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Le vide guette, derechef, l’institution militaire. Cette fois, c’est le Conseil militaire qui est visé. Après que le Conseil d’État a gelé l’exécution d’une décision prise, le 6 décembre dernier, par le ministre sortant de la Défense, Maurice Slim, le général de division Pierre Saab devra passer à la retraite le 27 septembre prochain… à moins que le Conseil d’État ne revienne sur sa décision, ce qui est très improbable, selon les juristes.

Recontextualisons l’affaire. Le 15 décembre 2023, le Parlement approuve une loi qui proroge le mandat des chefs des services de sécurité et du commandant en chef de l’armée, Joseph Aoun. Se basant sur cette loi, le ministre sortant de la Défense, Maurice Slim, considère que ce texte pouvait être appliqué aux membres du Conseil militaire et qu’il pouvait étendre son champ d’application pour en faire profiter ses membres, dont les généraux de division Pierre Saab (grec-catholique et proche du Courant patriotique libre – CPL) et Mohammad Moustapha.

Lésé par cet acte administratif, le général Edgard Lawandos décide de présenter un recours devant le Conseil d’État pour demander l’annulation de cette décision. "Au niveau de la forme, le général Lawandos aurait estimé avoir intérêt à agir pour profiter d’un poste censé devenir vacant le 27 septembre prochain", signale-t-on de source judiciaire. "Quant au fond, Edgard Lawandos a dû signaler que la décision du ministre constitue une erreur de droit, puisque les membres du Conseil militaire ne peuvent pas profiter de la loi en question, qui est d’application stricte", poursuit-on de même source. Et, d’ajouter: "Il s’agit d’une loi d’exception qui concerne exclusivement les chefs des organismes militaires et sécuritaires de l’État. Elle ne peut être étendue par interprétation à d’autres postes de commandement, puisqu’elle concerne uniquement les commandements dits suprêmes."

Mercredi, le Conseil d’État se prononce enfin sur le recours présenté devant lui, sans pour autant trancher l’affaire définitivement: l’extension du champ d’application de la loi de décembre est illégale, voire inexistante. "La décision de M. Slim est donc nulle et sans effet aucun, ce qui signifie que le 27 septembre prochain, le général Saab devra passer à la retraite", explique Chucri Sader, ancien président du Conseil d’État. D’après lui, le verdict "définitif" du Conseil d’État devrait être conforme à la décision de sursis à exécution dont les motifs ont été élaborés et qu’il aboutirait très probablement à l’annulation de la décision du ministre sortant de la Défense. Assertion partagée par la source précitée: "Aujourd’hui, la décision de M. Slim n’est pas encore annulée. Le Conseil d’État a émis une décision avant-dire droit, sur laquelle il pourrait théoriquement revenir, même si tous les éléments vont dans le sens d’une annulation. Aucun délai n’étant fixé pour que le Conseil d’État rende son jugement final, le général Saab ne pourra plus profiter de la prolongation de sa fonction, au-delà du 27 septembre".

Cela signifie que le Conseil militaire se verra "vider" de certains des postes en son sein. Le gouvernement étant démissionnaire, il ne peut procéder à la nomination de nouveaux membres et en cas de défaut de quorum, les pouvoirs de cet organisme sont normalement transférés au commandant en chef de l’armée.

Le Conseil militaire connaîtra-t-il le même sort que celui de l’Assemblée plénière de la Cour de cassation?

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