L’une des problématiques essentielles du Liban – et probablement celle qui fait couler le moins d’encre – est le désenchantement sunnite, qui ressemble au tristement célèbre " ihbât " chrétien de l’après-guerre.
L’un des signes les plus révélateurs de cette nouvelle condition sunnite au Liban est un certain déclin de l’influence sunnite sur la vie politique du pays, en raison notamment de l’absence de l’ancien Premier ministre Saad Hariri, actuellement aux Émirats arabes unis, et de son indécision à retourner au Liban pour mener la bataille des prochaines législatives à la tête du courant du Futur.
C’est dans ce contexte que l’ancien Premier ministre Fouad Siniora a entamé mercredi une visite privée aux Émirats, pour rencontrer M. Hariri et discuter avec lui d’un certain nombre de dossiers, mais aussi et surtout de clarifier sa position concernant son retour éventuel au Liban avant les élections prévues au printemps prochain. Selon des sources proches du dossier, M. Siniora a initié ses entretiens avec M. Hariri dès son arrivée à Abou Dhabi, " dans un climat faisant état d’une volonté du chef du courant du Futur de renoncer à se porter candidat aux élections ".
M. Siniora doit également exposer à M. Hariri les résultats de sa rencontre, aux côtés des anciens présidents de la République Amine Gemayel et Michel Sleiman et de l’ancien Premier ministre Tammam Salam avec le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, lors de la visite de ce dernier au Liban.
M. Guterres aurait indiqué devant les anciens responsables que " le Liban se trouve dans un état lamentable et que les leaders libanais doivent entreprendre toutes les démarches nécessaires pour le salut du pays ". " Aucune force étrangère ne peut obliger le Hezbollah à se conformer aux résolutions internationales, notamment la 1559 et la 1701, qui font mention du désarmement des milices et du rétablissement du monopole de la violence légitime. Nous savons que les Libanais sont incapables de régler la question des armes du Hezbollah de par eux-mêmes et il est nécessaire de trouver une solution à ce problème ", a reconnu le responsable onusien.
Selon l’un des participants à la rencontre, il se dégage des entretiens que la problématique du Hezbollah au Liban reste intimement liée aux résultats du dialogue en cours à Vienne entre la communauté internationale et l’Iran. Mais rien ne prouve pour l’heure que ce dialogue produira des résultats concrets à même de conduire à une modification de l’équation au Liban. Le mieux que l’on puisse espérer pour l’instant, précise cette source, est un compromis temporaire qui conduira à la levée partielle des sanctions US contre Téhéran et la " libération " de certains crédits iraniens gelés, qui sont estimés à près de 200 milliards de dollars, en contrepartie de l’arrêt par l’Iran de l’enrichissement de l’uranium pendant une durée de 6 à 9 mois. Suite à quoi il y aurait un retour à la table des négociations pour étudier la possibilité d’un nouveau compromis entre l’Occident et Téhéran.
Les anciens responsables avaient remis un mémorandum au secrétaire général de l’ONU appelant la communauté internationale à se solidariser avec le Liban dans sa volonté de libérer son territoire, préserver son rôle et ses ressources, rejeter les armes illégales et rétablir la souveraineté de l’Etat sur l’ensemble de son territoire et le monopole de la violence légitime, et empêcher tout compromis régional ou international qui ne tiendrait pas compte de la souveraineté, l’indépendance, la liberté et du régime démocratique parlementaire du Liban.
Le mémorandum appelle également au respect de la Constitution, de l’accord de Taëf, de l’appartenance arabe du Liban, des résolutions internationales 1559, 1680 et 1701 et de la déclaration de Baabda pour la neutralité du Liban, ainsi qu’à la tenue des élections législatives et présidentielle dans les délais impartis par la Constitution.