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En ce triste troisième anniversaire de l’explosion dévastatrice au Port de Beyrouth, et alors que le dossier judiciaire semble être à l’arrêt au Liban, le premier espoir offert aux victimes et à leurs parents est venu de l’étranger. C’est un tribunal anglais (la High Court of Justice) qui a condamné l’un des coresponsables de la catastrophe, la société Savaro Ltd, à réparer le préjudice causé aux victimes parties au procès. Ce qui n’était qu’une simple information médiatique est ainsi devenu une " vérité judiciaire " irréfutable ; et l’un des maillons de la chaîne des responsabilités est maintenant définitivement identifié. C’est par de petits acquis pareils, maillon après maillon, que la chaîne peut être démantelée et tous les responsables condamnés. En trois ans, c’est le premier jugement définitif auquel les victimes peuvent s’accrocher. Le Professeur Nasri Diab, qui a mené le dossier avec des confrères du Bureau d’accusation de l’Ordre des avocats de Beyrouth, retrace les différentes étapes, et le long et minutieux travail, qui ont rendu possible cette première victoire.

Le lundi 12 juin 2023, a pris fin à Londres un long processus que le Bureau d’accusation de l’Ordre des avocats de Beyrouth avait entamée trente mois plus tôt, et qui a duré de janvier 2021 à juin 2023. Durant cette période, les avocats travaillant, pro bono, au sein du Bureau d’accusation ont mis toutes leurs ressources au service des victimes de la plus grande explosion non nucléaire de l’histoire et ce, dans le cadre d’un procès civil présenté devant la Haute Cour de Justice (High Court of Justice) à Londres contre la société anglaise Savaro Ltd.

La société Savaro Ltd. est une société anglaise " effective " (et non pas " fictive "). Elle avait été constituée en 2006 et, quelques mois après l’explosion du port de Beyrouth, ses actionnaires ont tenté (en janvier 2021) de la liquider. Auparavant, la société avait nommé un avocat au Liban, après le déchargement de la cargaison de nitrate d’ammonium dans le Port de Beyrouth en 2013, et elle avait présenté des requêtes judiciaires et formulé des demandes administratives à Beyrouth. Après que nous ayons intenté le procès contre elle à Londres, elle a chargé un cabinet d’avocats anglais de la défendre devant le tribunal anglais ; elle a participé activement à l’instance, présenté des conclusions et assisté à des audiences.

Par ailleurs, durant le procès de Londres, ses actionnaires ont transféré la propriété de leurs actions à un ressortissant ukrainien, résidant en Ukraine, comme ceci est établi dans le dossier de la société auprès du Registre de commerce anglais. Tout cela ne concorde nullement avec une société " fictive ", ni avec une société qui n’a aucune relation avec l’explosion du Port de Beyrouth, ni avec une société qui ne se serait pas défendue devant les tribunaux, comme certains se plaisent à le répéter. La société Savaro Ltd. est donc bel et bien " effective ", et le procès à Londres a été contradictoire (et non pas  " in abstentia " ).

Le jugement final contre Savaro

La Haute Cour de Justice de Londres a donc rendu, en juin 2023, un jugement définitif, par lequel elle a condamné la société Savaro à indemniser les victimes et leurs ayants droit demandeurs au procès, et elle a déterminé le quantum de ces indemnités après qu’elle eût rendu, en février 2023, un premier jugement établissant la responsabilité civile de cette société.

Comme je l’ai affirmé au juge anglais Master Eastman à la fin de l’audience du 12 juin 2023 à laquelle j’ai assisté, dans le vénérable bâtiment situé sur Strand, et qui abrite plusieurs juridictions (the Royal Courts of Justice), ce qui importe n’est pas tant d’obtenir une indemnité financière pour des dommages moraux insusceptibles de dédommagement, que de parvenir à la vérité, même partiellement; de voir que justice est faite, même de manière incomplète; et de donner aux familles des victimes l’espoir que le droit prévaudra. Et j’ai affirmé au juge que son premier jugement, rendu en février 2023, qui avait établi la responsabilité civile de la société Savaro à l’égard des victimes, était suffisant en soi pour rassurer les victimes que le dossier de l’explosion du Port de Beyrouth ne sera pas " enterré ".

