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Ce n’est plus un secret: la visite de l’émissaire spécial du président français pour le Liban, Jean-Yves Le Drian, "n’a pas abouti à une percée majeure concernant le dossier de la présidentielle au Liban", a-t-on confirmé de source diplomatique occidentale à Ici Beyrouth.

Il reste qu’elle s’est distinguée des précédentes dans la mesure où elle a quand même induit un léger changement au niveau de la position du président de la Chambre, Nabih Berry. Ce dernier s’est dit favorable à "des concertations parlementaires" précédant la présidentielle, alors qu’il exigeait, à cette fin, un dialogue national sous sa présidence. Aujourd’hui, on dit qu’il a accepté que le vice-président de la Chambre, Elias Bou Saab, modère ces échanges informels.

Alors que des informations avaient récemment circulé selon lesquelles les membres du Quintette (États-Unis, France, Arabie saoudite, Égypte et Qatar) insistent pour qu’un nouveau président soit élu dans les deux mois qui viennent, selon cette source, "il n’existe toujours pas de feuille de route claire pour que le déblocage se fasse avant la fin du mois de juin". Ce délai avait été évoqué par M. Le Drian lors de sa visite à Beyrouth. L’émissaire français avait mis en garde contre la disparition du "Liban politique" si les responsables échouaient à élire un nouveau chef de l’État d’ici-là. En d’autres termes, et au-delà de cette date, "le dossier libanais ne sera plus au cœur des priorités de la communauté internationale, au vu des changements majeurs dont nous serons témoins mondialement", craint-on de même source.

D’où la nécessité "de dissocier le dossier de la présidentielle libanaise du conflit en cours entre le Hamas et Israël, mais aussi des affrontements au Liban-Sud entre le Hezbollah et l’État hébreu", explique le diplomate interrogé, avant d’ajouter: "Nous comptons désormais sur un sursaut national de la part des différentes parties prenantes, qui devraient assumer leurs responsabilités, ce qui est, pour le moment, très peu probable".

Du dialogue à la concertation

Durant ses différentes rencontres avec les responsables politiques, M. Le Drian "a largement évoqué et dans le détail, la forme du processus de concertations qui mènerait éventuellement à une entente entre les Libanais pour l’élection d’un président de la République", explique-t-on de même source. Il convient de rappeler qu’après avoir longtemps appelé au dialogue, condition sine qua non pour le président de la Chambre, Nabih Berry, pour la tenue de la présidentielle, le chef du Législatif a fini par adhérer au projet de concertations parlementaires qui précéderaient la tenue d’une réunion électorale, avec des tours successifs, jusqu’à l’élection d’un nouveau président, "quels que soient les résultats de tels échanges", précise le diplomate.

À la question de savoir si ce changement d’appellation changerait la donne, la réponse a été: "Concrètement, seul le format est différent, les concertations étant moins formelles qu’une conférence ou un dialogue national". Il s’agit, selon la source diplomatique, "d’une sorte de dynamique qui s’activerait entre les multiples acteurs concernés par la présidentielle et pour laquelle M. Le Drian s’est dit prêt à jouer le rôle de médiateur".

Objectifs atteints de la visite

Sur la réussite de la mission de M. Le Drian, le diplomate souligne que sa visite "s’est inscrite dans un cadre assez spécifique qui répond à deux objectifs principaux: le soutien de la dynamique du Quintette et la mise au point concernant les derniers développements relatifs au blocage politique et à la vacance au niveau de la première magistrature du pays. Et ce, d’autant plus que le dossier libanais sera à l’ordre du jour de la réunion du sommet international qui se tiendra le 8 juin prochain, après la cérémonie organisée à l’occasion du 80e anniversaire du débarquement en Normandie de 1944 ". Dans le cadre de ce sommet, les présidents américain, Joe Biden, et français, Emmanuel Macron, "discuteront indubitablement de la situation au Liban", selon la source occidentale.

Une nouvelle visite de M. Le Drian au Liban "n’est pas exclue", indique-t-on de même source, mais l’on se demande si celle qui vient de s’achever portera ses fruits avant que le Liban disparaisse complètement de l’échiquier politique.