À l’ordre du jour du Conseil des ministres, vendredi, le projet, très contesté, de restructuration des banques, prévu dans le cadre du plan de redressement économique et financier élaboré par le gouvernement de Najib Mikati.

Un plan qui fait grincer les dents, parce qu’il tend à soustraire l’État à toute responsabilité dans l’effondrement retentissant dans lequel les politiques officielles ont pourtant plongé le pays. Il prévoit littéralement des aberrations, notamment la suppression des engagements financiers de la Banque du Liban à l’égard des banques, dont l’effet immédiat est la destruction du secteur bancaire et la suppression des dépôts bancaires.

Certes, le Conseil d’État a annulé la semaine dernière, les articles du document, en rapport avec cette mesure, mais le gouvernement, du moins son chef, Najib Mikati, et l’équipe qui l’entoure, semblent déterminés à aller de l’avant dans un plan qui veut faire assumer au secteur bancaire et aux déposants tout le poids de la crise.

Le Hezbollah, le mouvement Amal y sont farouchement opposés. Le ministre sortant de l’Éducation, Abbas Halabi, a annoncé à son tour, jeudi, sur le plateau de la MTV, qu’il s’opposera au projet de restructuration des banques en Conseil des ministres, vendredi. "Je n’accepte pas qu’on supprime les dépôts bancaires et qu’on porte un coup au secteur bancaire", a-t-il affirmé.

"Ce plan doit être réexaminé. Il faut bien sûr réformer le secteur mais il est indispensable que l’État se réforme en premier et règle le gaspillage", dans la gestion des finances publiques, a-t-il dit, dans le cadre du programme Sar el-Waat.

Il semble que le ministre de l’Économie, Amine Salam, est également hostile au plan, descendu par le président de la commission parlementaire des Finances et du Budget, Georges Adwane, dans le cadre du même programme.

"Rien n’a changé dans les politiques suivies, depuis le gouvernement de Hassan Diab, qui a commis une erreur monumentale en annonçant le défaut de paiement du Liban, jusqu’à celui de Najib Mikati", a-t-il déploré, avant d’insister sur le fait que le plan du gouvernement "détruira le secteur bancaire, alors que celui-ci est indispensable pour promouvoir un développement économique". "Sans secteur bancaire sain, comment sera-t-il possible d’avoir une croissance? Le plan proposé nous empêchera pendant au moins 20 ans de nous développer, parce qu’il sape la confiance dans les banques", a affirmé Georges Adwane.

Il a mis l’accent sur la nécessité, pour l’État, de "déterminer les pertes et les dettes, parce que les fonds des déposants, dans lesquels il a puisé sont une dette et non pas des pertes". "Lorsque cette distinction sera établie, il sera possible de rendre l’argent des déposants", a assuré le député.

Après avoir exposé les fonds publics dilapidés au fil des ans, notamment pour financer des subventions "qui ont au final financé du pillage, de la corruption et l’économie syrienne", M. Adwane a révélé que des responsables politiques et quatre magistrats ont profité de la dévaluation de la livre pour rembourser au taux de 1500 livres, des prêts bancaires contractés en LL, et qui s’élèvent à plusieurs millions de dollars. Il a notamment accusé les magistrats d’avoir procédé à des spéculations financières, affirmant vouloir saisir la justice de cette affaire, "documents à l’appui".

M. Adwane a également insisté sur la nécessité, pour le gouvernement, de revoir sa copie, en soulignant que l’approche officielle avec le Fonds Monétaire International (FMI) était fausse. Un plan de redressement doit être, selon lui, fondé sur des bases saines et viables. Il doit prévoir, en premier, une véritable réforme qui permettra de renflouer le Trésor.

Georges Adwane a notamment préconisé une gestion des actifs de l’État, en donnant plusieurs exemples sur des services mal gérés et qui font perdre au Trésor des millions de dollars. "Malheureusement, a-t-il dit, il n’y a pas de volonté de réforme. Avec cette classe dirigeante, il n’y a pas non plus, de plus chance de bonne gouvernance", a-t-il observé, avant d’annoncer que si jamais le gouvernement maintient son plan, le Parlement ne le réceptionnera pas lorsqu’il lui sera soumis.