Quatre membres du Service de sécurité de l’État ont été arrêtés après la mort d’un Syrien sous la torture.

Le Liban aura du mal cette fois à se justifier face aux accusations de torture lancées régulièrement contre lui. Et ce n’est sûrement pas la mise en garde à vue de quatre agents du Service de sécurité de l’État, soupçonnés d’avoir torturé à mort un prévenu syrien, qui va l’aider à convaincre toutes les ONG internationales qui l’ont à l’œil, que ses services de sécurité n’ont pas recours à des pratiques inhumaines.

Le 31 août 2022, un Syrien, Bachar Abdel Saoud, soupçonné de liens avec des jihadistes terroristes, a été interpellé et transféré dans un centre de détention de Bint Jbeil, dans le sud du Liban, avec d’autres suspects. Il est " mort trois heures après son arrestation " et a " été soumis à de graves tortures et à des chocs ayant entraîné une crise cardiaque ", a indiqué à l’AFP une source judiciaire.

Selon cette source, les membres du Service de sécurité de l’État ont voulu " obtenir des aveux du suspect " soupçonné de " diriger une cellule " affiliée au groupe jihadiste État islamique (EI). Des images vues par l’AFP montrent le corps de Bachar Abdel Saoud couvert d’ecchymoses et d’entailles. Des traces de torture étaient également visibles sur les corps de ses codétenus, soupçonnés aussi d’appartenir à l’EI.

La nouvelle du décès du prévenu syrien a suscité un vif émoi auprès des ONG de défense des droits de l’homme ainsi que dans certains milieux politiques. Samedi, le député Ibrahim Mneymné a appelé à la dissolution du Service de sécurité de l’État et a fait assumer à "la présidence du Conseil dont relève cet organe, la responsabilité du crime odieux". Il a en outre jugé nécessaire de "mettre en place des mesures concrètes à l’encontre du Service de sécurité de l’État dont les scandales se sont multipliés au cours des dernières années, que ce soit à travers les accusations montées de toutes pièces contre des Libanais ou les plaintes de torture consignées auprès des autorités judiciaires libanaises compétentes et des associations de défense des droits de l’homme".

Une source de ce service de sécurité, citée par l’agence Al-Markaziya, a fait état de l’arrestation d’un officier et de trois agents, pour les besoins de l’enquête, en indiquant qu’au terme de celle-ci, la direction du Service de sécurité de l’État "infligera les sanctions les plus sévères aux coupables". "Leurs agissements ne ressemblent en rien au service qui s’est tenu en permanence durant la crise aux côtés du citoyen libanais", selon la source. Celle-ci a indiqué que "les prévenus appartenaient au groupe terroriste de l’EI" et que "leurs aveux vont être rendus publics", sachant que, selon les associations de défense des droits de l’homme, ils avaient été soutirés sous la torture.

Les quatre membres du Service de sécurité de l’État ont été placés en garde à vue sur ordre du " juge Fadi Akiki, commissaire du gouvernement près le tribunal militaire ", selon la source citée par l’AFP.

Malgré l’adoption d’une loi au Liban contre la torture, en septembre 2017, les services de sécurité libanais ont déjà été accusés d’avoir recours à la torture. En mars 2021, Amnesty international avait dénoncé des détentions arbitraires et " des actes de torture " infligés à une vingtaine de réfugiés syriens, dont des mineurs. L’ONG avait aussi fait état de " traitements cruels et discriminatoires " des services de sécurité libanais.