Poursuivre les personnes impliquées

Immédiatement après l’explosion du port du 4 août 2020, le Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Beyrouth de l’époque, Melhem Khalaf, avait mobilisé toutes les ressources de l’Ordre au service des victimes. Après un long travail, les avocats volontaires ont pu compléter près de 1200 dossiers, avec l’aide de médecins et d’experts fonciers, également volontaires, qui ont établi des rapports médicaux et des rapports relatifs aux dégâts matériels. En octobre 2020, une plainte a été présentée devant le Procureur général près la Cour de cassation. Après que le nombre des avocats volontaires se soit stabilisé et qu’ils aient affirmé leur intention de poursuivre le dossier de l’explosion du Port jusqu’au bout, l’Ordre des avocats a institué le " Bureau d’accusation ", qui est présidé par le Bâtonnier (à l’époque Melhem Khalaf et aujourd’hui Nader Gaspard, qui a accordé toute sa confiance et son soutien au Bureau) et dont fait partie un nombre fixe d’avocats.

La philosophie du Bureau d’accusation était, et n’a pas varié, que la confiance dans la justice libanaise est une priorité et que la reconstruction de l’Etat nécessite que la justice soit rendue par les tribunaux nationaux. Mais, en parallèle, il a été convenu de tenter de poursuivre toutes les personnes impliquées dans l’explosion du Port devant des juridictions étrangères jouissant de la compétence judiciaire internationale sur base de la nationalité des victimes, de la localisation du siège des personnes morales ou du domicile des personnes physiques concernées, ou d’autres éléments de rattachement. A cet effet, nous avons pris contact avec des avocats français, belges, américains et autres, et avons obtenu d’eux des études et des consultations juridiques qui nous ont permis de déterminer les options disponibles.

En janvier 2021, le journaliste Firas Hatoum a présenté sur la chaîne de télévision New TV un reportage dans lequel il a dévoilé des informations concernant plusieurs aspects de l’affaire de l’explosion du Port, et il a évoqué le rôle de la société anglaise Savaro Ltd. dont le nom apparaît dans le dossier de la cargaison de nitrate d’ammonium qui est arrivée au Port de Beyrouth en 2013 à bord du navire M/V Rhosus et qui a explosé sept ans plus tard, en 2020.

Il est important de noter que, durant les années qui ont suivi le déchargement de la cargaison au Port de Beyrouth, Savaro Ltd. s’est comportée, à l’égard de cette cargaison, en tant que propriétaire: elle a nommé un avocat libanais ; elle a présenté des demandes en justice; elle a correspondu avec des autorités officielles libanaises; ce qui a établi sa qualité dans le dossier.

L’opposition à la liquidation de la société Savaro

Nous avons aussitôt entamé des recherches juridiques concernant cette société et nous avons ainsi appris, en accédant à son dossier auprès du Registre de commerce anglais (Companies House), que ses actionnaires avaient présenté, juste après l’explosion du Port, en janvier 2021, une demande visant à la liquider, comme si l’objectif était de supprimer toutes les traces permettant d’établir l’identité des personnes responsables de l’explosion du Port : pourquoi tenter de liquider la société quinze ans après sa constitution (en 2006), juste après l’explosion ? Simultanément, nous avons appris que deux parlementaires anglais, l’un au " House of Commons " et l’autre au " House of Lords ", respectivement Dame Maragaret Hodge et Lord John Mann, avaient demandé aux autorités anglaises d’enquêter sur la société Savaro, accusée de ne pas avoir déclaré l’identité de ses bénéficiaires économiques finaux (Ultimate Beneficial Owners – UBO). Cette violation de la réglementation est grave, car elle occulte l’identité des véritables propriétaires de la société, étant donné que ses actionnaires et ses dirigeants apparents, personnes physiques et morales, sont des professionnels du portage d’actions et de la gestion de sociétés pour le compte de tiers, et sont donc différents des véritables propriétaires.

