Au terme d’un débat par moments houleux, le Parlement, qui a planché sur la lettre envoyée dimanche par l’ancien président Michel Aoun, a adopté une décision dans laquelle il a demandé au chef du gouvernement sortant de continuer à expédier les affaires courantes en vertu de la Constitution. Par ailleurs, à l’issue de la séance, le président de la Chambre Nabih Berry a convoqué une séance électorale le jeudi 10 novembre.

À sa sortie de l’hémicycle, le député des Forces libanaises, Georges Adwan a réitéré l’appel de son parti à élire un président de la République, soulignant " que c’est la seule solution à la crise actuelle ". Quant au chef du Courant patriotique libre (CPL), Gebran Bassil, il a tiré à boulets rouges contre le Premier ministre Najib Mikati qui selon lui, ne veut pas former un gouvernement.

La séance parlementaire consacrée à la lecture de la lettre adressée dimanche par l’ancien président de la République Michel Aoun au Parlement avait débuté jeudi à 11h alors que les députés du parti Kataëb, Michel Moawad, Achraf Rifi, ainsi que ceux dits du changement se sont retirés de la séance.

Ces derniers dénoncent le caractère anticonstitutionnel de la séance. Le chef du parti Kataëb, le député Samy Gemayel a affirmé après sa sortie de l’hémicycle, que " la Chambre des députés est un collège électoral selon l’article 75 de la Constitution, et ne peut donc qu’élire un président de la République ". Il a également critiqué l’ancien chef de l’État, soulignant que " sa lettre a pour objectif de provoquer un problème dans le pays ".

Même son de cloche chez Achraf Rifi qui a dénoncé " le contenu empoisonné de la lettre ". Et d’ajouter : " La Constitution est claire : le retour à l’ordre public commence par l’élection d’un président de la République. "

Au début de la séance, Melhem Khalaf, député du changement, a rappelé qu’en vertu de la Constitution, le Parlement est un collège électoral et ne peut pas débattre d’autres sujets. Selon lui, Michel Aoun n’est plus président ce qui " ôte toute signification à la lecture de la lettre qu’il a envoyée ". Il a ensuite annoncé la décision prise par les députés dits du changement de se retirer de la séance " anticonstitutionnelle ".

Abondant dans le même sens, Michel Moawad, député de Zghorta et candidat à la présidentielle, a estimé que le but de cette séance est de provoquer " un clivage communautaire, ce que nous refusons ". " Comme la Chambre est réunie, élisons un président ", a-t-il martelé.

Un même discours a été tenu par Waddah Sadek, qui a déclaré que cette lettre ne doit pas être lue maintenant. Marwan Hamadé a estimé pour sa part que " la missive présidentielle est enterrée avec la fin du mandat ", affirmant que le Premier ministre doit continuer à présider le gouvernement d’expédition des affaires courantes. Et d’ajouter que cette lettre a pour objectif de " perturber ". Ce à quoi le président de la Chambre, Nabih Berry, a répondu qu’il appliquait la loi.

Les députés dits du changement ont également publié un communiqué explicatif abondant dans le même sens suite à leur retrait.

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Dimanche, avant son départ, Michel Aoun a adressé une lettre au Parlement – l’une des prérogatives du président de la République – demandant à la Chambre de retirer au Premier ministre désigné Najib Mikati le mandat en vertu duquel il avait été chargé de former un gouvernement.

L’article 145 du règlement intérieur de la Chambre prévoit en effet que lorsque le président de la République adresse une lettre au Parlement par l’intermédiaire de son président, comme c’est le cas actuellement, le chef du législatif doit convoquer les députés à une séance dans un délai de trois jours pour débattre du message et prendre la décision ou les mesures qui s’imposent.

Les députés contestataires s’étaient réunis lundi soir au QG du parti Kataëb à Saïfi pour s’entretenir sur l’échéance présidentielle et la séance parlementaire de jeudi. Étaient présents Samy Gemayel, Rami Fanj, Adib Abdel-Massih, Ihab Matar, Walid Baarini, Salim el-Sayegh, Achraf Rifi, Mohamad Sleiman, Marc Daou, Najat Saliba, Nehmat Frem, Abdel Aziz el-Samad, Sajih Attieh, Ahmad el-Kheir, Nabil Badr, Michel Daher, Fouad Makhzoumi, Imad el-Hout, Bilal el-Hocheimy, Ghassan Skaff, Waddah el-Sadek, Nadim Gemayel, Jean Talouzian, Jamil Abboud, Ahmad Rustom, Elias Hankache et Michel Moawad.