Pourquoi Israël a étendu ses raids aériens à la Békaa et s’est mis subitement à bombarder Baalbeck, un fief du Hezbollah, ciblant des dépôts d’armes appartenant à la formation pro-iranienne?

Pour certains, cette escalade dans le conflit entre Israël et le Hezbollah est à lier à l’affaire du drone israélien de surveillance, de type Hermes 450. Un appareil a été abattu pour la première fois par le Hezb, lundi, dans l’Iqlim el-Touffah, donc très loin de Baalbeck, à l’aide d’un missile sol-air.

Une explication plutôt simpliste, à en croire certaines sources de sécurité. Celles-ci situent cet élargissement du rayon des cibles israéliennes dans le cadre des tentatives de l’État hébreu d’entraîner le Hezbollah à une riposte qui lui donnerait un prétexte pour élargir son champ d’opérations au Liban, indépendamment d’une trêve à Gaza.

Cette analyse repose sur des faits précis, dont les menaces proférées la veille par le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, contre le Liban. "Nous prévoyons d’accroître la puissance de feu contre le Hezbollah qui ne peut pas remplacer ses cadres que nous liquidons", a-t-il annoncé lors d’une visite au quartier général du commandement nord de l’armée israélienne.

Selon lui, ces frappes se poursuivront même si une trêve est instaurée à Gaza et qu’un accord pour un échange d’otages et de prisonniers entre Tel Aviv et le Hamas est conclu. "L’objectif est simple: repousser le Hezbollah là où il devrait être. Soit par un accord, soit par la force", a-t-il dit.

Des menaces qui nourrissent des inquiétudes occidentales dont Washington s’est fait l’écho jeudi. Les autorités américaines et les services de renseignement américains redoutent qu’Israël n’envahisse le Liban à la fin du printemps ou au début de l’été, si les efforts diplomatiques en cours ne débouchent pas.

Les États-Unis, qui sont en plein dans les préparatifs de la présidentielle du 5 novembre, exercent des pressions soutenues sur Israël pour un règlement aussi bien à Gaza qu’au sud du Liban. L’Iran, parrain du Hezbollah, a par ailleurs déjà indiqué, par la bouche de son ministre des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, qu’il ne veut pas d’un élargissement du conflit. Téhéran est plus intéressé par un règlement politique qui lui permettrait de générer des acquis stratégiques, après avoir marqué un point face à Israël à travers l’opération du 7 octobre 2023, menée par son allié, le Hamas, contre Israël.

Aussi est-il important pour lui que le conflit militaire à la frontière sud reste limité aux règles d’engagement militaire qu’Israël cherche à briser.

Mais, de sources diplomatiques à Beyrouth, on indique que le Hezbollah reste vigilant pour ne pas tomber dans le piège israélien. Ses attaques et ses ripostes aux bombardements israéliens restent limitées aux positions militaires en Galilée, à Chebaa ou à des zones ouvertes dans le nord israélien, même lorsque des civils sont tués au Liban.

Le bombardement de Safad, en Galilée, qui avait fait un tué et huit blessés le 14 février, n’avait pas été revendiqué par le Hezbollah.

Cette milice, indique-t-on de même source, souhaite qu’une trêve à Gaza s’étende à la frontière sud qu’elle considère comme un front de soutien et non de confrontation. Il n’en demeure pas moins qu’au cas où Israël se lancerait dans une confrontation ouverte, le Hezb riposterait par des frappes plus en profondeur en Israël, selon ses milieux.