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Le secteur de l’éducation, pilier de la société libanaise, subit une forte pression depuis le début de la crise économique. Alors que le secteur privé a réussi à maintenir une certaine stabilité, le secteur public fait face à d’importantes difficultés sans solutions immédiates en vue. Pour faire face à ces problèmes urgents, la commission parlementaire de l’Éducation, en collaboration avec le ministère de l’Éducation et sous le parrainage du président du Parlement, Nabih Berry, a organisé un atelier de travail de trois jours afin d’aborder les défis auxquels le système éducatif libanais est confronté.

Lors du premier jour de l’atelier, qui s’est tenu le lundi 18 septembre, l’accent a été mis sur les écoles publiques et privées au Liban. Mardi, des spécialistes et des députés se sont réunis, place de l’Étoile, pour examiner les problèmes des universités publiques et privées, notamment l’Université libanaise (UL).

Dans le contexte de la crise économique actuelle, l’UL, la seule université publique du pays, est confrontée à de nombreux défis. M. Bassam Badran, président de l’université depuis 2021, a identifié trois types de défis majeurs, à savoir les défis financiers, juridiques et académiques.

Sur le plan financier, M. Badran a souligné que les enseignants contractuels de tous les niveaux et ayant différents niveaux d’expérience, perçoivent des salaires pour l’année académique 2023-2024 qui ne dépassent pas les 400 dollars. Cette maigre rémunération, promise dans le cadre de réformes globales, a découragé de nombreux enseignants. En effet, les enseignants ont vu leurs salaires réduits de 90%, poussant certains d’entre eux à émigrer ou à chercher un travail supplémentaire. Par ailleurs, plus de 50% des enseignants sont engagés dans la recherche scientifique à l’UL. Cependant, le manque de motivation et leur départ vers le secteur privé pourraient avoir un impact négatif sur la recherche et les normes académiques de l’université. Cela pourrait également compromettre la reconnaissance des diplômes de l’UL.

Concernant le financement du gouvernement, M. Badran a noté que l’UL était censée recevoir un budget de 4.800 milliards de livres libanaises pour 2023, mais n’en a reçu que 900 milliards. Du budget prévu, 1.120 milliards sont consacrés aux salaires des enseignants, sachant que 5.600 milliards de livres libanaises sont nécessaires pour assurer le fonctionnement de l’université. Le déficit financier, a-t-il expliqué, entrave l’indépendance de l’université et sa capacité à générer des revenus à partir des frais de scolarité, qui s’élèvent à seulement 165 dollars par étudiant.

Sur le plan juridique, M. Badran a souligné la nécessité de réviser certaines lois qui régissent l’Université libanaise. L’absence de réglementations financières adéquates a créé des obstacles bureaucratiques, entravant le développement de l’université. En outre, l’autorité limitée du conseil de l’Université libanaise rend la prise de décision difficile, dans la mesure où les influences externes font souvent obstacle aux réformes nécessaires.

Au niveau académique et structurel, l’université doit relever le défi d’aligner ses offres éducatives sur les demandes évolutives de la main-d’œuvre. Les investissements dans des domaines tels que l’intelligence artificielle sont essentiels pour maintenir la compétitivité au niveau mondial. La question des étudiants talentueux recevant des offres lucratives à l’étranger constitue une perte significative de capital intellectuel. De plus, l’UL souffre de l’absence de mécanismes financiers transparents, de développement des ressources humaines et de transformation numérique. L’université est également aux prises avec des défis liés à la sécurité, à la maintenance et à l’accès à Internet, ainsi qu’à un manque de personnel spécialisé en technologie.

M. Badran a par ailleurs félicité les étudiants de l’UL pour le travail ardu qu’ils ont accompli pendant la pandémie de Covid-19, en contribuant à la recherche scientifique et en collectant la somme colossale de 52 millions de dollars en fournissant des tests PCR aux patients. Il a toutefois exprimé des inquiétudes concernant la disparition présumée des fonds collectés au lieu de leur attribution à l’université.

M. Abbas Halabi, le ministre sortant de l’Éducation, a souligné l’importance de rétablir l’autorité du conseil de l’université qui constitue une réforme cruciale pour l’UL. Selon lui, cela favoriserait une coopération active entre le ministère et l’UL pour trouver des solutions et assurer le succès de la nouvelle année académique. M. Halabi a également mentionné que son ministère avait demandé au Conseil des ministres de prendre des mesures législatives pour régler la question des salaires des enseignants à l’Université libanaise.

Universités privées

D’autre part, les universités privées, dont le nombre s’élève à 48 au Liban, sont confrontées à des défis opérationnels. M. Mazen el-Khatib, directeur général de l’enseignement supérieur au ministère de l’Éducation, a exposé les défis actuels de ce secteur, notamment la surabondance de diplômés en ingénierie, l’inadéquation des spécialisations commerciales, le manque de coordination entre les universités, l’absence d’un cadre national de qualification, le recours à des enseignants à temps partiel, l’émigration des citoyens libanais, la concentration des opportunités d’emploi dans le secteur des services, la baisse des inscriptions dans les écoles secondaires, les problèmes d’organisation au sein de la direction générale de l’enseignement supérieur et la limitation des opportunités d’emploi contractuel.

Ces défis démontrent la nécessité de réformes globales et d’une collaboration accrue pour aligner l’éducation sur les besoins de la main-d’œuvre et améliorer la qualité de l’éducation dans le système d’enseignement supérieur libanais.