Zoom sur l’accord d’armistice de 1949

Depuis le début de l’année, et dans le cadre des efforts diplomatiques visant à contenir les affrontements au Liban-Sud, le Liban politique fait allusion à l’armistice de 1949. Le 8 janvier, le Premier ministre sortant, Najib Mikati, avait ainsi déclaré que «toutes les décisions internationales doivent être appliquées, à leur tête la déclaration d’armistice de 1949».
Plus récemment, le 7 avril, l’ancien chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, avait espéré un retour au même accord. De Aïn el-Tiné, où il avait été reçu par le chef du Parlement, Nabih Berry, il avait souligné le besoin de «trouver un moyen pour briser le mur de la haine et parvenir à un règlement acceptable pour l’application de la résolution 1701 et un retour à l’accord d’armistice».
Mais qu’est donc cet accord d’armistice de 1949?
Historique
Le 14 mai 1948, David ben Gourion, père fondateur d’Israël, proclame l’État d’Israël à Tel Aviv, un jour avant que le mandat britannique sur la Palestine arrive à expiration. À la suite de la proclamation de ce nouvel État, que les principales puissances mondiales reconnaissent, la première guerre israélo-arabe éclate.
Les armées arabes de l’Égypte, de l’Irak, de la Transjordanie, de la Syrie et du Liban entrent en Palestine, mais elles sont battues. La guerre permet l’expansion du territoire israélien, dont la capitale sera Jérusalem-Est.
Le 7 janvier 1949, un cessez-le-feu met fin aux hostilités. Les lignes de démarcation devant être fixées et les problèmes en attente résolus, des accords d’armistice sont conclus en série.
Les négociations s’ouvrent dans l’île grecque de Rhodes, le 12 janvier 1949, et l’accord est signé le 23 février 1949 entre les Égyptiens et les Israéliens. Le 3 avril 1949, un accord du même type est signé entre l’État hébreu et la Transjordanie. Les discussions sont menées par le médiateur des Nations unies, Ralph Bunche, qui obtiendra le prix Nobel de la paix en 1950 pour son rôle dans les négociations.
De leur côté, les Syriens concluent un accord, le 20 juillet 1949, à la frontière israélo-syrienne. Au Liban, le document a été signé à Ras el-Naqoura, le 23 mars 1949, par «le lieutenant-colonel T. Salem et le commandant J. Harb du côté libanais, pour et au nom du gouvernement du Liban».
N’ayant pas de frontière commune avec Israël, l’Irak n’a pas conclu d’accord et ses forces se sont simplement retirées de l’arène.
Il avait été convenu que des traités de paix, en bonne et due forme, seraient signés par la suite. Cependant, les lignes tracées à Rhodes se sont transformées de facto en frontières, ultérieurement modifiées par d’autres conflits.
Le document 

Le texte, Convention d’armistice général libano-israélien, est divisé en un préambule et huit articles, et suivi d’une annexe, Définition des forces défensives.
Nous allons examiner quelques articles de cette convention.
L’article I stipule de ne pas recourir à la force militaire entre les deux parties dans le règlement de la cause palestinienne. Selon cet article, les forces armées (terre, mer, air) n’entreprendront pas ni ne projetteront aucune action agressive contre la population ou les forces armées de l’autre partie.
L’article III, au vu de la situation actuelle du Liban, peut paraître comme étant le plus intéressant puisqu’il fait mention de formations militaires et paramilitaires et/ou irrégulières.
Notons, qu’à l’époque de cette première guerre avec Israël, des éléments armés, n’appartenant pas aux forces armées régulières libanaises, franchissaient la frontière entre le Liban et la Palestine, et celle entre la Palestine et la Syrie. Ces forces irrégulières de volontaires arabes se battaient sous le drapeau de l’Armée de la libération arabe (ALA) créée par la Ligue arabe, en septembre 1947. Dirigée par Faouzi el-Qaouakji, un ancien officier syrien, l’ALA était financée par l’ensemble des pays de la Ligue. La toute jeune armée libanaise, dont le commandant en chef de l’époque était Fouad Chehab, devait donc tenir compte de sa présence au Liban-Sud.  Du côté israélien, les milices qui avaient prévalu lors du mandat britannique se sont unifiées sous le drapeau de l’armée israélienne dès la proclamation officielle de l’État d’Israël.
Dans l’article III, nous pouvons lire:  «Aucun élément des forces terrestres, navales aériennes (militaires et paramilitaires) de l’une quelconque des parties, y compris les forces irrégulières, ne devra commettre un acte de guerre ou d’hostilité quelconque contre les forces militaires ou paramilitaires de l’autre partie, ou contre des civils dans le territoire contrôlé par celle-ci; traverser ou franchir dans quelque but que ce soit, la ligne de démarcation d’armistice de la présente convention; pénétrer ou traverser l’espace aérien de l’autre partie, ou les eaux territoriales de celle-ci, à moins de trois miles de la ligne côtière.»
L’article IV détermine le but fondamental de la ligne de démarcation qui est une limite que les forces armées n’ont pas le droit de dépasser et à l’intérieur de laquelle les effectifs militaires seront défensifs.
Quant à l’article VII, il stipule que l’exécution des dispositions de la convention sera contrôlée par une commission mixte d’armistice qui siègera au poste frontière de Naqoura (Liban) et nord de Metula (Israël).
L’annexe 
Le document joint à celui de la convention définit les forces défensives mentionnées dans l’article IV. Selon ce texte, aucune restriction de mouvements ne sera imposée des deux côtés de la frontière, tant que la ligne de démarcation n’est pas franchie.
En ce qui concerne les forces défensives, chacun des deux pays ne pouvait pas compter parmi ses effectifs plus de 1.500 militaires entre officiers et troupes. Du côté libanais, les militaires ne pouvaient pas opérer au sud de la ligne générale «El Qasmiyé – Nabatiyé Ett Tahta – Hasbaiya». Du côté israélien, les forces armées ne pouvaient pas opérer au nord de la ligne générale «Nahariya – Tarshisha – Jish – Marus»*.
La zone d’exclusion entre les deux «lignes générales» délimitée dans le texte de l’annexe ressemble étrangement à la même zone d’exclusion prévue dans la résolution 1701 au sud du Litani. D’ailleurs, le texte de la 1701 appelle au respect de la Ligne bleue et souligne l’intégralité territoriale, la souveraineté et l’indépendance politique du Liban à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues, comme le stipule l’accord d’armistice du 23 mars 1949. De même, le dossier de presse de la Finul décrit la Ligne bleue comme la meilleure approximation de la ligne de démarcation de l’armistice de 1949.
* L’orthographe reprend celle du texte officiel des Nations unies.
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