Raconter Pierre Gemayel quinze ans après sa mort n’est pas un simple exercice de mémoire. Bien au-delà des générations, des divergences idéologiques, des barricades insensées, c’est un jeune libanais impétueux et créatif qui resurgit dans mon esprit. Tout comme Samir Kassir, Gebran Tuéni et Mohammad Chatah tombés avant ou après lui, il aura été le symbole d’une indépendance retrouvée l’espace d’un matin puis livrée par leur mort et celle de tant d’autres à un monstre qui dévore le Liban et le Proche-Orient, et qui assassine un 21 novembre nos 22 novembre de l’indépendance.
Ce 21 novembre 2006, Pierre quitte son ministère pour des condoléances à Jdeidé. Avant d’y parvenir l’embuscade le surprend. Plusieurs assassins d’appartenance connue par le monde entier mais inconnus de nos services négligents et de notre justice indigente, mettent fin à la vie et à la carrière de celui qui s’inscrira dans ma mémoire, comme un réformiste et rénovateur hors normes. Se débattant dans un système politique ligoté par les héritages, corrompu par les us et coutumes décennaux, déchiré par des luttes intestines partisanes, Pierre Gemayel qui battait la chaussée à la tête de manifestants est sollicité pour donner un nouveau souffle à l’industrie libanaise qui se fait vieillotte et poussive.
Refaire un parti, refaire un ministère, refaire des élections, autant de défis qu’il relève avec sa vaillance acquise et sa sagesse innée. Pierre déblaiera le terrain miné par les Syriens et alourdi par les vieux éléphants de son propre parti pour redonner aux Kataëb un new-look loin des anciennes nostalgies fascisantes ou féodales. De Bickfaya à Beyrouth, à ses banlieues, à toutes les régions du Liban, il érige aussi l’amour de l’industrie en passion du Liban. Avec le Cèdre qui orne son drapeau, il y a en toile de fond une cheminée ou un ordinateur et toujours, toujours, une idée impétueuse. En quinze mois de ministère, il crée un nouveau culte, le répand dans le monde arabe et se présente comme l’un des espoirs du renouveau libanais.
Cheikh Amine fasciné, suit le parcours, Joyce le nourrit de sa verve maternelle : au terroir s’ajoute désormais le progrès. Samy suit avec ferveur l’opération de dépoussiérage ; on chasse les opportunistes, on écrase les poux.
Et puis, sur le plan national, Pierre assumera un stage rapide en Conseil des ministres. Vite, il monte au créneau. Avant et après la guerre de 2006, il saisit les enjeux et découvre la mise en péril du Liban. Son opposition bien ajustée à la véhémence des ministres du Hezbollah, déjà partisans de la loi du nombre en défi de la parité, lui valent, bien sûr, leur hostilité ravivée. Ses prises de position à la Chambre font annale dans les Chroniques de la révolution du Cèdre.
Pour Pierre, le complot est déjà dévoilé. C’est ce qui lui vaudra les rafales fatales du 21 novembre 2006. Trop, c’est trop pour ceux qui préparent déjà la mainmise sur le pays par le meurtre, le sit-in, le coup d’état rampant.
J’étais à Paris en ce 21 novembre, au Comité International de bioéthique lorsque me parvient la nouvelle de l’odieux attentat. Encore un, et pas le dernier.
Dans les mois qui suivent, Pierre Gemayel est toujours là en salle de conseil ; un drapeau libanais tapisse son fauteuil, timide symbole d’une lutte qu’il a engagée et qui depuis se poursuit sans fin.
Lorsque nous pleurons devant sa dépouille, avec sa famille, sa femme, ses enfants, ce chevalier sans peur et sans reproches, c’est une nouvelle et jeune pousse du Liban de demain que nous voyons partir. Bien avant le 7 mai 2008, les chemises noires, les armées parallèles, le contrat-scandale du 31 octobre 2016, le 17 octobre 2019, l’explosion du port, Pierre Gemayel s’en est allé victime du terrorisme régional et de la couardise nationale. Alors aujourd’hui, que tous ceux qui s’agitent sous mille et une étiquettes n’oublient pas ce pionnier. Et surtout qu’ils n’omettent pas de mettre la souveraineté au niveau des réformes. Sans l’une, pas d’autre.
