Le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a promis des représailles aux attaques israéliennes aux appareils de transmission piégés, dans laquelle il a vu "une déclaration de guerre". La priorité reste cependant pour lui, un arrêt des hostilités à Gaza.

La mine sombre, la voix par moments étouffée et entrecoupée de quelques soupirs, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a promis sans surprise, jeudi, des représailles dures à la double attaque israélienne aux appareils piégés contre ses combattants, mardi et mercredi. S’il a mis Tel Aviv au défi de mettre en œuvre son plan de ramener chez elles les populations déplacées du nord israélien et d’établir une ceinture de sécurité au niveau de la frontière sud, le chef du Hezb a montré que l’objectif de sa formation reste le même: obtenir une cessation des hostilités à Gaza.

Pour son discours très attendu après la double attaque israélienne qui a amputé sa formation d’un nombre impressionnant de ses membres (37 tués et 3.021 blessés, selon un dernier bilan officiel), Hassan Nasrallah n’a pas dérogé, ni dans la forme, ni sur le fond, à sa rhétorique habituelle, sinon pour accentuer les menaces contre Israël et révéler, pour la première fois peut-être, les raisons pour lesquelles, par ses bons soins, le Sud est à feu et à sang: "Le front de soutien avec le Hamas reste la meilleure carte de négociation" pour Gaza, a-t-il reconnu.

Le chef du Hezbollah a d’emblée évoqué la double attaque aux bipeurs et aux talkies-walkies piégés, reconnaissant qu’elle a porté "un coup dur" à sa formation. Il a accusé Israël d’avoir "dépassé tous les garde-fous et les lignes rouges, et d’avoir enfreint toutes les règles d’affrontement" après avoir souligné que les explosions se sont produites dans des hôpitaux et divers lieux publics "où se trouvaient de nombreux civils, des femmes et des enfants".

Une déclaration de guerre

Selon lui, ce qui s’est passé est "une déclaration de guerre qui n’a pas ébranlé et n’ébranlera pas le Hezbollah", ainsi qu’une "une tentative de meurtre prémédité". "Israël a voulu tuer en deux minutes non moins de 5.000 personnes" par l’explosion des bipeurs et des talkies-walkies, s’est-il indigné, reprochant vivement à l’État hébreu d’avoir "utilisé des appareils civils pour mener son attaque". "Je vais qualifier cette agression inique de massacre. Il faudra l’ajouter à la liste de massacres perpétrés par l’ennemi israélien", a poursuivi le chef de la formation pro-iranienne, qui a également dénoncé "une agression flagrante contre le Liban et sa souveraineté".

Hassan Nasrallah a reconnu que le nombre d’atteintes aux yeux, parmi les blessés, est très élevé, relevant que le nombre victimes aurait pu être plus important, mais que de nombreux bipeurs étaient éteints et que d’autres, parmi le lot acquis, n’avaient pas été encore distribués.

Il a annoncé que sa formation a mis en place une commission d’enquête qui suit la piste des bipeurs depuis leur fabrication, affirmant que celle-ci "a déjà abouti à des résultats préliminaires et qu’elle ne devrait pas tarder à connaître la vérité" sur cette attaque inédite.

"Nous ne fléchirons pas. Nous deviendrons plus forts et nous restons prêts à faire face au pire", a encore dit le chef du Hezbollah, dont une bonne partie du discours semblait surtout s’adresser à son public, ébranlé par le coup de massue asséné par Israël.

Face au décalage, qu’il a d’ailleurs reconnu, au niveau des moyens dont disposent les deux forces en place, Hassan Nasrallah a ainsi mis en avant "la détermination et l’endurance de sa formation qui lui permet d’enregistrer des victoires successives".

Pendant que l’aviation israélienne menait une série de raids fictifs au-dessus de Beyrouth, larguant des ballons thermiques et franchissant le mur du son, il s’est étendu sur ce qu’il a appelé "la forte pression exercée par le Hezbollah sur le front sud et qui empêche Israël d’atteindre ses objectifs de guerre".

Peu importe la destruction de cette partie du Liban et les pertes infligées à sa population, Hassan Nasrallah a reconnu qu’il est prêt à continuer de les sacrifier, rien que pour améliorer les conditions de négociation des Palestiniens qui gravitent dans l’orbite iranienne. "Le front de soutien est aujourd’hui la plus importante carte de négociation que détiennent les Palestiniens pour faire cesser l’agression contre Gaza", a-t-il dit, réaffirmant qu’un retour au calme sur le front sud est à exclure tant que la guerre à Gaza se poursuit. "Et ce, quels que soient les sacrifices, les conséquences et l’impact sur la région", a déclaré celui qui a dit croire que "l’équilibre de la terreur imposée sur le front sud, empêchera Israël de lancer une guerre d’envergure contre le Liban". Une façon aussi de dire qu’il est prêt pour une action qui déclencherait un embrasement général que la communauté internationale s’efforce d’éviter.

"Un enfer pour les militaires israéliens"

Pour ce qui est des "changements des objectifs de guerre", annoncés par Israël, mardi matin, pour assurer le retour chez elles des populations des régions nord, Hassan Nasrallah a promis de ne pas laisser Tel Aviv atteindre ses objectifs. "Vous ne pourrez pas le faire", a-t-il martelé, estimant, encore une fois, que "seul un cessez-le-feu à Gaza, fera rentrer chez eux les déplacés israéliens".

Il a mis en garde Tel Aviv contre une opération militaire qui serait menée à cet effet "mais ne servira qu’à déplacer davantage d’Israéliens".

Le chef du Hezb a dans le même temps mis Israël "au défi d’envahir le Liban pour établir par la force une ceinture de sécurité dans la bande frontalière", estimant qu’une telle opération sera pour le Hezbollah "une occasion historique de cibler les militaires israéliens" et promettant de "la transformer en enfer pour l’armée israélienne".

Il a conclu en promettant de riposter à la double attaque de mardi et de mercredi, soulignant, comme à chaque fois, que sa formation "se réserve le droit d’en fixer la date et le lieu, et d’en déterminer la forme". Hassan Nasrallah a tenu à préciser que "les détails de la riposte se limiteront à un cercle restreint de cadres du Hezb", trahissant ainsi des soupçons d’un noyautage de sa formation.

Une promesse qui n’est pas sans rappeler celle, jamais tenue, de venger l’assassinat de son chef militaire, Imad Moghnieh, dans un attentat à la voiture piégée en Syrie, en février 2008.

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