Pour Riyad, un président devrait être élu sans tarder au Liban.

L’important dans la visite du chef des Marada Sleiman Frangié auprès de l’ambassadeur d’Arabie saoudite Walid Boukhari, jeudi matin, reste la forme. Parce qu’elle s’inscrit dans la logique même du discours immuable de Riyad au sujet de la présidentielle libanaise et barre la voie, de ce fait, à toute interprétation possible de l’entretien entre les deux hommes.

M. Boukhari, qui effectue une tournée auprès des responsables politiques et religieux depuis son retour à Beyrouth après la fête du Fitr, a choisi d’accueillir chez lui le candidat de la Moumanaa (Hezbollah et Amal) à la tête de l’État et non pas de se rendre chez lui.

Dans les milieux proches de Bnechii, on indique que des raisons de sécurité, le programme chargé de l’ambassadeur à Beyrouth, ainsi qu’une volonté saoudienne de barrer la voie à toute interprétation de ce déplacement sont derrière la décision de M. Boukhari de ne pas se rendre auprès du chef des Marada.

Dans le camp du 8 Mars, on sous-estime cependant l’importance de la forme qu’a prise la rencontre Boukhari-Frangié pour tabler sur le fond. Dans les cercles proches de ce camp, on soutient que cet entretien dément les informations selon lesquelles Paris a renoncé, à cause d’un veto saoudien, à son initiative visant à encourager les différentes parties libanaises à s’entendre une formule consistant à élire M. Frangié à la tête de l’État, en contrepartie de la nomination d’un Premier ministre proche de l’opposition.

La vérité est bien plus nuancée et l’attitude de la représentation diplomatique du royaume très subtile. Son importance réside dans le fait qu’elle correspond exactement au discours de M. Boukhari. Le diplomate souligne régulièrement, aussi bien lors de ses entretiens avec les officiels libanais que dans ses déclarations à la presse, que son pays n’oppose de veto contre aucun candidat et qu’il appartient aux Libanais de s’entendre sur un candidat à la tête de l’État. Il a développé les mêmes idées devant son hôte.

C’est exactement ce qu’il a voulu démontrer en s’entretenant avec M. Frangié. Mais en choisissant de l’accueillir chez lui, plutôt que de se déplacer à Bnechii, M. Boukhari a voulu quand même éviter de donner au camp du 8 Mars la possibilité d’exploiter sa visite au profit de la promotion de son candidat. Il a surtout voulu montrer qu’il établit une distinction entre le candidat de la Moumanaa (l’axe syro-iranien) et le reste des responsables politiques auprès de qui il se rend.

Une voie de sortie

Pour le député Achraf Rifi, membre du bloc Tajaddod, il s’agit d’une visite de pure forme "destinée à assurer à Sleiman Frangié une sortie de la course à la présidentielle". "Si Sleiman Frangié avait des chances sérieuses (d’être élu), l’ambassadeur d’Arabie se serait rendu auprès de lui", a-t-il commenté à ce sujet dans une déclaration à la radio, en faisant état d’informations selon lesquelles cette visite serait le fruit d’une intervention de la France et d’autres personnalités.

Le fait qu’il s’agisse d’un entretien de pure forme est également relevé par d’autres sources de l’opposition, qui mettent en relief le ton laconique employé par M. Frangié, pour commenter ses échanges avec le diplomate saoudien. Sur son compte Twitter, le chef des Marada a remercié M. Boukhari pour "l’invitation" qu’il lui a adressée avant d’ajouter: "La rencontre était amicale et excellente".

Dans les milieux proches de l’Arabie saoudite, on insiste sur le fait que le royaume reste "ouvert à tous" et que sa position demeure inchangée par rapport au Liban et au dossier de la présidentielle.

Riyad estime qu’il appartient aux Libanais d’engager une dynamique pour tenter de s’entendre sur un candidat "dont le profil serait compatible avec la personnalité qui doit diriger le gouvernement formé une fois le chef de l’Etat élu". En gros, une personnalité intègre, souverainiste et capable de lancer un chantier de réformes sérieuses pour tirer le Liban de la crise dans laquelle il est plongé. C’est en fonction de ce choix que Riyad et la communauté internationale en général détermineront leur position par rapport au Liban.

L’ambassadeur Boukhari devait réitérer les principes mis en avant par son pays, durant la réunion qu’il a tenue avec les membres du bloc de la Modération nationale, Walid Baarini, Mohammad Sleiman, Sajih Attiyé, Ahmad Rustom, Abdel Aziz Samad, Ahmad Kheir et l’ancien député Hadi Hobeiche, en leur bureau à Saïfi.

Selon des sources proches des personnes réunies, M. Boukhari a réaffirmé que son pays n’a de veto contre personne et que le Liban devrait sans tarder élire un président de la République.

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