Il est utile de souligner qu’il existe un certain nombre de sociétés, autres que la société anglaise, qui portent également le nom de Savaro, et qui étaient enregistrées dans des pays différents : en Ecosse, en Ukraine, aux British Virgin Islands (BVI), etc., ce qui prouve que la société défenderesse fait partie d’un important groupe de sociétés et qu’il est naïf de croire que la présence de cette société dans l’explosion du Port est sans importance.

Le Bâtonnier a adressé, en janvier 2021, des lettres aux deux parlementaires anglais leur demandant d’appuyer l’Ordre des avocats dans sa quête de la vérité, ainsi qu’une lettre au Registre de commerce anglais lui demandant de suspendre l’opération de liquidation de la société. Le Registre de commerce a accédé à cette demande et a décidé une suspension de six mois. Ce délai de six mois a été ultérieurement reconduit, pour des périodes égales, suite à des demandes répétées présentées par le Bureau d’accusation (par l’intermédiaire du cabinet d’avocats anglais) et d’autres avocats.

Le choix des juridictions anglaises pour actionner la société Savaro

Dans le but d’arrêter de manière durable la procédure de liquidation de la société Savaro, afin de l’attraire devant les tribunaux en sa qualité de coresponsable, parmi de nombreux autres responsables, de l’explosion du Port, il fallait lui intenter un procès ; et c’est ce que le Bureau d’accusation a décidé de faire. A cet effet, je me suis mis en rapport avec mon confrère Camille Abousleiman, associé dans le cabinet Dechert LLP à Londres, et lui ai demandé s’il était prêt à accompagner le Bureau d’accusation dans son action contre Savaro, sur une base pro bono. Il a immédiatement accepté, et il a mis ses propres ressources et celles de son cabinet au service de cette cause humanitaire.

Entre février et août 2021, le Bureau d’accusation et le cabinet anglais ont travaillé sur la constitution d’un dossier complet et détaillé à soumettre à la justice anglaise. La première chose à faire était d’analyser la compétence judiciaire internationale des juridictions anglaises sur base de leurs règles de conflit de juridictions pour ensuite, le cas échéant, déterminer la loi applicable au fond, sur base des règles de conflit de lois. Après des études approfondies, qui ont requis des dizaines d’heures de recherches et de discussions, nous nous sommes assurés de la compétence judiciaire des tribunaux anglais pour se saisir de cette affaire, ce qui a placé le fardeau du travail à la charge du Bureau d’accusation, puisque le tribunal anglais qui sera saisi se contentera d’appliquer ses propres règles de procédure civile, alors que le fond de l’affaire sera entièrement et exclusivement tranché en droit libanais : les fondements et les conditions de la responsabilité civile de la société Savaro ; les modes de preuve applicables à cette responsabilité ; l’évaluation du préjudice subi par les victimes et leurs ayants droit ; l’établissement de la qualité des héritiers demandeurs ; la détermination des dommages-intérêts ; la distinction entre la propriété des actions et la propriété économique des sociétés ; et bien d’autres questions juridiques, qui ont toutes été discutées exclusivement en droit libanais (Code des obligations et des contrats, Code de commerce, la jurisprudence et la doctrine libanaises).

Cela a nécessité de la part des avocats libanais du Bureau d’accusation des milliers d’heures de travail, consacrées à des études, des recherches, l’élaboration de consultations et de rapports juridiques, la traduction en langue anglaise (avec l’aide de traducteurs également volontaires), des discussions avec les avocats anglais, des réunions, des explications, l’analyse de documents et de preuves, la préparation des audiences, l’analyse et le commentaire des conclusions présentées par la société défenderesse, ainsi que les décisions avant dire droit et les jugements définitifs rendus par le tribunal anglais.

La sélection des victimes demanderesses à Londres

Afin d’intenter le procès à Londres, il fallait établir un choix entre les victimes, du fait de l’impossibilité de présenter ce procès au nom de milliers d’entre elles et de leurs héritiers, et ce, du fait de la très grosse charge en temps et en argent nécessitée par la préparation du dossier individuel de chaque victime ; et aussi du fait qu’au moment de la présentation du procès, son résultat n’était nullement assuré ; et enfin du fait que l’objectif n’était pas d’obtenir des indemnités mais plutôt d’empêcher la société Savaro d’échapper à la justice en se mettant en liquidation, pour ensuite établir sa responsabilité en sa qualité de l’une des personnes impliquées dans ce dossier.