Pierre Gemayel l’avait compris et mis en œuvre jusqu’à l’ultime sacrifice : pas dans les salons et sur les réseaux sociaux (!) mais sur les véritables champs de bataille d’un Liban uni, souverain, indépendant, démocratique et fier de ses deux familles : le monde arabe et le monde.
Ce 21 novembre 2006, Pierre quitte son ministère pour des condoléances à Jdeidé. Avant d’y parvenir l’embuscade le surprend. Plusieurs assassins d’appartenance connue par le monde entier mais inconnus de nos services négligents et de notre justice indigente, mettent fin à la vie et à la carrière de celui qui s’inscrira dans ma mémoire, comme un réformiste et rénovateur hors normes. Se débattant dans un système politique ligoté par les héritages, corrompu par les us et coutumes décennaux, déchiré par des luttes intestines partisanes, Pierre Gemayel qui battait la chaussée à la tête de manifestants est sollicité pour donner un nouveau souffle à l’industrie libanaise qui se fait vieillotte et poussive.
Refaire un parti, refaire un ministère, refaire des élections, autant de défis qu’il relève avec sa vaillance acquise et sa sagesse innée. Pierre déblaiera le terrain miné par les Syriens et alourdi par les vieux éléphants de son propre parti pour redonner aux Kataëb un new-look loin des anciennes nostalgies fascisantes ou féodales. De Bickfaya à Beyrouth, à ses banlieues, à toutes les régions du Liban, il érige aussi l’amour de l’industrie en passion du Liban. Avec le Cèdre qui orne son drapeau, il y a en toile de fond une cheminée ou un ordinateur et toujours, toujours, une idée impétueuse. En quinze mois de ministère, il crée un nouveau culte, le répand dans le monde arabe et se présente comme l’un des espoirs du renouveau libanais.
Cheikh Amine fasciné, suit le parcours, Joyce le nourrit de sa verve maternelle : au terroir s’ajoute désormais le progrès. Samy suit avec ferveur l’opération de dépoussiérage ; on chasse les opportunistes, on écrase les poux.
Et puis, sur le plan national, Pierre assumera un stage rapide en Conseil des ministres. Vite, il monte au créneau. Avant et après la guerre de 2006, il saisit les enjeux et découvre la mise en péril du Liban. Son opposition bien ajustée à la véhémence des ministres du Hezbollah, déjà partisans de la loi du nombre en défi de la parité, lui valent, bien sûr, leur hostilité ravivée. Ses prises de position à la Chambre font annale dans les Chroniques de la révolution du Cèdre.
Pour Pierre, le complot est déjà dévoilé. C’est ce qui lui vaudra les rafales fatales du 21 novembre 2006. Trop, c’est trop pour ceux qui préparent déjà la mainmise sur le pays par le meurtre, le sit-in, le coup d’état rampant.
J’étais à Paris en ce 21 novembre, au Comité International de bioéthique lorsque me parvient la nouvelle de l’odieux attentat. Encore un, et pas le dernier.
Dans les mois qui suivent, Pierre Gemayel est toujours là en salle de conseil ; un drapeau libanais tapisse son fauteuil, timide symbole d’une lutte qu’il a engagée et qui depuis se poursuit sans fin.
Lorsque nous pleurons devant sa dépouille, avec sa famille, sa femme, ses enfants, ce chevalier sans peur et sans reproches, c’est une nouvelle et jeune pousse du Liban de demain que nous voyons partir. Bien avant le 7 mai 2008, les chemises noires, les armées parallèles, le contrat-scandale du 31 octobre 2016, le 17 octobre 2019, l’explosion du port, Pierre Gemayel s’en est allé victime du terrorisme régional et de la couardise nationale. Alors aujourd’hui, que tous ceux qui s’agitent sous mille et une étiquettes n’oublient pas ce pionnier. Et surtout qu’ils n’omettent pas de mettre la souveraineté au niveau des réformes. Sans l’une, pas d’autre.
Pierre Gemayel l’avait compris et mis en œuvre jusqu’à l’ultime sacrifice : pas dans les salons et sur les réseaux sociaux (!) mais sur les véritables champs de bataille d’un Liban uni, souverain, indépendant, démocratique et fier de ses deux familles : le monde arabe et le monde.
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