L’Union européenne (UE) semble sur la défensive, surtout depuis le tollé qu’a suscité l’annonce, jeudi dernier, d’une aide d’un milliard d’euros pour soutenir le Liban.

Dans une seconde tentative (la première datant d’hier, vendredi, à l’occasion de la Journée de l’Europe) de justification de l’octroi de cette somme sur une durée de quatre ans, l’ambassadrice de l’UE au Liban, Sandra de Waele a indiqué, lors d’une conférence de presse tenue vendredi, que l’on ne peut qualifier de "plan" l’initiative européenne pour le retour des Syriens dans leur pays. Par conséquent, "aucun délai n’a été fixé dans ce sens", a-t-elle dit.

Il ne s’agit pas de "plan de retour volontaire à proprement parler", a déclaré Mme De Waele, en répondant à une question d’Ici Beyrouth (IB). Il s’agit plutôt, d’après elle, "d’efforts visant à créer les conditions nécessaires pour ce faire". "Nous envisageons de travailler avec le Liban pour stimuler ce processus et créer toutes les dynamiques de retour en collaboration avec les forces de sécurité", a-t-elle noté. Et Mme De Waele de poursuivre: "C’est dans cette perspective que nous étudions le rapport qui nous a été soumis par la Sûreté générale sur l’état des lieux de la présence syrienne au Liban", notamment celle en situation irrégulière.

Le rapatriement devrait se faire, insiste, à plusieurs reprises, Mme De Waele, "dans le respect des règles humanitaires internationales". L’on se demande, dans ce contexte, quel statut ont au regard de l’UE les textes de loi selon lesquels le Liban est un pays de transit. "Si le Liban n’a pas ratifié la convention de Genève de 1951, relative au statut des réfugiés, cela ne signifie pas pour autant qu’il ne doive pas s’en tenir aux règles humanitaires internationales. Il existe un engagement de la part du gouvernement libanais de se tenir à ces principes", a signalé Mme De Waele en réponse à une autre question d’IB.

En attendant donc un (possible?) rapatriement des Syriens, l’aide octroyée sera répartie sur environ 30 projets, qui visent principalement les secteurs de l’éducation et de la santé, mais qui permettent aussi l’accès à l’eau potable et garantissent la protection sociale.

Des programmes qui seront largement étudiés avec les différents ministères concernés et desquels bénéficieront aussi bien les Syriens qu’une partie des Libanais. Selon les chiffres fournis par l’ambassadrice de l’UE à Beyrouth, "75.000 familles pourront bénéficier de cette aide". Elle a également indiqué que "55% des citoyens du pays accèdent aux centres de santé “soutenus” par l’UE et qu’à Tripoli, 75% y recourent pour se faire soigner".

À travers ce programme, l’UE entend, toujours selon Mme De Waele, "contribuer à la lutte contre la corruption, le terrorisme et le trafic d’être humains et apporter son soutien à l’armée et aux forces de sécurité pour le contrôle des frontières avec la Syrie".

Tous ces projets s’inscrivent, comme l’a déclaré l’ambassadrice de l’UE, dans la "continuité de notre engagement". Toutefois, leur financement ne transitera pas par le gouvernement (décision prise depuis le début de la crise au Liban, en 2019). L’argent ira directement aux bénéficiaires des projets à mettre en œuvre.

Elle a par ailleurs insisté sur la nécessité pour le gouvernement libanais et les forces sécuritaires d’assumer leurs responsabilités dans la gestion de la crise à tous les niveaux. "Les responsables politiques doivent fournir des efforts pour permettre au Liban de surmonter la crise, notamment celle relative au secteur bancaire. D’où l’importance de mettre en œuvre les réformes requises à ce niveau". De leur côté, l’armée et les forces de sécurité qui bénéficieront d’une formation et d’un soutien logistique européen devront, elles aussi, accomplir leurs tâches et rendre des comptes sur les raisons des tentatives d’infiltration constatées. "N’oublions pas que ce n’est pas l’UE qui se trouve aux frontières et qui mène le travail de contrôle sur le terrain".

Aides en Syrie 

Mme De Waele a affirmé que, contrairement aux idées reçues, l’UE fournit une aide considérable aux Syriens, dans leur pays, aide qui dépasse de trois fois celle octroyée au Liban. De quoi s’interroger sur ces propos. Selon un responsable diplomatique au sein de l’UE interrogé vendredi dernier par IB, les aides, bien qu’assurées à Damas, le sont "difficilement", "à cause du régime au pouvoir". Il faut dire que le maintien de Bachar el-Assad et de son régime à la tête du pays, accompagné de sanctions américaines, ne faciliterait pas l’octroi d’aide d’une ampleur telle que décrite par Mme De Waele.