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Le 7 mars 2020, le gouvernement libanais annonçait son premier défaut de paiement, celui des eurobonds, s’élevant à un montant de 1,2 milliard de dollars. Cela, sans avoir restructuré sa dette vis-à-vis de ses créanciers, conformément à l’intérêt national, ni même réorganisé ses engagements en suspens à ce jour.

Je persiste et signe… un État qui se respecte honore ses engagements et s’acquitte de ses paiements échus. Il élabore ainsi une politique de confiance et consolide l’estime de ses créanciers à son égard en renégociant, au moins, ses dettes dans le temps.

Selon le rapport du FMI de juin 2023, le système bancaire libanais avait, en 2017, assez d’avoirs en devises pour couvrir la grande majorité des dépôts en devises. Aussi, la Banque du Liban (BDL) avait dans ses caisses 30,5 milliards de dollars américains de réserves fin février 2020, soit une semaine avant la décision insensée du défaut de paiement. Il s’agit, parmi les pays qui avaient la même notation que le Liban, du niveau le plus élevé au monde par rapport au PIB.

Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt. Ayons le courage de reconnaître qu’au lendemain du mouvement de contestation du 17 octobre 2019, le gouvernement libanais n’a pas daigné se réunir pour imposer un contrôle des capitaux. Ce qui avait été décrété au lendemain de la guerre des six jours ou de la faillite de la Banque Intra ou de l’opération du commando qui a détruit l’aéroport de Beyrouth et une partie de la flotte MEA et LIA. Je demeure bien conscient des véritables raisons qui ont conduit à l’absence d’un contrôle des changes alors que les institutions bancaires avaient gardé guichet fermé. L’histoire se chargera sans doute de les dévoiler.

Les déclarations d’une ministre de l’époque et d’autres, en grande pompe, la semaine dernière, au sujet du défaut de paiement sur les écrans de télévision, ne tiennent donc nullement la route. Elles constituent un pur camouflage et émanent d’une volonté de travestir la vérité.

En effet, selon la thèse qu’ils ont développée, il fallait à l’État neuf milliards de dollars, sur deux ans, pour couvrir les échéances en eurobonds et les dettes. Le prétexte étant de protéger les déposants dans les banques et leur garantir, par client, un minimum de 500 mille dollars. Or, c’est justement là que le bât blesse. Pourquoi? Car, ces intervenants feignent d’oublier, pire, omettent de déclarer avoir autorisé, à l’époque, l’octroi de subventions s’élevant à 12 milliards de dollars.

Mais l’essentiel est ailleurs, vous l’aurez certes compris. Il fallait à tout prix aller à la recherche d’un bouc émissaire et crier haro sur le baudet, permettant ainsi à chaque responsable de sauver sa peau et de demeurer en place. Mais les masques sont tombés. Plus personne n’est dupe. Par devoir de mémoire pour les générations futures, le 7 mars devrait être déclaré journée de deuil national au Liban.

*Président de la HALFA – Association des hommes d’affaires libanais de France