Le procès a donc été présenté, en août 2021, au nom de certaines victimes et ayants droit représentés par les avocats Melhem Khalaf (Bâtonnier), Nasri Diab et Choucri Haddad, à l’issue d’une préparation qui avait commencé en janvier 2021, et qui a nécessité six mois de travail. La société défenderesse quant à elle, était représentée par un cabinet d’avocats anglais qui a présenté sa défense au fond, assisté aux audiences devant le tribunal et activement participé à la procédure contradictoire.

L’action en justice à Londres est civile et non pas pénale

Il est nécessaire d’insister sur le fait que l’action en justice présentée à Londres contre la société Savaro est une action civile et non pas une action pénale, ce qui signifie que, techniquement, le but poursuivi en la présentant n’était pas d’obtenir des peines pénales à l’encontre de cette société et de ses propriétaires, mais plutôt d’engager sa responsabilité civile et de l’obliger à indemniser les demandeurs des dommages physiques, matériels, et moraux qu’ils ont subis. Et cela signifie également que la justice anglaise n’a pas effectué des enquêtes et des investigations, puisque le procès civil est " la chose des parties " et que la charge de la preuve incombe à celles-ci. Par conséquent, le procès contre la société Savaro à Londres s’est limité au cadre tracé par les parties et aux faits qu’elles ont produits et prouvés ; et n’y a donc été dévoilé que ce que les parties ont elles-mêmes versé aux débats. Ainsi, par exemple, quand nous sommes parvenus à convaincre le juge anglais d’ordonner à la société défenderesse de dévoiler l’identité de ses bénéficiaires économiques finaux (UBO), en vertu d’une décision qu’il a rendue en juin 2022, et quand la société s’est abstenue d’exécuter cette décision, l’identité des UBO n’a pas été dévoilée et le tribunal s’est contenté de condamner la société au paiement d’une amende. Il ne faut donc pas attendre du procès civil anglais qu’il donne plus que ce qu’il a donné, ce qui est déjà beaucoup, étant noté que les deux questions de l’identité des UBO et du groupe de sociétés ne sont pas closes.

L’instance a donc duré à Londres d’août 2021 à juin 2023 et a comporté deux étapes : la première étape a pris fin avec le jugement rendu en février 2023 qui a établi la responsabilité civile de la société Savaro ; et la seconde étape a pris fin avec le second jugement rendu en juin 2023 qui a accordé des indemnités aux victimes et leurs ayants droit demandeurs et a fixé le quantum de ces indemnités. Avec le prononcé du second jugement final, l’instance a pris fin, et il n’est donc plus possible de parler de " participation " d’autres victimes à ce procès.

À Beyrouth, ont travaillé sur ce dossier, dans ses deux étapes et en diverses qualités, l’ancien bâtonnier Melhem Khalaf et les avocats Nasri Diab, Choucri Haddad, Nagib Hage-Chahine, Tamam Sahili, Moussa Khoury, Assad Najem, et Fadi Moghaizel ; et ont participé aux discussions et à l’élaboration de la stratégie du dossier l’entièreté des membres du Bureau d’accusation. A Londres, le dossier a été suivi par les avocats du cabinet Dechert LLP (avec à leur tête Camille Abousleiman) avec l’appui de trois  " Barristers " , tous ayant offert leurs services pour cette cause humanitaire.

Le jugement définitif rendu à Londres

Le jugement rendu en juin 2023 par la Haute Cour de Justice anglaise, qui a ordonné le paiement d’indemnités aux victimes, représente en soi une grande victoire, indépendamment de son exécution : ce jugement constitue la première décision judiciaire définitive identifiant l’une des personnes impliquées dans l’explosion du Port et la condamnant au paiement d’indemnités.

