Faisant la sourde oreille aux appels incessants de Joe Biden, MBS, le dirigeant de facto de l’Arabie saoudite, avait convenu avec la Russie en octobre dernier de réduire la production de pétrole afin de faire pression sur les prix. Dimanche, l’OPEP+, largement dominée par Moscou et Ryad, a choisi de maintenir le cap. Pas question, donc, de lâcher sur le prix du baril, surtout que l’UE avait décidé de plafonner celui du brut russe à 60$. Poutine a vite fait de menacer de ne plus livrer de pétrole aux pays qui adopteraient ce mécanisme. Affaire à suivre.

L’OPEP+ représente les treize membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole conduits par Ryad, et leurs dix alliés emmenés par Moscou.

 

Les pays producteurs de pétrole de l’Opep+ ont maintenu dimanche leurs quotas de production dans un climat très incertain, à la veille de l’entrée en vigueur de nouvelles sanctions visant le brut russe.

Les représentants des treize membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) conduits par Ryad, et leurs dix alliés emmenés par Moscou, ont convenu de garder le cap décidé en octobre d’une réduction de deux millions de barils par jour jusqu’à fin 2023, ont indiqué à l’AFP deux participants à la réunion.

Un communiqué de l’Opep+ a confirmé le maintien de la précédente décision, qui avait été prise pour soutenir les cours et avait suscité l’ire de la Maison Blanche soucieuse de faire baisser les prix à la pompe.

Siège de l’Opep à Vienne.

 

Depuis, les cours des deux références mondiales de l’or noir ont perdu du terrain et se situent entre 80 et 85 dollars, loin de leurs sommets à plus de 130 dollars atteints en mars après le début de l’invasion de l’Ukraine.

Ce qui, de " de manière rétrospective ", valide notre stratégie, se félicite le cartel. " C’était la ligne de conduite à adopter pour stabiliser les marchés ", argue-t-il.

Le prochain rendez-vous a été fixé au 4 juin 2023, mais le groupe s’est dit prêt à se réunir " à tout moment " d’ici là pour prendre des " mesures supplémentaires immédiates " si besoin.

La décision, largement anticipée, a été rendue après une rapide réunion par visioconférence, l’alliance renouant avec ses habitudes prises pendant la pandémie de Covid-19 après une exceptionnelle réunion début octobre à Vienne, siège du cartel.

Le ministre saoudien de l’Énergie, le prince Abdelaziz ben Salmane al-Saoud, (au centre) en plein débat avec Hadley Gamble, présentatrice vedette de la CNBC, au Sommet mondial des gouvernements à Dubaï le 29 mars 2022 lors d’une session plénière intitulée " Le monde est-il Prêt pour un avenir au-delà du pétrole ? " (AFP)

 

Ce statu quo se justifie notamment par " l’incertitude quant à l’impact sur la production de brut russe " du nouveau train de sanctions, a commenté pour l’AFP Giovanni Stauvono, analyste d’UBS.

La Russie est vent debout contre le plafonnement du prix de son pétrole que l’Union européenne, le G7 et l’Australie ont prévu de mettre en place lundi " ou très peu de temps après ".

C’est aussi ce jour-là que débute l’embargo de l’UE sur le brut russe acheminé par voie maritime, qui va supprimer les deux tiers de ses achats à Moscou.

Objectif de ces mesures: priver Moscou des moyens de financer sa guerre en Ukraine.

 

Le cours du baril de brut de l’Oural évolue actuellement autour de 65 dollars, soit à peine plus que le plafond de 60 dollars, impliquant un effet limité à court terme.

Mais le Kremlin a prévenu qu’il ne livrerait plus de pétrole aux pays qui adopteraient ce mécanisme.

De quoi placer certaines nations " dans une position très inconfortable: choisir entre perdre l’accès au brut russe bon marché ou s’exposer aux sanctions du G7 ", explique Craig Erlam, analyste chez Oanda.

 

Autre élément qui a joué dans la décision de l’Opep+, selon l’expert d’UBS, " un certain allègement " des strictes restrictions sanitaires en Chine, de nature à atténuer les inquiétudes du marché.

La demande de ce pays, qui est le premier importateur de brut au monde, est scrutée par les investisseurs, et le moindre signe de ralentissement de l’économie ou de regain épidémique se répercute directement sur les cours.

Dans ce contexte morose et devant les craintes d’une récession mondiale, le Brent de la mer du Nord et son équivalent américain, le WTI, ont chuté d’environ 8% depuis la dernière réunion de l’alliance début octobre.

 

Si l’Opep+ a opté dimanche pour la prudence, l’alliance pourrait dans les mois à venir " adopter une position plus agressive ", dans un avertissement à l’Occident qui hérisse le cartel en réglementant les prix, pronostique Edoardo Campanella, analyste d’UniCredit.

De quoi " aggraver la crise énergétique mondiale ", avertit-il. Et susciter l’ire de Washington, dont les efforts diplomatiques auprès de Ryad pour faire baisser les prix ont échoué.

Avec AFP