’adaptation les dissout progressivement au sein de la communauté grecque. Ce sont ces quatre derniers villages que Bkerké tente encore de préserver. Kormakitis, Asomatos, Aya Marina et Karpasia sont des villes fantômes. Leurs fils ne peuvent s’y rendre qu’après l’obtention d’une autorisation et pour des tâches bien déterminées et à marges limitées.
Et pourtant, les évêques maronites de Chypre ont été depuis toujours fort confiants. Cette île a toujours bénéficié des plus illustres symboles de l’Eglise maronite à la tête de son diocèse. Depuis le savant Gabriel Barcleius au 15° siècle, et le futur patriarche Estéphanos Douayhi au 17° siècle, jusqu’aux évêques contemporains Boutros Gemayel, Youssef Antoine Soueif et Selim Jean Sfeir, tous accompagnent leurs actions concrètes par leurs prières et leur foi inébranlable dans le mystère de l’espérance.
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