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Le mystère persiste autour des élections municipales au Liban, qui semblent être de nouveau reportées face au contexte de paralysie politique, administrative et institutionnelle que traverse le pays. Cette paralysie s’intensifie depuis son entrée dans une phase de vacance présidentielle, qui s’avère être longue et continue, à la suite de l’échec de l’élection d’un successeur à l’ancien président de la République, Michel Aoun, qui a quitté le palais de Baabda le 31 octobre 2022.

Il est certain que la tenue des élections municipales revêt une importance exceptionnelle dans des circonstances ordinaires. Cependant, en temps de guerre, comme c’est le cas au pays actuellement, les échéances constitutionnelles peuvent être compromises et les institutions paralysées: la présidence est vacante, le Parlement est bloqué pour des raisons politiques et le gouvernement en place n’a que des pouvoirs partiels en tant que gouvernement chargé d’expédier les affaires courantes.

Cette situation critique accentue la paralysie qui frappe la plupart des services publics et renforce le besoin de tenir des élections municipales, cruciales pour la démocratie locale. Celles-ci permettent le renouvellement des conseils municipaux, dont certains sont en crise depuis des années en raison de querelles entre les membres ou de démissions de groupes parfois motivées par des considérations familiales ou locales étroites. Ces conflits portent souvent préjudice aux villages et aux villes, compromettant les possibilités de développement en raison de considérations futiles.

Une autre dimension importante des élections municipales réside dans la diminution de l’intervention politique, en raison de la prédominance des considérations familiales et locales. Cela confère à cet événement une signification particulière en tant que reflet des aspirations et des positions des habitants des villages et des villes vis-à-vis des autorités locales, sans toutefois être le seul indicateur de la popularité d’un parti politique donné, en raison d’autres facteurs en jeu dans ce domaine.

À partir d’ici, la tenue des élections municipales devient inévitable, même si certains les perçoivent comme se tenant en temps opportun, alors que le pays traverse une période d’attente et de spéculation quant à l’évolution de la situation régionale tendue. Cela est particulièrement notable avec la persistance de la guerre israélienne contre la bande de Gaza, qui semble se poursuivre sans aucune solution politique sérieuse pour y mettre fin ou pour arrêter les hostilités malgré le nombre élevé de civils innocents tués chaque jour dans toutes les parties du territoire, y compris dans les hôpitaux.

Cependant, il faut également reconnaître que le retard persistant dans l’application des réformes majeures stipulées dans l’accord de Taëf (1989) a incité certains à proposer son remplacement par un contrat social (comme s’il s’agissait d’une simple formalité politique ou constitutionnelle). Toutefois, exiger sa pleine mise en œuvre semble plus avisé que réclamer son changement dans un contexte de turbulences régionales où différentes puissances sont en conflit.

Parmi les articles fondamentaux des accords de Taëf qui n’ont pas été exécutés figure le projet de décentralisation administrative élargie, qui est l’un des projets importants pour sa contribution à la revitalisation de la "démocratie locale", si l’on peut dire, et pour le rôle majeur qu’il joue dans la promotion du développement et de l’amélioration des régions sans pour autant entraîner une décentralisation politique susceptible de conduire à une fédéralisation ou à d’autres projets incompatibles avec la nature libanaise en termes de composition, de diversité et de pluralisme.

En conclusion, il est essentiel de souligner que la tenue des élections municipales demeure indispensable, même si elle n’est pas immédiatement suivie par la mise en œuvre de la décentralisation administrative. Ce processus reste vital dans le contexte actuel de la "stagnation politique" au Liban. Le renouvellement des élites locales pourrait servir de catalyseur pour un changement politique plus large, qu’elles soient issues des partis politiques ou non et cela mérite d’être sérieusement débattu et exploré.