Ce jugement est bien entendu susceptible d’exécution forcée dans tous les pays du monde, en tenant compte des règles d’exequatur qui y sont applicables. Il s’agit de rechercher des actifs susceptibles de saisie et ensuite d’y appliquer des mesures d’exécution, étant réitéré que la société condamnée Savaro est une société  " effective  " (et non pas  " fictive " ) et qu’elle fait partie d’un groupe de sociétés.

L’affirmation selon laquelle " la responsabilité de la société est limitée au montant de son capital versé, qui est de mille Livres Sterling " (sic) démontre une méconnaissance de la part de son auteur de la comptabilité et du droit : comme le montre le bilan de la société Savaro publié au Registre de commerce anglais, le capital social s’élève à mille Livres Sterling et n’est même pas versé ( " Called up share capital not paid " ) ; est-ce que cela signifie que la société est exemptée de toute responsabilité (puisque, selon l’auteur de cette affirmation, la responsabilité de cette société est limitée à mille Livres Sterling, pour autant que ce capital soit versé) ? La réponse à cette question est bien entendu négative: cette affirmation viole les principes élémentaires du droit des sociétés commerciales, puisqu’il n’existe aucune relation entre le capital social et le plafond de la responsabilité de la société, surtout que la notion de capital social minimum obligatoire n’existe pas en droit anglo-saxon, sans que cela signifie pour autant que toutes les sociétés anglo-saxonnes échappent à toute responsabilité à l’égard des tiers (!).

Visiblement, la société Savaro revêt une importance majeure pour ses propriétaires : comme nous l’avons montré plus haut, ceux-ci ont nommé un avocat au Liban pour les représenter devant les tribunaux libanais et les autorités administratives locales, après le déchargement de la cargaison au Port ; ils ont ensuite nommé un cabinet d’avocats anglais pour les représenter au procès de Londres (et ce cabinet a participé activement à l’instance contradictoire) ; et ils ont cédé leurs actions, en cours d’instance, après avoir échoué à liquider la société, à un ressortissant ukrainien résidant en Ukraine (n’est-il pas étonnant qu’une personne achète les actions d’une société qui est défenderesse dans le procès de l’explosion du Port ?!), ce qui constitue une autre tentative d’échapper à la responsabilité.

La solidarité entre les victimes et le partage des indemnités  

Le Bureau d’accusation du Barreau de Beyrouth a offert aux victimes et au Liban le premier jugement définitif établissant la responsabilité civile de l’une des personnes impliquées dans l’explosion du Port. Dans le cas où les victimes et leurs ayants droit en faveur desquels le jugement anglais a été rendu encaissent une partie ou l’intégralité des indemnités affectées au préjudice moral (non médical), l’équité et la justice leur imposeraient de partager ces indemnités avec le reste des victimes de l’explosion du Port non représentées à ce procès et prises en charge par le Bureau d’accusation. La solidarité impose ce partage qui aurait pour conséquence que chaque victime représentée par le Bureau d’accusation recevrait un montant symbolique de l’un des responsables de sa détresse.

Nous n’avons pas, et le Bureau d’accusation n’a pas, travaillé de manière intensive et continue pendant trente mois, et nous n’avons pas encouru des dépenses et  rassemblé des volontaires au Liban et en Grande-Bretagne (avocats, experts, traducteurs, etc.) uniquement au profit des quelques demandeurs au procès de Londres ; nous avons travaillé, pro bono, en faveur de toutes les victimes de l’explosion du Port et, de manière plus générale, en faveur du peuple libanais qui est en quête de la vérité. La catastrophe a touché l’ensemble des victimes, et nous considérons qu’il est équitable et juste que les indemnités soient distribuées à toutes les victimes, et nous sommes convaincus que les victimes et leurs ayants droit que nous avons représentés au procès de Londres procéderont spontanément au partage des indemnités de leur préjudice moral avec les autres victimes ; cela constitue un devoir moral élémentaire, surtout que les victimes et leurs ayant droit demandeurs au procès de Londres n’ont rien déboursé au titre d’honoraires, de dépenses, de frais et de droits judiciaires.

* Dr. Nasri Antoine Diab est professeur de droit et avocat aux Barreaux de Beyrouth et Paris ; il est membre fondateur du Bureau d’accusation de l’Ordre des avocats de Beyrouth.